France

Confinement, trois ans après : Les vacances se sont-elles mises au vert ?

Enfermés dans 20m², les vacances au soleil semblaient bien lointaines. A la sortie, c’était sûr, on allait partir, loin, longtemps. Et puis on s’est dit que ce confinement était aussi l’opportunité d’en finir avec le tourisme de masse, de ne plus galérer à poser sa serviette sur une plage surpeuplée. Et de partir un peu plus près aussi, puisque les frontières ont mis du temps à rouvrir. Pourtant, trois ans après, le trafic aérien français a retrouvé 90 % de son niveau de 2019.

Alors, a-t-on échoué à redéfinir nos vacances ? Après une « tendance réelle » à un tourisme de proximité en 2020 et 2021, « quand les frontières n’étaient pas forcément ouvertes », l’année 2022 a été marquée par un « regain des voyages à l’étranger », confirme Caroline Mignon, présidente de l’association Acteurs du Tourisme Durable. Mais la considération des vacances « comme temps de convivialité et d’authenticité est maintenue », explique-t-elle.

Montagne en mutation

Cécile Ferrando, directrice communication de Val d’Isère Tourisme, confirme le développement « d’une autre façon de consommer la montagne ». « Avant, les gens skiaient toute la journée, maintenant ils prennent le temps pour faire autre chose », dit-elle en notant une hausse de la demande « sur les raquettes, le ski de randonnée, la découverte de la faune et la flore » depuis 2021, quand les remontées mécaniques étaient fermées. Dans un secteur qui se sait menacé par le réchauffement climatique, « c’est positif », note-t-elle, tout en appuyant sur le fait que ces activités étaient déjà proposées avant.

D’ailleurs, la montagne, c’est aussi l’été. Une saison propice au développement de la « mode du camping, de l’aventure près de chez soi » pour une clientèle régionale, avec des touristes « plus itinérants dans un territoire donné, avec la possibilité d’aller en Italie » depuis Val d’Isère, vend Cécile Ferrando. Une mode appelée « slow tourisme », adoptée par Patrice et Marina. Le couple, âgé de 70 et 62 ans, qui a autrefois beaucoup voyagé, « ne prend plus l’avion depuis 2020 », et profite désormais « de notre belle Europe en voiture et camping ou gîte ».

Le train à la place de l’avion, pas si facile

Le mode de déplacement, premier facteur d’émission de gaz à effet de serre lorsqu’on part en vacances, revient avec insistance lorsqu’il s’agit de redéfinir nos manières de partir en voyage. Comme Célia, 28 ans, qui « a préféré le train pour passer une semaine de vacances dans le nord de l’Italie » et s’apprête à faire de même pour partir à Berlin, même si « c’est un peu plus long ». Le vrai point noir, selon elle, reste le prix : comptez « jusqu’à 450 euros pour un week-end ». « Une petite partie des voyageurs va être attentive » à la question du CO2, estime Caroline Mignon, mais « les gens s’arrangent avec », entre autres composantes au choix d’un lieu de villégiature.

« L’inflation, l’attention à la sécurité et la flexibilité des réservations » compte aussi, souligne-t-elle, avec une hausse des réservations de dernière minute dont la tendance se confirme. Les comportements ont aussi évolué dans d’autres pratiques. « A l’été 2020, les vacanciers cherchaient plus d’hébergements individuels pour éviter d’être en contact avec les autres », explique la présidente d’Acteurs du Tourisme Durable. Une attention au confort qui s’est ensuite confirmée. « Certaines personnes souhaitent rester plus longtemps, parfois même s’installer tout l’hiver, mettent leurs enfants à l’école », révèle Cécile Ferrando.

« Envie d’espace et de liberté »

Un phénomène socialement circonscrit, mais qui illustre une tendance à plus s’investir dans les vacances pour « s’enrichir » et donner du sens à son voyage. « Prendre du temps, rencontrer les habitants, rechercher un logement avec une cuisine bien équipée pour mieux manger peut aussi être assimilé à une forme de slow tourisme », note Caroline Mignon sur ces phénomènes en expansion. Reste que tout le monde n’a pas réagi au confinement en décidant de partir en vacances moins loin.

« L’enfermement du confinement nous a donné envie d’espace et de liberté », confie notre lectrice Virginie. Désormais, la quadragénaire, son mari et ses fils partent « à l’étranger et en club : pas de prise de tête, valise avec uniquement les vêtements ». « La situation nous a appris qu’il ne faut pas repousser », philosophe Frédéric, 48 ans. Sa famille, habituée aux petites vacances en France, s’est mise à économiser « pour s’offrir pour la première fois un vrai petit voyage, en Ecosse. Ça a été un déclic en fait ».

Benoît, lui, a « repris ses circuits tous les étés et attend la découverte de nouveaux pays ». « On n’est pas encore sur un tourisme écolo mainstream », reconnaît Caroline Mignon, qui veut mettre l’accent sur l’incitation à part des « tendances de consommation durable ». « Le virage est en cours mais on ne l’a pas pris aussi rapidement et franchement que souhaité », conclut-elle.