High-tech

Comment les entreprises belges doivent faire face au phénomène ChatGPT

L’irruption d’un courant technologique tel que celui proposé par Open AI avec, notamment, son robot conversationnel ChatGPT, ouvert au public en mode test depuis le 30 novembre, n’arrive pas tous les jours. On le sait, les premiers à intégrer de nouvelles possibilités de développement sont ceux qui en profitent le plus. Dans les années 1980, l’ordinateur personnel s’est rapidement trouvé une place de choix dans les entreprises. Dans les années 1990, sa productivité a été dopée par l’ouverture au public et aux entreprises d’Internet, auparavant réservé à l’armée et aux universités.

Et aujourd’hui ? Selon les observateurs d’ARK, un fonds américain spécialisé dans la sélection d’entreprises disruptives, nous sommes actuellement au cœur d’une gigantesque vague d’innovations : séquençage génomique, solutions de stockage de l’énergie, technologie de la blockchain et, surtout, robotique et intelligence artificielle. Ces derniers vecteurs d’innovation ont été mis en lumière, ces dernières semaines, par l’agrégation de l’apprentissage de matières par un ordinateur, sa mise à disposition d’humains et la capacité à générer (le “G” de Generative Pre-trained Transformer) du contenu formulé sur simple demande. Une révolution ? À discuter, et les interlocuteurs ne manquent plus à ce propos aujourd’hui.

Une évolution impressionnante ? Certainement. En quelques semaines, on a vu naître un véritable écosystème basé sur l’offre commerciale de la start-up américaine Open AI, musclée financièrement par le géant des services informatiques Microsoft. À côté des clients d’Open AI, le plus gros utilisateur reste actuellement Microsoft, très actif. Au point de déclencher une vague de stress sans précédent parmi les concurrents du groupe américain.

ChatGPT, un diamant brut à tailler

Une stratégie bien établie et un nouveau marché

Microsoft a ouvert les portes d’un nouveau marché et la stratégie mise en place n’a rien d’une improvisation. Des présentations ont déjà eu lieu dans notre pays afin de sensibiliser les entreprises, petites et grandes, aux avantages mais aussi aux défis de l’intégration de ces nouveaux outils dont certains sont déjà intégrés ou en cours de déploiement dans les suites bureautiques et autres applicatifs de Microsoft. “On a commencé à intégrer ces outils à notre moteur de recherche, Bing !, dans sa nouvelle version, nous explique un responsable du groupe américain en Belgique. Ensuite, on est passé aux outils de la suite Office 365, d’abord sur invitation et maintenant de manière globale.”

À noter que Bing encourage fermement les testeurs à utiliser le navigateur Internet natif de Microsoft, Edge, très performant, afin d’attirer les utilisateurs d’autres navigateurs et d’autres moteurs de recherche, et en leur demandant de s’identifier.

Que doivent en penser travailleurs et entreprises ? L’entrepreneur espagnol Linus Ekenstam (https://linusekenstam.com/) qui s’exprime avec passion sur les réseaux sociaux à ce propos, résume assez bien la situation et les inquiétudes du public à ce propos. “L’intelligence artificielle ne va pas remplacer les humains, mais les humains assistés par l’intelligence artificielle vont remplacer les humains sans intelligence artificielle.”

Intégration d’urgence, gain de temps à la clé

Prenons quelques cas pratiques simples. Philippe V. dirige une petite agence immobilière. Il manque régulièrement d’inspiration lorsqu’il doit rédiger les annonces relatives aux biens à mettre en vente. “Il me suffit désormais de donner les informations succinctes sur les biens : prix, localisation, nombre de chambres, vue,… Puis, je demande simplement à ChatGPT – je suis bêta testeur – de rédiger l’annonce. C’est fait en quelques secondes. Je peux lui demander de la réduire au nombre de signes près en fonction des prix des annonces, puis une fois relue, je peux lui demander de la traduire en néerlandais et en anglais.” Un travail qui lui prenait auparavant près d’une demi-heure par bien et qui est désormais réalisé en quelques minutes à peine. Inutile de souligner que l’employé de Philippe aura du mal à justifier une demi-journée de travail pour la rédaction de quelques annonces… La concurrence devrait suivre, en toute logique. Et rapidement. Bien sûr, il y aura un coût, encore indistinct, pour assurer le fonctionnement de l’outil et les investissements en développement.

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Un outil et… un concurrent

Quel que soit l’outil bureautique utilisé, le robot conversationnel apporte un complément de créativité qui permet notamment d’accélérer les processus de rédaction. Et cela, face à une description de poste, la rédaction d’un post sur les réseaux sociaux, de courriers, même dans la recherche d’une formule choc ou d’un nom d’entreprise. L’imagination est actuellement la seule limite aux applications de cet outil ou de ses dérivés. Les développeurs d’applications l’ont bien compris. Ils utilisent déjà le chatbot pour produire du code à la demande et agrègent, ensuite, les morceaux de programmes pour en faire très rapidement un outil efficace. Les apps dopées à l’intelligence artificielle commencent à arriver par tombereaux sur les magasins d’applications.

Le Wall Street Journal citait, cette semaine, une étude de l’Université de Pennsylvanie qui a tenté d’évaluer les effets de l’utilisation des robots conversationnels de dernière génération sur le marché du travail. On peut y relever quelques projections intéressantes et/ou inquiétantes. Les quatre étudiants qui ont réalisé ce travail notent que la plupart des professions présentent une exposition aux effets de l’utilisation des outils génératifs, principalement les professions à salaires élevés dont les tâches sont très exposées. “Notre analyse indique qu’environ 19 % des emplois ont au moins 50 % de leurs tâches exposées aux LLM (NdlR : Large language models) lorsque l’on considère à la fois les capacités des modèles actuels et les tâches anticipées alimentées par les LLM”. L’étude est ponctuée par une note : “GPT-4 et ChatGPT ont été utilisés pour la rédaction, le codage et le formatage dans le cadre de ce projet”. C’est assez dire qu’il est urgent de s’approprier ces nouveaux outils.


Justice

L’actualité de ChatGPT, c’est aussi le lancement de plusieurs actions en justice un peu partout dans le monde. On reproche notamment à la start-up de collecter des données personnelles ou de négliger les droits sur les contenus exploités. L’actionnaire de référence de l’entreprise américaine OpenAI, Microsoft, a toutefois intégré cet outil ou certaines déclinaisons dans ses propres logiciels… Mais chez Microsoft, on assure que les paramètres éthiques, de confidentialité, sont respectés.