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Des robots remplacés par les policiers ? Attention à cette fausse vidéo !

Avec l’accélération de l’Intelligence artificielle et des nouvelles technologies, chaque métier craint sa disparition. Combien de fois la question aura-t-elle été posée à un journaliste par exemple : « Mais tu n’as pas peur d’être remplacé par un robot toi ? ». D’autres professions en prennent aussi pour leur grade, par exemple les policiers.

Sur Facebook, une vidéo virale prétend que les policiers pourraient être « sacrifiés par les nouvelles technologies ». Sur la vidéo qui accompagne la publication, nous voyons un robot blanc armé de bras et de jambes qui semble être entraîné pour se battre… contre des manifestants par exemple ? Selon d’autres internautes, cela serait signe d’un futur contrôle total des machines contre les robots qui auraient de nouvelles compétences désormais en arts martiaux et en combat.

Or, ces robots qui seraient fabriqués par « Boston dynamics », n’ont jamais été conçus à destination de la police et encore moins pour se battre. 20 Minutes vous explique pourquoi.

FAKE OFF

Sur le compte TikTok de Boston Dynamics, nous retrouvons une trace de ce robot qui remplacerait potentiellement les policiers à l’avenir. Il s’agit d’« Atlas », un humanoïde fabriqué par Boston Dynamics, une entreprise américaine spécialisée dans la robotique.

D’après un article de Sciences et avenir, publié en février 2017, la machine serait capable de soulever de lourdes charges, mais également d’augmenter sa vitesse et effectuer des bonds… qu’importe le sol où il se trouve. L’article rappelait toutefois que la technologie peinait à être commercialisée.

Plus récemment, en janvier 2023, Boston Dynamics a communiqué sur l’utilité de son robot pour aider par exemple sur un chantier en construction. Sur la vidéo, on y voit « Atlas » porter habilement des charges pour apporter un sac à un ouvrier.

Pas de compte officiel sur TikTok

Si sur ses réseaux sociaux, l’entreprise Boston Dynamics est très active pour publier les dernières nouveautés de ses robots, tout porte à croire que la vidéo publiée sur TikTok en question ne vient pas réellement de l’entreprise. Sur son site, les communications de Boston Dynamics dirigent vers plusieurs réseaux (YouTube, LinkedIn, Instagram, Facebook et Twitter), mais pas de trace du réseau social chinois.

Qui plus est, le robot est bien plus rapide sur la vidéo en question que sur les images affichées par la marque. Et l’entreprise n’a jamais montré qu’« Atlas » savait se battre.

L’œuvre d’un motion designer

L’œuvre d’un motion designerétait publiée par un internaute, nommé Wayne Ryan Thompson.Sur le réseau social, la vidéooù le robot donne des coups de poing a par exemple été aimée près de 67.000 fois depuis sa publication fin mars. D’autres vidéos avec le même robot montrent d’autres fonctionnalités. Il serait par exemple capable de courir, de pivoter ou de se battre. Sauf que Wayne Ryan Thompson, d’après son portfolio, est un motion designer et photographe.

D’ailleurs un indice alerte les internautes. Sous les vidéos, on peut retrouver le hashtag « #3d », « cgi », ou encore « vfx ». Respectivement, il s’agit de l’animation en 3D, des effets spéciaux numériques [ou « computer-generated imagery en anglais] et des effets spéciaux cinématographiques créés grâce à des programmes informatiques d’animation et d’images de synthèse.

L’œuvre d’un motion designer

Contacté par « 20 Minutes », Wayne Thompson explique avoir eu l’idée de ces vidéos après avoir regardé la vidéo « Bosstown Dynamics » de Corridor Crew sur YouTube. « Je suis un grand fan », avoue-t-il. Avant d’ajouter : « Je m’en suis senti inspiré pour créer ma propre vidéo en utilisant uniquement mon iPhone et mon ordinateur ». S’armant de son téléphone pendant ses balades en forêt, Wayne Thompson a commencé par enregistrer des séquences en 4K. « Le mouvement de la caméra est ondulé car il permet au logiciel de suivi de mouvement de suivre proprement les points dans un espace 3D », nous explique le spécialiste.

Une fois chez lui, le motion designer importe les images sur son ordinateur et utilise plusieurs fonctionnalités notamment de suivi de mouvement et de gestion de son modèle. Sur Adobe Motion Capture, il peut par exemple choisir une position de combat. Travaillant ensuite sur l’éclairage, Wayne Thompson a pu animer son robot grâce à un autre logiciel, Octane Render. « J’ai étalonné à la fois l’animation et le métrage original, en essayant d’obtenir les correspondances de couleur et d’éclairage les plus proches. J’ai ajouté des effets de déformation de l’objectif et de saleté pour rendre l’animation plus naturelle, et enfin, j’ai exporté le fichier vidéo pour le télécharger », ajoute finalement l’expert.

« De nouveaux risques de préjudice et de graves problèmes éthiques »

En difficulté financière, Boston Dynamics qui appartenait à Google, puis à SoftBank, a finalement été racheté par Hyundai. En octobre 2022, l’entreprise de robotique s’est notamment engagée à ne pas soutenir la militarisation de leurs produits. Dans une lettre partagée avec d’autres industriels, publiés par le site Axios, Boston Dynamics expliquait : « Nous pensons que les robots mobiles avancés apporteront de grands avantages à la société en tant que collègues dans l’industrie et compagnons dans nos foyers ».

Les industriels ajoutent : « Nous pensons que l’ajout d’armes à des robots télécommandés ou autonomes, largement accessibles au public et capables de naviguer vers des endroits auparavant inaccessibles où les gens vivent et travaillent, soulève de nouveaux risques de préjudice et de graves problèmes éthiques. Les applications militarisées de ces robots nouvellement capables nuiront également à la confiance du public dans la technologie d’une manière qui nuira aux énormes avantages qu’ils apporteront à la société. Pour ces raisons, nous ne soutenons pas la militarisation de nos robots polyvalents à mobilité avancée ».

De là à retrouver « Atlas » dans les rangs de la police, nous avons donc encore un peu de marge.