France

Réforme des retraites : Jets de pavés, vitrines brisées… De nombreux heurts en marge des manifestations

De nos journalistes sur place à Nantes, Rennes, Lyon, Toulouse, Strasbourg, Lille et Bordeaux

Les manifestations s’enchaînent et la tension semble monter inexorablement. Ce mardi, la dixième journée nationale de mobilisation contre la réforme des retraites a réuni 450.000 manifestants en France, selon la CGT (les chiffres des autorités n’étaient pas immédiatement disponibles). Une participation globalement en repli, au contraire des débordements qui, eux, se sont intensifiés autour des cortèges. Les dégâts sont importants dans plusieurs villes. Le point avec nos journalistes sur place.

A Nantes, incendies et tags hostiles

A Nantes, les premiers heurts entre casseurs et forces de l’ordre sont intervenus en deuxième partie de défilé après des jets de projectiles quartier Feydeau. Le commissariat du centre-ville a été l’objet de dégradations, tandis qu’un incendie a été déclenché à l’entrée d’une agence bancaire voisine, obligeant les pompiers à sortir les lances à eau sous les yeux des manifestants. Quelques minutes plus tard, une voiture a été mise à feu sur une barricade constituée d’éléments de chantier. Comme jeudi dernier, le tribunal administratif de Nantes a également été pris pour cible avec, cette fois, des poubelles incendiées devant le porche. Du mobilier urbain a aussi été brisé, tandis que des tags hostiles à la police et au gouvernement ont été peints, notamment sur le mémorial à l’abolition de l’esclavage. Les affrontements se sont poursuivis une partie de l’après-midi.

A Rennes, des vitrines fracassées

Pendant une bonne heure et demie, le cortège a défilé dans le calme à Rennes. Le climat s’est largement dégradé quand une partie des 25.000 manifestants ont poursuivi leur chemin lors d’un rassemblement sauvage. De la gare aux rues du centre ancien en passant par la place de la République, quelques centaines de personnes ont fait face aux forces de l’ordre. Pour mettre fin aux dégradations de commerces, d’abribus et de mobilier urbains, les policiers ont usé de très nombreuses cartouches de gaz lacrymogènes. Les vitrines d’enseignes comme Zara, les Galeries Lafayette, l’assureur MMA ou encore une agence immobilière indépendante ont été fracassées par des individus radicaux masqués, au nombre de 350, selon les autorités. Les forces de l’ordre ont procédé à six interpellations. Quatorze policiers ont été blessés, selon la préfecture.

A Toulouse, un « usage régulier de gaz lacrymogène »

A Toulouse, le cortège a été coupé en deux rapidement par un cordon de gendarmes mobiles. Les canons à eau ont été utilisés pour disperser les frondeurs qui avaient pris la tête du cortège quasiment dès le début de la manifestation. Le cortège a avancé lentement au rythme « d’un usage régulier de gaz lacrymogènes », a fait savoir notre journaliste sur place Béatrice Colin. A 17 heures, elle ne rapportait ni affronts ni dégâts

A Lyon, des dégradations et des jets de projectiles

En début de manifestation, les services de l’Etat ont d’emblée annoncé cinq interpellations. Des dégradations ont été commises sur du mobilier urbain, des commerces et surtout des banques, selon notre journaliste sur place Elise Martin.

Comme à Toulouse, il s’agit d’actes engendrés par un millier d’individus, postés en amont du cortège. Elise Martin a constaté un usage régulier « de gaz lacrymos et quelques affrontements avec la police (jets de projectiles) jusqu’au pont de la Guillotère ». Une fois le pont passé, la tension est montée d’un cran – comme lors des précédentes manifs à cet endroit-là -. De nombreux projectiles ont été lancés en direction des forces de l’ordre (pavés, cailloux, bouteilles en verre, etc.). Les CRS ont répondu en utilisant à plusieurs reprises le lanceur d’eau et du gaz lacrymo.

Un groupe de manifestants est descendu sur la route sous le pont, bloquant la circulation. Il a cependant été vite dispersé à coups de cartouches de gaz lacrymogènes. Selon notre journaliste, le calme est revenu vers 17 heures, alors que le cortège avait rejoint la place Bellecour, près de quatre heures après le lancement de la manifestation.

A Lille, des heurts une heure après le départ du cortège

C’est vers 16 heures, soit une heure et demie seulement après le départ du cortège, que les premiers heurts entre les forces de l’ordre et les manifestants ont eu lieu. Certes, il y avait des policiers en nombre, devant, derrière et sur les côtés de la manifestation, mais la provocation est bel et bien venue de l’intérieur du cortège. Pétards, œufs, pierres ont soudain plu sur un groupe d’hommes de la BAC, lesquels n’ont pas répliqué immédiatement. Les lacrymogènes n’ont commencé à embaumer l’atmosphère que lorsque des manifestants ont tenté d’ériger un barrage de barrières sur le parcours. Plusieurs charges de policiers ont eu lieu, l’une d’elles se terminant par l’interpellation d’un homme, rue Nationale.

Dans la foulée, les vitres d’un abribus ont volé en éclats, brisées par un individu masqué, armé d’un poteau de mobilier urbain. Une quarantaine de minutes après les premiers heurts, tout s’est soudain calmé sans raison apparente, mais les slogans contre la réforme ont été remplacés par des invectives antipolice. Alors que le cortège arrivait place de la République, son terminus, la pluie a calmé les ardeurs. Certes, on a encore vu quelques bouteilles voler, mais on sentait que le cœur n’y était plus. A 17h30, la préfecture n’avait pas encore donné son chiffre de la mobilisation. Les manifestants, eux, se voyaient encore au moins 25.000.

A Bordeaux, des pavés et des poubelles brûlées

A Bordeaux, la fin de la manifestation était prévue à 15h30 mais rapidement plusieurs dizaines de manifestants se sont dirigées vers les quais, à hauteur du cours Alsace-Lorraine, afin de faire face aux forces de l’ordre. L’ambiance s’est rapidement tendue, avec au programme jets de pavés, tirs de lacrymos et poubelles brûlées rue de la Monnaie.

Les heurts se sont poursuivis en soirée et d’autres feux ont été allumés place de la Victoire. Sur le parvis du campus, les étudiants se sont rassemblés alors qu’un feu de poubelle condamnait l’accès à la rue de Candale. Plus tôt, vers 16h20, des affrontements ont lieu et des manifestants se sont réfugiés dans l’enceinte du campus pour échapper aux gaz lacrymogènes envoyés par les forces de l’ordre. Des individus identifiés comme des Black Blocs par nos confrères de Sud Ouest ont répliqué en lançant des pavés et des bouteilles en verre.

A Strasbourg, le jeu du chat de la souris

Entre 6.500 et 15.000 manifestantsse sont élancés de la place de la République comme prévu à 14 ehures, soit moitié moins que le 23 mars. Si au départ l’ambiance était bon enfant en fin de parcours, plusieurs centaines de personnes, pour la plupart habillées en noir, ont pris un itinéraire différent du tracé prévu. Lors d’une déambulation sauvage, jouant au jeu du chat et la souris avec les forces de l’ordre, ces centaines de personnes ont déferlé dans les rues adjacentes du centre-ville. Leur accès était défendu par la police. Cette dernière a utilisé les gaz lacrymogènes à plusieurs reprises, notamment pour bloquer la progression en direction du consulat des Etats-Unis. Plusieurs abris bus ont été caillassés, des poubelles brûlées et des murs tagués.

A Paris, les premiers heurts dès 16 heures

De premiers heurts entre forces de l’ordre et un groupe de plusieurs centaines de personnes se sont produits mardi vers 17 heures à Paris en tête de la manifestation contre la réforme des retraites. Certains membres de ce groupe ont pillé un commerce Leclerc et allumé un feu de poubelles. Les forces de l’ordre ont chargé pour « disloquer » « le bloc », permettre « l’intervention des pompiers » et « faciliter la progression du cortège », a indiqué la préfecture de police, qui a fait état de 22 interpellations.

Le matin, vers 11 heures, un millier de manifestants a envahi les voies de la Gare de Lyon mardi avant de tenir une assemblée générale en soutien à un cheminot éborgné lors de la manifestation jeudi, a constaté un journaliste de l’AFP. Partis de la Gare de Lyon, les manifestants ont marché dans le calme sur deux kilomètres, avec banderoles et fumigènes.