France

Cannes : « Avis défavorable » pour le projet d’une nouvelle ferme aquacole décriée et jugée « pharaonique »

C’est un coup dur pour les responsables de la société cannoise Aquafrais, mais pas un coup d’arrêt, soulignent-ils. Décrié et jugé « pharaonique » par des pêcheurs et des élus, le projet d’extension de leur ferme aquacole visant à doubler la production de poissons a reçu un « avis défavorable » de la commissaire enquêtrice chargée de l’évaluer.

« Ce projet me semble peu compatible avec la vocation touristique de la baie » et « je ne pense pas [qu’il] puisse s’inscrire dans une démarche de transition écologique », écrit-elle notamment dans un rapport que 20 Minutes a pu consulter. Ses conclusions seront utiles au préfet maritime de la Méditerranée pour délivrer une autorisation ou non, d’ici quelques mois, mais ne seront qu’« un des éléments de décision », appuie l’entreprise.

Les « conséquences environnementales » en question

Aquafrais Cannes, qui exploite actuellement cinq sites d’élevage sur le littoral des Alpes-Maritimes entre Antibes et Théoule-sur-Mer pour une production annuelle de 570 tonnes de loups et de daurades, souhaite rationaliser ses équipements. Son projet prévoit de fermer trois de ses fermes, tout en se dotant d’une nouvelle structure de 24.000 m2 au large de Vallauris-Golfe-Juan. Un équipement qui lui permettrait d’atteindre les 1.200 tonnes annuelles.

Kevin Luciano, le maire divers droite de cette commune, mais aussi la députée européenne EELV Caroline Roose, le sénateur Philippe Tabarot et le député Éric Pauget (tous deux LR) se sont notamment élevés contre cette nouvelle implantation aux côtés de pêcheurs locaux. Tous s’inquiètent de l’impact économique d’une telle extension « sur la pêche artisanale » mais surtout de ses « conséquences environnementales ».

Dans ses conclusions, la commissaire enquêtrice regrette que « les réponses [d’Aquafrais] aux questions sur la pollution, les effets du changement climatique, la pression du milieu humain sur le golfe, la présence d’un milieu fragile théoriquement protégé, mais déjà surexposé, laissent à désirer ». « Les effets de la nouvelle ferme aquacole sur la santé humaine ne me semblent pas assez étudiés », écrit-elle notamment, en faisant référence aux antibiotiques qui pourraient être utilisés mais également à « la dispersion des fèces » des poissons et aux éventuels « rejets bactériologiques ».

« L’aquaculture véhicule beaucoup d’images fausses »

Dans une réponse envoyée à 20 Minutes, la société s’est dite « surprise » que le rapport « ait donné tant de poids aux dires et si peu aux réponses scientifiques d’Aquafrais Cannes à des questionnements légitimes ». « Sur la qualité de l’eau, nous avons fourni des analyses réalisées par des laboratoires indépendants à l’été 2022 et il n’en est fait aucune mention dans l’enquête. Les éléments cités sont à l’opposé de ce qui a été mesuré », appuie le directeur Jérôme Hemar.

Le directeur général d'Aquafrais Cannes, face à la baie de Golfe-Juan, près d'Antibes, où la société veut implanter une nouvelle ferme aquacole de 24.000 m2
Le directeur général d’Aquafrais Cannes, face à la baie de Golfe-Juan, près d’Antibes, où la société veut implanter une nouvelle ferme aquacole de 24.000 m2 – F. Binacchi / ANP / 20 Minutes

Selon lui, « l’enquête retranscrit l’avis du public sur le projet, or l’aquaculture est un sujet mal connu du grand public et véhicule beaucoup d’images fausses ». « Le résultat de l’enquête est donc le reflet de l’image de l’aquaculture en France », poursuit-il.

Il rappelle enfin qu’en octobre 2022, « l’autorité environnementale indépendante, la MRAE [Mission régionale d’autorité environnementale] », avait « émis un avis favorable » sur lequel le préfet maritime de la Méditerranée pourra également « s’appuyer ». Sa décision est attendue dans les prochains mois, a priori avant la fin de l’année.