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De retour au Brésil, Jair Bolsonaro pourra-t-il regagner le devant de la scène politique ?

Son arrivée marque la fin d’un exil volontaire de trois mois. Le 30 décembre dernier, l’ex-dirigeant brésilien s’était envolé vers la Floride, notamment pour ne pas avoir à participer, deux jours plus tard, à la cérémonie d’investiture de son successeur de gauche Luiz Inácio Lula da Silva, contre lequel il avait perdu d’une courte tête le scrutin d’octobre, avec 49,1 % des voix contre 50,9 %. Une défaite qu’il n’a jamais reconnue de manière officielle.

Il compte toujours peser en politique

Plutôt discret lors de ce trimestre passé dans une banlieue chic d’Orlando, Jair Bolsonaro se retrouve désormais sous le feu des projecteurs. S’il a d’abord tenté de minimiser ses ambitions politiques, assurant juste avant son vol qu’il n’entendait pas prendre la tête de l’opposition au gouvernement de Lula, l’ex-président d’extrême droite a pourtant plongé dans le bain une fois à Brasília.

Dès sa sortie de l’aéroport, il a ainsi pris la direction du siège du Parti libéral (PL), auquel il s’était affilié en 2021 et dont il a accepté d’être le président d’honneur. “Je suis revigoré et je veux que nous puissions mener notre pays vers ce que nous croyons être son destin”, a-t-il déclaré devant les dirigeants de la formation politique lors d’un discours transmis sur les réseaux sociaux. Et d’ajouter : “Ceux qui sont au pouvoir en ce moment, et pas pour longtemps, ne pourront pas faire ce qu’ils veulent de l’avenir de notre pays.”

Prochaine échéance pour l’ex-chef de l’État : les municipales de l’an prochain. S’il ne compte pas s’y présenter, Jair Bolsonaro entend cependant peser sur ce scrutin, vu comme une antichambre des législatives et de la présidentielle de 2026. Lors de son discours dans les locaux du PL, il a ainsi affirmé vouloir aider son mouvement et les partis conservateurs alliés à remporter 60 % des mairies. Pour cela, il devrait donc très bientôt enchaîner réunions et meetings à travers le Brésil pour appuyer de potentielles candidatures locales. Une mission qui lui permettra au passage de distiller ses critiques contre Lula, déjà en difficulté pour négocier avec un Congrès très conservateur, et dont la popularité plafonne après seulement trois mois au pouvoir.

Les ennuis s’accumulent pour Jair Bolsonaro

”Galvaniser les bolsonaristes”

”Détenteur d’un énorme capital électoral, il reste encore le principal nom de la droite” conservatrice, et “son projet de voyager à travers le pays indique une intention claire de galvaniser les bolsonaristes”, écrit à ce sujet le journal brésilien Folha de São Paulo. Dans son camp comme chez ses adversaires, certains voient aussi dans cette tournée politique une manière de commencer à préparer le terrain pour, peut-être, briguer un second mandat présidentiel.

Mais l’avenir politique de Jair Bolsonaro pourrait être compromis par les nombreuses enquêtes dont il fait l’objet et pour lesquelles il encourt des peines d’inéligibilité et de prison. Il sera d’ailleurs entendu dès le 5 avril par la police fédérale dans le cadre du scandale des “joyaux saoudiens”, qui a éclaté en mars dernier. Il est accusé d’avoir fait entrer au Brésil, du temps où il dirigeait le pays, des lots de bijoux d’une valeur de plus de 3 millions d’euros offerts par l’Arabie saoudite, pour les intégrer en toute illégalité à sa collection personnelle. De quoi s’exposer à des poursuites pour appropriation illégale de biens publics et fraude fiscale.

Outre cette affaire, il est également visé par six enquêtes de la Cour suprême, la plupart pour des délits présumés commis lors de sa présidence, et qui concernent notamment la diffusion de fausses informations sous son gouvernement, une possible ingérence auprès de la police fédérale pour protéger des proches soupçonnés de corruption, et une éventuelle incitation de ses partisans à participer aux émeutes du 8 janvier à Brasília.

La justice électorale a quant à elle ouvert seize enquêtes à son sujet, en particulier en raison de ses attaques constantes et sans preuves contre le système de vote électronique dont il n’a cessé de remettre en cause la fiabilité, avant et après les élections présidentielles. Autant de déboires judiciaires que Lula et ses alliés tenteront d’exploiter à leur profit.

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