France

Accidents du travail : Pourquoi les chiffres sont si mauvais en Bretagne

L’audience a lieu ce jeudi après-midi devant le tribunal correctionnel de Saint-Brieuc. Géant français de la volaille, le groupe LDC comparaît pour homicide involontaire après le décès d’un saisonnier sur le site de Lanfains (Côtes-d’Armor) le 25 octobre 2021. Alors qu’il démarrait tout juste son contrat, Tom Le Duault, 18 ans, était mort coincé sous une cuve contenant des centaines de kilos de volaille.

Un tragique accident du travail qui n’est malheureusement pas un cas unique en Bretagne. Chaque année, entre 35.000 et 40.000 accidents du travail déclarés et reconnus sont recensés dans la région, dont une trentaine de mortels, selon les chiffres de l’inspection du travail. « Il faut y ajouter une douzaine de morts par an dans des accidents de trajet », souligne Hélène Avignon, responsable du pôle politique du travail de la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Dreets) de Bretagne.

Le poids de l’agroalimentaire dans la région

Des chiffres éloquents qui placent la région parmi les pires élèves au niveau national. Selon l’Observatoire de la santé au travail publié fin février par la Mutualité Française, les Côtes-d’Armor sont même le département où les accidents du travail sont les plus fréquents avec 29,1 accidents par million d’heures rémunérées.

Comment expliquer un si mauvais bilan ? « C’est principalement lié à la typologie de l’emploi dans la région », assure Hélène Avignon. « Garde-manger de la France », la Bretagne est en effet la première région agroalimentaire d’Europe avec près de 75.000 salariés. Un secteur de poids donc mais qui est aussi particulièrement accidentogène. Rien qu’en 2018, 3.613 accidents du travail ont été déclarés dans les usines et les abattoirs de la région. Avec parfois des issues tragiques comme en atteste le drame de Lanfains.

L’agroalimentaire n’est cependant pas le secteur à risques dans la région. On recense ainsi de nombreux accidents du travail dans le domaine de la construction, des travaux forestiers et de la pêche. « Mais nous avons des difficultés à obtenir des chiffres précis dans le secteur de la mer », reconnaît la responsable de la Dreets Bretagne.

L’accent mis sur la formation des intérimaires

Pour inverser la tendance, les services de l’inspection du travail ont adopté cet automne un quatrième plan régional qui met particulièrement l’accent sur la prévention des accidents du travail graves et mortels. Il cible notamment les conditions de travail dans les établissements d’abattage et de transformation de viande bovine et porcine. Car ces usines font appel à de très nombreux intérimaires, des personnes particulièrement vulnérables aux accidents du travail en raison de leur manque d’expérience professionnelle. Sans compter leur formation à la sécurité qui est parfois expédiée en vitesse dans certaines sociétés.

Dans le cas de Tom Le Duault, le jeune homme n’avait ainsi reçu aucune formation pour conduire l’appareil de levage à l’origine de l’accident. Sur ce poste pourtant à risques, il n’avait pas non plus de protection individuelle. « Il y a une culture de la prévention des risques professionnels qu’il faut renforcer, prévient Hélène Avignon. Du côté des employeurs mais aussi des salariés qui doivent avoir conscience des risques encourus. »