France

Réforme des retraites : Avant la réunion avec Elisabeth Borne, les syndicats veulent forcer la porte sur les 64 ans

L’échange doit s’organiser « autour des sujets sur lesquels on est d’accord ». Sur Public Sénat, Franck Riester a donné le ton de la réunion qui attend Elisabeth Borne et les syndicats en début de semaine prochaine. Pas de place pour le débat d’idées ou la négociation, et honneur aux textes qui vont dans le sens du gouvernement. Le ministre chargé des relations avec le Parlement, comme François Bayrou, a été très clair : les 64 ans, « c’est le cœur de la réforme », et c’est non négociable. Sauf que dans l’autre camp, largement mobilisé contre la réforme des retraites, les intentions sont bien différentes.

« Pour nous, l’ordre du jour sera sur les 64 ans », annonce sans ambages Pascale Coton, vice-présidente de la CFTC chargée des retraites, à 20 Minutes. Elisabeth Borne « ne va pas virer les syndicats de son bureau si on met le sujet sur la table », estime-t-elle. Mais la réunion pourrait tourner court à cause de ce sujet, si l’on en croit Laurent Berger. « Si on me dit « vous ne pouvez pas en parler » (…) ils sortiront de la salle ou alors on partira », a lancé le numéro 1 de la CFDT sur France info.

Deux ordres du jour bien différents

Alors, l’âge de départ à la retraite, au menu ou pas ? « La question sera abordée », admet le député Renaissance Mathieu Lefèvre, interrogé par 20 Minutes. « On peut continuer d’en discuter », mais le texte ne sera pas modifié pour autant. Pour le camp de la majorité, « on ne peut pas faire l’impasse sur le chemin démocratique », et désormais l’avenir du texte est dans les mains du Conseil constitutionnel. Le gouvernement a toutefois d’autres sujets à mettre sur la table.

Dans l’ordre des sujets prioritaires, « le partage de la valeur », « organiser les fins de carrière » et « remettre à niveau les branches sous le Smic », liste Mathieu Lefèvre. Autant de points que la CFTC se dit prête à aborder, mais après les retraites. « Si Elisabeth Borne écoute nos propositions » sur l’âge de départ, « ça débloque tout », affirme Pascale Coton. « Ce qui est sûr, c’est que nous, on ira discuter des retraites », a déclaré Laurent Berger. « Et du travail parce que ça va avec, mais (surtout) des retraites ! »

« Le fil rouge, c’est améliorer les droits des travailleurs »

L’enjeu est important pour la majorité présidentielle, face à un front syndical déterminé à poursuivre la mobilisation. Après avoir refusé de recevoir les syndicats au mois de janvier, Emmanuel Macron avait critiqué le « manque de propositions » des organisations salariales lors de son passage au 13 Heures de TF1 et France 2, la veille d’une manifestation record. « Il n’y a pas eu de refus », répond Mathieu Lefèvre, qui balaie les tensions actuelles en se concentrant sur « les moyens pour renouer le dialogue ».

« Il y aura un après réforme des retraites », veut-il retenir, dans lequel « les organisations sociales auront un rôle majeur à jouer ». « Le fil rouge, c’est améliorer les droits des travailleurs, on ne peut pas le faire sans eux », insiste le député du Val-de-Marne. Sur la question du partage de la valeur en entreprise, l’élu Renaissance veut d’ailleurs « organiser le rapport de force avec le patronat ». « La porte sera toujours ouverte aux syndicats », maintient-il.

Reste à voir qui sera présent. Le gouvernement a rejeté l’idée d’une médiation, avancée par Laurent Berger. « Si la médiation est synonyme de suspension du projet, ce n’est pas possible vu l’urgence » de mener la réforme, justifie Mathieu Lefèvre. Du côté des syndicats, la CFDT et la CFTC ont donc confirmé leur participation. Mais pas sûr que l’intersyndicale arrive au complet et unie, la faute à une CGT empêtrée dans un congrès houleux. « On ne peut pas avancer sans eux, ça ne se fait pas », estime Pascale Coton, qui veut attendre la nouvelle direction pour définir « une stratégie commune ».

Au rayon des inconnues, il faut rajouter la date, pas fixée. Autant d’éléments qui laissent planer sur cette réunion des risques de déception, prévient le secrétaire général de l’Unsa, Laurent Escure, avec un effet qui serait « désastreux » et une journée du 6 qui « prendrait une autre tournure ». Pour Elisabeth Borne, ça commence à ressembler à la réunion de tous les dangers.