France

Pyrénées-Orientales : L’usage du catalan dans les conseils municipaux est-il légal ?

Le tribunal administratif de Montpellier doit rendre son délibéré, ce mardi, sur l’utilisation de la langue catalane dans les conseils municipaux de plusieurs communes des Pyrénées-Orientales. L’Etat, par l’intermédiaire de son représentant dans le département, poursuit les communes d’Elne, Port-Vendres, Amélie-les-bains, Tarerach et Saint-André qui ont, à tour de rôle, modifié les règlements intérieurs.

Le préfet Rodrigue Furcy s’appuie notamment sur « l’article 2 de la Constitution de la Ve République, qui dispose : que la langue de la République est le français. Aux termes de l’article 75-1 de la Constitution, les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France, mais elles n’ont pas un statut de langue officielle dans la vie publique. » Ou encore sur la loi Toubon de 1994, qui régit l’emploi de la langue française : « Langue de la République en vertu de la Constitution, la langue française est un élément fondamental de la personnalité et du patrimoine de la France. Elle est la langue de l’enseignement, du travail, des échanges et des services publics. »

« Les langues régionales n’ont pas un statut de langue officielle »

« Sur l’ensemble des délibérations, seule une petite partie est faite en catalan. Et elles sont traduites en français in extenso et immédiatement, précise le maire d’Elne, Nicolas Garcia (élu en 2020 à la tête d’une liste divers gauche), en première ligne dans ce combat. Si cela met en péril les fondements de la République française, comme ce qui est indiqué dans la requête, je crains beaucoup pour la République française. Nous sommes attachés aux valeurs républicaines françaises et aux valeurs républicaines de façon générale. Mais nous pensons que la République ne peut pas être linguicide et glottophobe. Elle a un avenir si elle tient compte de sa richesse culturelle et le voit comme un atout et non un handicap. »

Dans les Pyrénées-Orientales, le catalan est une langue très usitée, même si son usage est loin d’être aussi généralisé que dans la Catalogne du sud, de l’autre côté des Pyrénées. Le 18 avril, devant le tribunal administratif, trois figures du mouvement de l’indépendance Catalane (côté espagnol) ont apporté physiquement leur soutien aux édiles poursuivis par l’Etat français. Laura Borras, ex-présidente indépendantiste du parlement de Catalogne, mais aussi Oriol Junqueras, ancien vice-président du gouvernement de Catalogne. Il avait été emprisonné de 2017 à 2021 après les élections pour l’indépendance de la Catalogne. Et Lluis Puig i Gordi, ex-conseiller à la culture dans le gouvernement de Carles Puigdemont.

« Les langues régionales font partie du patrimoine national »

« Le Catalan est une langue régionale utile, une langue qui permet de s’épanouir. C’est la langue de nos pères et nous voulons que ce soit aussi la langue de nos enfants, pour des questions culturelles et d’épanouissement personnel, reprend Nicolas Garcia. Nous sommes plus près de Gérone et Barcelone que de Montpellier. C’est langue peut servir au travail, aux loisirs. Elne est la plus ancienne ville habitée du département. Nous avons un riche patrimoine que nous défendons à coups de centaines de milliers d’euros, avec des bâtiments historiques. Là, nous avons un patrimoine que l’on peut défendre avec peu d’argent, alors on ne s’en prive pas. Les langues régionales font partie du patrimoine national, c’est un atout de les avoir et non un handicap. »

A l’origine, seize communes du département avaient adopté ce changement de règlement intérieur. Un tiers d’entre elles ont finalement décidé d’aller jusqu’au bout de leurs choix. Malgré la menace de l’annulation de l’ensemble des décisions prises en catalan, soit depuis un an pour Elne, par exemple. Le rapporteur public a d’ailleurs suivi l’argumentaire de la préfecture et a conclu à l’annulation de l’ensemble des délibérations prises par les cinq municipalités visées. Il n’est pas rare que dans leurs délibérations, les juges suivent son avis.

« La position de l’Etat est schizophrène »

« La position de l’Etat est schizophrène, dénonce Nicolas Garcia. Il attaque un conseil municipal qui a le droit de délibérer en catalan à condition que les débats soient traduits en français. Mais dans même temps, l’Etat s’est engagé, à la même hauteur que le département et la région, dans l’office public de langue catalane dont l’objet et la diffusion du catalan dans l’espace public. Il vient aussi de s’engager dans une convention avec le département et l’office afin de donner les moyens aux enfants qui souhaitent apprendre le catalan. »

Réponse ce mardi.