Belgique

Denis Ducarme (MR) : “Il ne faut pas d’élection interne à la présidence du MR avant la fin 2024”

Faut-il organiser des élections internes en novembre, comme l’implique le terme normal du mandat de Georges-Louis Bouchez ? Les esprits s’échauffent au sein du MR à ce sujet…

En tant que dépositaire de la confiance de près de 40 % de nos membres à l’occasion des dernières élections internes (en 2019), j’ai la légitimité pour m’exprimer à ce sujet. Cela en surprendra peut-être certains, mais je pense que ce serait une pure folie de convoquer des élections à la présidence du MR quelques mois avant les scrutins de 2024 (fédéral, régional, européen et local). Le temps de la remise en jeu de la présidence du parti viendra naturellement après ces échéances. Mais il ne faut pas d’élection interne avant la fin de l’année 2024.

Quand cette question sera-t-elle tranchée ?

C’est au Conseil du MR (organe décisionnel du parti) de décider de la prolongation éventuelle du mandat du président, qui tient jusqu’à novembre. Il faudra qu’il y ait une décision au plus vite pour se mettre en ordre de marche en vue des scrutins de l’année prochaine. On ne se divise pas dans une telle période, même au travers de débats sereins. On est dans une période où l’on se rassemble. Je n’ai pas toujours été respecté au niveau du MR malgré mon score à la présidentielle. Mais j’ai mis mon ego de côté.

guillement

Je n’ai pas toujours été respecté au niveau du MR malgré mon score à la présidentielle. Mais j’ai mis mon ego de côté.« 

Georges-Louis Bouchez est-il l’homme de la situation pour négocier avec les autres formations après les élections ? Ses relations sont très difficiles avec les autres présidents. Ces derniers pourraient s’allier et renvoyer le MR dans l’opposition.

Les négociations gouvernementales ne sont jamais le fait d’un seul homme ou d’une seule femme, c’est le fait d’une équipe. Lors de la conception de la Vivaldi, les discussions étaient menées par David Clarinval, Sophie Wilmès et Georges-Louis Bouchez. Pour ma part, je suis stupéfait de voir que, depuis 20 ans au moins, nos adversaires politiques donnent leur avis, leur opinion, sur la personnalité des présidents libéraux. C’était le cas avec mon père (Daniel Ducarme) ; c’était le cas avec Charles Michel, désigné comme étant un poisson froid ; c’était le cas avec Didier Reynders, présenté comme un iceberg… Après les élections de 2024, il faudra négocier les majorités sur la base du projet politique et non sur la base des critiques ad hominem et des attaques personnelles.

Fronde au sein du MR contre Bouchez : Ducarme appelle son parti à un sursaut de dignité

Vous serez à nouveau candidat à la présidence du parti ?

Je ne m’interdis rien, je suis un homme libre. Les valeurs de ce mouvement coulent dans mes veines. Je mettrai tout en œuvre pour qu’il soit plus fort. Je travaillerai toujours avec ceux qui mettent ces valeurs avant leurs intérêts personnels et leur ego.

Quelle sera votre place sur les listes MR en 2024 ?

J’ai déjà une idée. Mais, dans les mois qui viennent, cela peut changer. Ma priorité est de redresser le MR à Charleroi au niveau communal. Georges-Louis Bouchez m’a demandé d’y être tête de liste. Pour les élections fédérales ou régionales, je suis à la disposition de ma formation politique. Je veux être là où je serai le plus utile. Ces dernières années m’ont fait mûrir sur le plan personnel. J’ai désormais 49 ans et je pense plus que jamais que l’engagement politique est une aventure collective. Il y a trop d’aventures individuelles aujourd’hui.

”Pour accéder aux fonctions de Premier ministre, Paul Magnette abaissera sans scrupule le pantalon des francophones devant Bart De Wever”

Dans La Libre du week-end, Bart De Wever affirme rechercher une alliance avec le PS pour le prochain gouvernement au fédéral en vue de mener une grande réforme de l’État. Le président des nationalistes flamands ne parle pas du MR comme d’un partenaire potentiel. Cela vous inquiète-t-il ?

Le nationalisme reste une infection politique. Pour le reste, je ne suis pas surpris. Rappelez-vous… Lors de la mise en place de la “suédoise” (la coalition qui a associé le MR, la N-VA, le CD&V et l’Open VLD de 2014 à 2018, NdlR), le PS parlait du MR comme d’un parti collaborateur…. Mais, en 2020, que se passe-t-il ? Paul Magnette se jette dans les bras de celui qu’il désignait comme le monstre et négocie avec Bart De Wever un projet de réforme de l’État. Et qui a empêché cette réforme de l’État ? Le Mouvement réformateur et les écologistes. Évidemment, la N-VA désigne à nouveau le PS comme étant son allié institutionnel. Je prends date avec vous : Paul Magnette exprime aujourd’hui le fait qu’il est contre le “confédéralisme” mais les socialistes essaieront de passer un accord institutionnel avec la N-VA en 2024. L’appétit et l’ambition de Paul Magnette sont tels que, pour accéder aux fonctions de Premier ministre, il abaissera sans scrupule le pantalon des francophones devant Bart De Wever.

guillement

Le nationalisme reste une infection politique. »

Bart De Wever à La Libre : « Le wokisme est un mouvement de vengeance »

En 2016, dans La Libre, vous appeliez à appliquer au PTB un “cordon sanitaire” similaire à celui qui corsète l’extrême droite. Depuis lors, le PTB a continué à grimper dans les sondages…

Les menaces sont multiples. Je pense à l’extrême droite en Flandre, mais également aux nationalistes de la N-VA. Ces derniers appellent au démantèlement de l’État belge ! Et puis, il y a les communistes… Je suis un amoureux de l’histoire et je ne comprends pas comment les méfaits du communisme – 100 millions de morts – ne sont pas davantage enseignés dans nos écoles. Il faudrait rappeler ce qu’une telle idéologie peut produire sur le monde. Pour le MR, c’est une évidence : il n’y aura jamais d’alliance avec le PTB, même au niveau communal. J’appelle les autres partis démocratiques à s’engager également à ne pas gouverner, à ne pas constituer de coalition avec le PTB. Moi, je ne fais pas de distinction entre extrême gauche et extrême droite : c’est la peste et le choléra. Aujourd’hui, le PS court après le PTB. Paul Magnette ou encore Thomas Dermine essaient d’imiter le langage et le discours du PTB. Les électeurs doivent savoir si le PS est prêt à s’allier avec le PTB au niveau national, régional, communal.

Je ne comprends pas comment les méfaits du communisme – 100 millions de morts – ne sont pas davantage enseignés dans nos écoles.« 

Denis Ducarme : « Le MR ne gouvernera pas avec la N-VA si elle s’associe au Vlaams Belang »

”Il faut restreindre le volume de visas octroyés aux ressortissants des pays qui ne jouent pas le jeu du transfèrement des détenus”

Dans le cadre de l’université d’été du MR, vous pilotez un atelier de réflexion sur les questions de l’asile et de la migration. Le MR doit-il durcir sa ligne sur ce sujet ?

Le MR est le seul parti politique à exprimer des propositions aussi claires sur le laxisme. Concrètement, on parle beaucoup de la surpopulation carcérale mais les gens n’imaginent pas que les personnes étrangères dans nos prisons représentent près de 5 000 personnes, condamnées ou en détention préventive. La moitié du parc carcéral, quasiment… Certains pays n’ont pas signé avec la Belgique des accords de réadmission. D’autres encore ont signé de tels accords mais ne jouent pas le jeu par rapport aux transfèrements. Ces personnes doivent pourtant être reprises par leur pays et y effectuer la peine pour laquelle elles ont été condamnées en Belgique. Par rapport à ces pays qui ne jouent pas le jeu, il faut sévir et sanctionner pour se faire respecter. La France l’a fait. L’Union européenne émet des signaux en ce sens. Et la Belgique ?

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Les personnes étrangères dans nos prisons représentent près de 5.000 personnes. »

Que proposez-vous ?

Il faut restreindre le volume de visas octroyés aux ressortissants des pays qui ne jouent pas le jeu du transfèrement, que l’on parle de visas touristiques, de visas pour le business, de regroupement familial. De même pour les pays qui ne reprennent pas les migrants qui sont déboutés de leur démarche liée à l’immigration en Belgique, ceux qui ont reçu un ordre de quitter le territoire.

Denis Ducarme député federal belge MR
Denis Ducarme, député fédéral MR, durant son entretien avec La Libre dans le Salon des Ambassadeurs à la Chambre des représentants. ©Jean Luc FLEMAL