Belgique

Pierre-Yves Dermagne: « La première cible des régimes totalitaires, ce sont les syndicats »

Grand admirateur du révolutionnaire français Robespierre, Pierre-Yves Dermagne est de ceux qui voient les syndicats comme des remparts contre l’instabilité politique. La situation de presque guerre civile que connaissent nos voisins français à cause du débat sur les retraites ne pourraient se produire dans le royaume, notamment grâce à la présence des syndicats. La France a un taux de syndiqués nettement inférieur à la Belgique, environ 18,4 % contre plus de 50 %.

”Je suis convaincue du rôle essentiel dans nos démocraties de ce qu’on appelle les corps intermédiaires. Et les syndicats en font partie. Je parle autant des syndicats de travailleurs que des syndicats patronaux. Ce sont des structures qui permettent d’apporter des réponses car ils sont en première ligne, parfois simplement par rapport à notre complexité institutionnelle. Ils peuvent relayer des questions, canaliser des attentes et des frustrations, mettre des mots sur la colère, fixer des priorités dans le cadre d’une négociation et surtout, ils gèrent tout le contact avec les instances politiques. Quand on donne le temps à la concertation sociale, on participe de la concorde sociale et ça permet d’atténuer les tensions.”

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Dans ce cadre de réflexion, supprimer les syndicats, ce serait aller à rebours de l’histoire. Le ministre prend l’exemple de la syndicalisation à l’œuvre aux États-Unis, dans des multinationales comme Amazon. “Déconstruire ce modèle, chez nous, ça n’a pas de sens. On voit aujourd’hui que là où le dialogue social se passe bien, les conditions de travail sont meilleures. Il y a bien entendu des moments de tension parce que les intérêts ne sont pas toujours convergents. Mais c’est aussi grâce à l’implication des représentants syndicaux sur le terrain que l’on a un contexte moins tendu qu’ailleurs. On ne peut pas prétendre connaître les conditions de travail des Belges uniquement depuis un bureau situé à Bruxelles, rue de la Loi. On a besoin de représentants sur le terrain.”

Nous lui faisons remarquer que Georges-Louis Bouchez, président du MR, attaque cycliquement les syndicats belges. “Si on regarde dans l’histoire ceux qui se sont attaqués aux corps intermédiaires… Ils sont restés dans l’histoire pour de funestes raisons”, évacue le Rochefortois. On insiste. De qui parle-t-il ? “La première cible des régimes totalitaires, ce sont les syndicats. Dans toute l’histoire, les régimes totalitaires ont systématiquement affaibli et combattu les corps intermédiaires et en particulier les syndicats. Car les syndicats jouent aussi un rôle de contre-pouvoirs.”

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En chargeant les syndicats, le libéral ne viserait-il pas plutôt le PS, partenaire privilégié de la FGTB ? “On a un rapport historique avec la FGTB mais cette relation n’a pas toujours été un fleuve tranquille. Je n’ai par contre jamais entendu M. Bouchez critiquer les fédérations d’employeurs.”