Suisse

Au cœur de l’Emmental: deux histoires, une passion

Yammen, au premier plan, est fromager depuis quatre ans, tandis qu’Andrea a récemment commencé sa formation. tvsvizzera

Dans une vallée suisse, au cœur de l’Emmental, deux jeunes gens issus de mondes différents – la Syrie et l’Italie – se retrouvent à partager la même passion. Le secteur de la transformation du lait, confronté à une pénurie de personnel qualifié, leur offre la possibilité de refaire leur vie en Suisse.

Ce contenu a été publié le 03 novembre 2023 – 08:31




premier semestre 2022Lien externe, les exportations ont diminué de 9,8% pour le Gruyère AOC, de 15% pour l’Emmental AOC et de 5,1% pour l’Appenzeller. Martin Spahr, directeur commercial de l’organisation faîtière de l’industrie fromagère Switzerland Cheese MarketingLien externe, évoque deux raisons principales pour expliquer la baisse des exportations de fromage: «Il est important de rappeler que pendant la pandémie, la consommation, la production et les exportations de fromage ont atteint des niveaux sans précédent entre 2020 et 2021. Actuellement, nous vivons une période difficile avec la guerre en Ukraine et la hausse de l’inflation en Europe, notamment dans les principaux pays d’exportation que sont l’Allemagne, la France, l’Italie et les États-Unis. C’est une première explication à la baisse des ventes à l’étranger. Pour ne rien arranger, le fromage suisse est devenu beaucoup plus cher à l’étranger ces dernières années en raison de la force du franc. La crise actuelle touche tous les produits, y compris le fromage.»

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Motivation et volonté

Le moment est venu de se consacrer au fromage de chèvre. Yammen est déjà à l’œuvre. Il verse le caillé sur une table en acier, puis le dépose dans de petits récipients qui donneront forme au fromage. «Il faut de l’expérience pour faire ce travail», explique-t-il. «Le poids ne doit pas être inférieur à 130 grammes, sinon nous ne pouvons pas les vendre.»

Bien qu’il ne travaille à la fromagerie Gohl que depuis quatre ans, Yammen n’a besoin que d’un coup d’œil pour repérer les fromages trop grands ou trop petits. Il retire une partie du caillé d’un moule pour l’ajouter à un autre. Pendant ce temps, Andrea nettoie les récipients en plastique blanc, où se trouvait le lait de chèvre.

Andrea et Yammen travaillent en harmonie, sans jamais prononcer un mot. Ils forment un duo très uni. Hansueli Neuenschwander, le directeur de la fromagerie, a su déceler leur potentiel à tous les deux.

«Depuis un certain temps, le secteur laitier est confronté à une pénurie de personnel qualifié», souligne ce dernier. Une observation confirmée par l’Association de l’industrie laitière. «Comme dans presque tous les secteurs, la pénurie de personnel qualifié sera l’un de nos plus grands défis dans les années à venir», explique Roland Tanner, responsable de la communication de l’organisation.

Manque de personnel qualifié

Comme d’autres secteurs économiques, l’industrie laitière est confrontée depuis des années à une pénurie de personnel qualifié. Les laiteries ont des difficultés à recruter du personnel qualifié, non seulement dans la production, mais aussi dans la vente. «À l’heure actuelle, nous ne disposons pas encore de données définitives sur les places d’apprentissage encore vacantes dans le secteur laitier», souligne Roland Tanner.

Le site web Technologue du laitLien externe répertorie près de 320 laiteries où des places d’apprentissage étaient encore disponibles pour 2023 à la fin du mois de septembre. Selon Roland Tanner, en raison de l’évolution structurelle du secteur, environ la moitié des laiteries du pays ont disparu au cours des 25 dernières années (voir aussi l’article «La Suisse, pays du lait: une vocation en péril»Lien externe).

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La fromagerie Gohl se trouve à une dizaine de minutes en voiture de Langnau, le chef-lieu de l’Emmental. L’accès par les transports publics est compliqué. Le directeur est conscient que ceux qui décident d’y faire un apprentissage ne le font pas par facilité. «Il faut une bonne dose de motivation et de détermination», explique Hansueli Neuenschwander. «Ce sont deux qualités qui permettent également de surmonter les barrières linguistiques.»

Yammen en est la preuve: en 2021, il a terminé avec succès son apprentissage de technologue du lait. Il travaille à Gohl depuis quatre ans et ne rêve pas de faire autre chose. «J’ai une bonne vie ici. J’ai un travail et un logement. Cela me suffit», déclare Yammen.

Andrea, quant à lui, doit encore s’adapter. Tout est nouveau pour lui: se lever tôt, la langue, le travail. «Pour l’instant, j’aime tout», assure-t-il. «Ce n’est pas toujours facile, mais voir que Yammen a réussi me donne confiance. Je veux aussi devenir fromager.»

La fromagerie Gohl

La fromagerie GohlLien externe a une longue tradition. Fondée en 1830 en tant que coopérative pour la production d’Emmental, elle est aujourd’hui dirigée par la quatrième génération de la famille Guggisberg. À côté de l’ancien bâtiment, une nouvelle installation a été inaugurée en 2016, où sont produits des fromages à pâte dure, à pâte mi-dure et à pâte molle.

Outre l’Emmental AOC, des spécialités à base de lait de chèvre et de brebis sont également produites depuis une quarantaine d’années. La laiterie transforme près de 7,5 millions de kilogrammes de lait de vache par an, fournis par quelque 80 agriculteurs. 21 éleveurs de chèvres produisent environ 450’000 kg de lait, tandis que huit éleveurs de brebis en produisent environ 230’000 kg.

En 2022, la demande d’Emmental AOC a diminué en Suisse et à l’étranger, ce qui a également affecté la fromagerie Gohl, qui a dû licencier deux employés et en délocaliser un. Actuellement, la laiterie emploie 17 personnes, dont 10 à temps partiel.

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Adaptation de l’italien: Katy Romy

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