France

Premier procès en Suisse de l’islamologue Tariq Ramadan poursuivi pour viol

C’est une affaire emblématique de l’époque de #MeToo. Figure de l’islam européen, Tariq Ramadan est passé par le système judiciaire français pour des accusations de viols et de harcèlement sexuel. C’est à présent en Suisse, son pays, que l’islamologue doit affronter la justice. Ce lundi, son procès se tient à Genève devant un tribunal correctionnel où il doit être jugé pour « viol et contrainte sexuelle » dans une affaire remontant à près de 15 ans et qu’il nie.

La plaignante suisse, qui dit vivre sous la menace et souhaite donc être appelée sous le prénom d’emprunt de « Brigitte », avait une quarantaine d’années à l’époque des faits. Elle assure que l’islamologue l’a soumise à des actes sexuels brutaux accompagnés de coups et d’insultes, le soir du 28 octobre 2008, dans une chambre d’hôtel à Genève. Selon l’acte d’accusation, il s’est rendu coupable de « viol à trois reprises » durant la même nuit et de « contrainte sexuelle », au point de l’étouffer. « J’ai rarement vu un dossier à ce point baigné dans les menaces et la peur », a déclaré l’avocat français de la plaignante, François Zimeray, ancien diplomate et spécialiste des droits humains.

L’intellectuel risque entre 2 et dix ans de prison

Tariq Ramadan, âgé de 60 ans aujourd’hui et menacé d’un procès en France pour des faits similaires, a reconnu l’avoir rencontrée mais affirmé au cours de l’enquête avoir renoncé à avoir une relation sexuelle avec elle. L’intellectuel suisse, figure charismatique et contestée de l’islam européen, risque entre 2 et dix ans de prison. Joint par l’AFP, l’un de ses avocats français, Me Philippe Ohayon, s’est refusé à tout commentaire avant ce procès très attendu, qui devrait durer deux à trois jours.

Le jugement sera prononcé le 24 mai, a précisé la justice genevoise. Tariq Ramadan pourra faire appel. Docteur de l’université de Genève où il a écrit une thèse sur le fondateur de la confrérie égyptienne islamiste des Frères musulmans qui était son grand-père, Tariq Ramadan était professeur d’Etudes islamiques contemporaines à l’université d’Oxford au Royaume-Uni jusqu’en novembre 2017 et invité de nombreuses universités au Maroc, Malaisie, Japon ou Qatar.

Soupçonné de viols commis sur quatre femmes en France

Populaire dans les milieux musulmans conservateurs, il reste contesté, notamment par les tenants de la laïcité qui voient en lui un partisan de l’islam politique. En France, il est soupçonné de viols commis entre 2009 et 2016 sur quatre femmes, une affaire qui a déclenché sa chute en 2017. Le parquet de Paris a requis en juillet son renvoi devant les assises et il appartient aux juges d’instruction chargés des investigations d’ordonner un procès ou pas.

Le dossier français lui a valu plus de neuf mois de détention provisoire en 2018 dont il est ressorti libre en novembre de la même année. Il reste sous contrôle judiciaire depuis. Tariq Ramadan est tenu de résider en France mais il bénéficie d’autorisations exceptionnelles de sortie du territoire français pour se rendre en Suisse dans le cadre de l’affaire jugée cette semaine à Genève.