France

François Fillon récuse toute « ingérence » russe devant les députés

« Pas d’ingérences » russes ni « un centime d’argent » reçu, et une carrière dans le privé qui « ne regarde que » lui. L’ancien Premier ministre François Fillon a été auditionné mardi à l’Assemblée sur ses liens avec Moscou et sa présence passée au sein de conseils d’administration de multinationales russes. L’ex-candidat de la droite à la présidentielle de 2017 s’est présenté devant la commission d’enquête initiée par le Rassemblement national (RN) et consacrée aux « ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères ».

François Fillon a d’abord évoqué ses « 36 ans de vie publique », comme député, ministre ou chef du gouvernement de 2007 à 2012. « Des ingérences étrangères, oui, j’en ai rencontrées, la plupart du temps, elles venaient d’un pays ami et allié qui s’appelait les Etats-Unis. J’ai été écouté avec le président Sarkozy pendant cinq ans par la NSA », l’Agence de sécurité nationale américaine, a-t-il affirmé. « Je n’ai pas été concerné directement par des ingérences russes », ajoute-t-il.

Vendre « des rillettes sur la place Rouge »

François Fillon a ensuite évoqué sa reconversion dans le privé et sa présence un temps au sein du conseil d’administration des entreprises russes Sibur (pétrochimie) et Zarubezhneft (hydrocarbures), avant qu’il ne démissionne après l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe. L’ex-chef de gouvernement a insisté sur le caractère privé de ses activités : « Je mène ma carrière professionnelle comme je l’entends, si j’ai envie de vendre des rillettes sur la place Rouge, je vendrai des rillettes sur la place Rouge. »

« Tout ça s’est passé à la fin de l’année 2021. J’ai assisté à un conseil de la société Zarubezhneft » et à un « conseil en visioconférence pour cause de Covid-19 de la société Sibur » avant « ma démission », « dès l’invasion de l’Ukraine », a-t-il déclaré. « Je n’ai jamais touché un centime d’argent venu de Russie dans toute ma vie politique et privée », a-t-il assuré, même si « j’aurais naturellement été rémunéré » si « j’avais continué » à siéger dans ces deux conseils d’administration.

L’entreprise Cifal en question

François Fillon a aussi été interrogé sur l’entreprise française Cifal opérant en Russie et visée par une enquête préliminaire du parquet national financier pour des soupçons de corruption d’agent public étranger. Selon une source proche du dossier, Cifal a été missionnée par la société congolaise Orion -dirigée par Lucien Ebata, conseiller spécial du président du Congo-Brazzaville Denis Sassou Nguesso- pour trouver en Russie un investisseur auquel vendre ses parts dans le gisement pétrolier MBK au Congo.

Dans cette optique, le dirigeant de Cifal Gilles Rémy a fait appel à François Fillon pour qu’il le mette en relation avec un homme d’affaires russe. Dans ce contrat, il a été rémunéré en qualité d’apporteur d’affaires. Aucun soupçon de corruption ne pèse actuellement sur lui, avait précisé cette source proche du dossier. « Je ne suis pas concerné par les enquêtes en cours, j’ai travaillé pour une entreprise qui, elle, est concernée par une enquête », a souligné l’ancien Premier ministre, qui a un « très grand respect pour Cifal et son dirigeant ».

L’invasion en Ukraine, « une catastrophe absolue »

Sur le plan géopolitique, « je me suis trompé sur un point, je le reconnais bien volontiers. J’étais convaincu que le président Poutine ne passerait pas à l’acte » en Ukraine, « une catastrophe absolue », a dit François Fillon. L’ancien Premier ministre et ex-député de la Sarthe faisait son retour au Palais Bourbon près d’un an après sa condamnation en appel dans l’affaire des emplois fictifs de sa femme Pénélope à quatre ans d’emprisonnement dont un an ferme, 375.000 euros d’amende et dix ans d’inéligibilité.

Le couple avait annoncé son intention de se pourvoir en cassation. La commission d’enquête sur les ingérences étrangères, présidée par le député RN Jean-Philippe Tanguy, a été lancée par le groupe de Marine Le Pen fin 2022 pour tenter de couper court aux accusations faisant du parti d’extrême droite un agent de l’influence russe en France. Les autres camps dénoncent une « diversion » du Rassemblement national.