Belgique

Diana Nikolic (MR) : “Supprimer la Fédération Wallonie-Bruxelles ne réglera pas les problèmes”

Ces dernières années, la thèse régionaliste a progressé dans différents partis. Y compris au MR. La disparition de la Fédération (ex-Communauté française) ne simplifierait-elle pas nos institutions ? Ne permettrait-elle pas des économies ?

Au MR, on entend de plus en plus de voix rappeler l’importance du lien entre les francophones de Wallonie et les francophones de Bruxelles. La FWB établit un lien naturel entre les grands centres urbains comme Liège, Charleroi, Namur, Verviers… et Bruxelles. Les problématiques y sont très similaires, ne serait-ce qu’en termes d’emploi et d’égalité des chances. L’enseignement primaire, secondaire et supérieur, c’est ce qui permet aux jeunes de trouver leur place dans la société de demain, de trouver un emploi.

Donc, on ne touche pas aux compétences de la Fédération ?

La discussion est ouverte. On parle beaucoup de ramener au niveau fédéral certaines compétences. Le fédéral a des compétences en matière de Santé, la Région aussi, ainsi que la Fédération. À mes yeux, il n’y a pas de problème à sortir ces matières de la Fédération Wallonie-Bruxelles pour les rassembler dans un tout plus cohérent au fédéral. Mais supprimer purement et simplement la Fédération, tout régionaliser, ne réglera pas l’endettement public et ne rendra pas plus efficaces les politiques menées.

Les gouvernements fédéral, flamand, bruxellois et de la Fédération Wallonie-Bruxelles proches de la mort clinique: que se passe-t-il?

Par exemple ?

Va-t-on organiser des diplomations différentes entre la Région wallonne et Bruxelles ? Cela n’a pas de sens. Même chose sur le nombre d’élus : il n’y a pas de députés propres à la Fédération. Ce sont les députés wallons et une partie des députés bruxellois qui y siègent. Au niveau de l’administration, il faudra toujours verser leur salaire aux enseignants, qu’ils soient payés par la FWB ou par les Régions. Et la dette ne va pas disparaître par enchantement : on se situe entre 10 et 11 milliards à la Fédération, tandis que la Wallonie est au-delà des 31 milliards et la Région bruxelloise à près de 10 milliards…. Ceux qui pensent faire des économies en supprimant la fédération se trompent. Oui, il y aurait une économie minime au niveau du personnel de l’administration du Parlement, par exemple. Ou peut-être dans les ministères grâce à des synergies et des mutualisations. Mais on peut faire cela sans supprimer l’institution.

guillement

Ceux qui pensent faire des économies en supprimant la Fédération se trompent. »

Faut-il donner un réel pouvoir fiscal à la Fédération afin de la sortir de sa dépendance budgétaire ?

Au MR, on n’est pas en faveur de plus d’impôt, on veut “mieux d’impôt”. On peut réfléchir à une meilleure répartition des moyens mais il faut d’abord faire mieux avec ce qu’on a. L’enseignement coûte déjà très cher par élève. Beaucoup plus cher que dans d’autres pays de l’OCDE qui, pourtant, performent mieux en matière d’apprentissage et d’acquisition des compétences. Améliorer la qualité de l’enseignement permettrait notamment de le rendre plus attractif. Comme il est financé par le fédéral sur la base du nombre d’élèves fréquentant les écoles francophones, le fait d’attirer plus d’élèves – plusieurs milliers d’enfants francophones sont scolarisés en Flandre ou à domicile – permettrait d’augmenter de facto ce financement. Ce n’est qu’une piste.

Le gouvernement de la FWB a été composé, par le passé, de ministres qui disposaient d’une “double casquette” car ils étaient également ministres régionaux. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Faut-il réintroduire le principe de la “double casquette” ?

Oui. Je plaide vraiment pour cela. On pourrait avoir un ministre-Président ou une ministre-Présidente propre à la Fédération pour assurer le lien de transversalité entre Bruxelles et Wallonie. Mais, pour les autres ministres, il doit y avoir des portefeuilles à “double casquette”. Cela fait partie des synergies à encourager. Il y a des liens entre les compétences qui le justifient. Je pense, par exemple, à la formation en alternance. C’est clair que là, il faut des ponts entre la Fédération et les Régions.

Pour en revenir aux compétences institutionnelles, le département “Sport” est éclaté entre la Fédération et les Régions. Ce n’est pas idéal, entend-on…

Au niveau du sport, il y a une réflexion à avoir : les infrastructures sportives sont régionales mais la politique sportive est au niveau de la Fédération… On pourrait tout rapatrier d’un côté ou de l’autre. Je plaide personnellement pour que la Fédération hérite de l’ensemble des compétences “Sport”. Certaines compétences peuvent être mieux gérées à la Région mais ce n’est pas une garantie automatique. C’est ma réponse aux régionalistes.

guillement

Je plaide personnellement pour que la Fédération hérite de l’ensemble des compétences « sport ».« 

Sur le changement des rythmes scolaires, le MR bruxellois, par la voix de son président, David Leisterh, a contesté le découplage des congés scolaires des élèves francophones par rapport à la Flandre. Le dossier a pourtant été validé par les libéraux, qui font partie du gouvernement de la FWB… Schizophrénie politique ?

On reproche souvent aux francophones d’être à la traîne… Pas ici. La réforme a été prise pour le bien-être pédagogique des enfants. Oui, sur le terrain, il y a débat. Mais beaucoup de parents et d’enseignants reviennent vers moi pour me dire que c’était une bonne chose. Après un an d’application, ils voient les effets positifs des nouveaux rythmes. On a bien conscience des difficultés pour certaines familles où les parents, par exemple, sont enseignants du côté francophone mais dont les enfants sont scolarisés en Flandre. On a de l’empathie avec les familles qui sont à cheval sur les deux communautés. Le MR lance donc un appel à la Flandre afin qu’elle monte dans le train avec nous. Pour 2023-2024, malheureusement, il n’y aura pas de vacances en commun… En Flandre, les libéraux (notamment) veulent avancer. Mais la N-VA bloque. En 2024, il y a des élections. Cela fera certainement partie des débats durant la campagne en Flandre.

guillement

Pour le changement des rythmes scolaires, le MR lance un appel à la Flandre afin qu’elle monte dans le train avec nous.« 

Le MR bruxellois a pointé les problèmes dans la réforme des rythmes scolaires.