Suisse

Légal ou illégal? Le danger méconnu du couteau suisse

Motif léopard, look alu, classique ou rouge transparent? La diversité du couteau de poche suisse ne connaît pratiquement aucune limite. © Keystone / Gaetan Bally

«Un vrai homme porte un couteau de poche dans la poche de son pantalon.» Ce dicton a longtemps été répandu en Suisse. Depuis, il est devenu une victime légitime du débat sur l’égalité des droits. Mais l’habitude de porter un couteau de poche perdure, et elle inclut aussi les femmes.

Ce contenu a été publié le 18 décembre 2023 – 08:16




20 MinutenLien externe le chercheur en matière de violence Dirk Baier, qui a dirigé l’étude. Il considère que le couteau remplit cette fonction, mais est aussi vu comme un objet qui sert à se protéger et à protéger ses amis. Selon l’étude, ce sont surtout les jeunes ayant un faible niveau d’éducation qui ont une affinité pour les couteaux.

«Celui qui porte un couteau illégal jouit d’une reconnaissance parmi ses pairs», analyse Dirk Baier. Il est également facile de s’en procurer sur Internet. La tendance à l’importation d’armes illégales se poursuit, constatait déjà l’Office fédéral des douanesLien externe il y a trois ans.

Les personnes interpellées avec des couteaux illégaux risquent une amende ou une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à trois ans. Dans tous les cas, le délit est inscrit au casier judiciaire, même si l’infraction a été commise à l’insu du contrevenant.

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Même une recherche sur Internet ne révèle que quelques cas isolés: en 2020, par exemple, un Britannique a blessé le petit ami de sa mère vraisemblablement avec un couteau de l’armée suisse. La blessure dans le dos aurait été profonde d’environ un centimètre, rapporte le journal Oxford MailLien externe.

En 2019, un Ukrainien près de Kharkiv aurait castré le violeur de sa femme avec un couteau de poche suisse, selon le tabloïd britannique The SunLien externe, qui cite des médias locaux.

Le fabricant Victorinox réagit

Il n’est pas rare que le couteau représente un danger juridique pour son propriétaire. Ce n’est pas seulement le cas au Japon. Victorinox, le fabricant mondial de couteaux suisses, attire l’attention sur les risques juridiques sur son site Internet.

Interrogée, l’entreprise précise que son personnel de vente a été formé en conséquence. «Par exemple, au Royaume-Uni, où les dispositions sont plus strictes que dans le reste de l’Europe, nous avons affiché dans notre magasin une information sur laquelle nous attirons l’attention des clients sur les dispositions légales locales.»

Depuis le «Prevention of Crime act» de 1953, la Grande-Bretagne a durci à plusieurs reprises sa loi sur les armes. Dans de nombreux endroits, le port de couteaux est aujourd’hui interdit de facto, ou des conditions spéciales sont imposées. Le port n’est ainsi autorisé que dans une boîte à hameçons de pêche ou dans le coffre d’une voiture.

L’Espagne ou les Pays-Bas ont également des lois plutôt restrictives en la matière. Dans l’UE, une grande partie des États autorisent les couteaux dont la lame mesure entre 7 et 7,5 centimètres, mais exigent qu’ils ne puissent pas être ouverts d’une seule main et qu’ils ne puissent pas être bloqués. Toutefois, la réglementation n’est pas uniforme.

Le fabricant suisse Victorinox a réalisé un chiffre d’affaires de plus de 400 millions de francs en 2022, mais pas uniquement avec des couteaux de poche. © Keystone / Gaetan Bally

Victorinox reconnaît qu’il est difficile de garder un œil sur la situation juridique sur tous les marchés, qui change parfois à court terme. Le fabricant renvoie donc aux autorités locales.

«Nous ne pouvons pas édicter de règles juridiques contraignantes», souligne Victorinox. Le fabricant a ainsi convenu par contrat avec les partenaires de distribution qu’ils ne peuvent distribuer les couteaux que conformément à la loi.

Dans le développement des produits, l’accent serait mis sur la compréhension du couteau de poche comme outil multifonctionnel pour le quotidien. «Par définition, la plupart de nos modèles ne sont pas considérés comme des objets dangereux sur la plupart des marchés. Pour certains modèles plus grands, des solutions techniques ont été développées de manière à ce qu’ils puissent être adaptés aux exigences légales, par exemple pour les modèles qui peuvent s’ouvrir d’une seule main», précise encore l’entreprise.

Mais le fabricant n’est manifestement pas tout à fait à l’aise avec ce sujet, qui comporte également des risques économiques considérables. Dès l’année prochaine, Victorinox veut créer un poste de responsable de la conformité afin de suivre de plus près les règlements et les risques.

Une question d’honneur

Concernant la condamnation au Japon, l’entreprise écrit: Victorinox sait que «le Japon applique des règles particulièrement strictes». Cependant, il existe une certaine marge d’appréciation dans leur interprétation. «Cela signifie que la situation est évaluée en fonction des circonstances.»

Le Japonais condamné espère lui aussi bénéficier de cette marge d’appréciation. Bien que sa sanction ne corresponde qu’à une amende de stationnement, il veut faire appel, comme l’explique son avocat Toshiaki Takae à swissinfo.ch. Pour son client, il s’agit de défendre son honneur.

Adaptation de l’allemand: Katy Romy

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