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Pédocriminalité : Non, l’ONU ne suggère pas de dépénaliser les relations sexuelles avec des mineurs

Depuis quelques jours, sur les réseaux sociaux, les internautes pointent du doigt l’Organisation des nations unies (ONU), rien que ça. A l’origine de cette indignation, une publication particulièrement relayée. « Voici le Rapport de l’ONU. Il s’agit bien de dépénaliser la pédocriminalité pour légitimer le consentement des enfants, il prétexte que les mineurs ont des droits et donc s’ils souhaitent des relations sexuelles avec un adulte, c’est leur droit », a-t-il publié sur Twitter le 22 avril.

Plusieurs internautes affirment que l'ONU précaunise de dépénaliser la pédocriminalité.
Plusieurs internautes affirment que l’ONU précaunise de dépénaliser la pédocriminalité. – Capture d’écran

Un site qui se targue d’être « aujourd’hui le premier site d’information réellement catholique », Médias-Presse-Infos, a également publié un article sur le sujet en titrant : « L’ONU recommande de dépénaliser les relations sexuelles avec des mineurs ». De quoi alimenter la polémique qui circule également aux Etats-Unis.

FAKE OFF

Evidemment, l’Organisation des nations unies n’a jamais fait une telle suggestion. Les internautes qui ont partagé ce message y ont joint un document de la Commission internationale de juristes (CIJ). Il est « un nouvel ensemble de principes juridiques élaborés par des juristes pour une approche fondée sur les droits de l’homme des lois pénales interdisant les comportements liés au sexe, à la reproduction, à la consommation de drogues, au VIH, à l’itinérance et à la pauvreté », comme expliqué sur le site.

Cet ensemble forme les « Principes du 8 mars », le fruit d’un travail lancé en 2018 à la suite d’une première réunion d’experts de juristes par la CIJ, et en collaboration avec le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) et le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH). Donc ces recommandations sont bel et bien faites par des agences de l’ONU. En revanche, à aucun moment on ne peut lire dans ces « Principes du 8 mars » qu’il faudrait dépénaliser la pédocriminalité.

Le principe n° 16 de ce texte – qui se trouve à la page 22 du document –, concerne les « relations sexuelles consenties ». Il est avancé que les relations sexuelles consenties « ne peuvent en aucun cas être criminalisées », quel que soit le type d’activité sexuelle, le genre, l’orientation sexuelle ou le statut marital des personnes. « En ce qui concerne l’application du droit pénal, tout âge minimum légal de consentement doit être appliqué de façon non discriminatoire. L’application ne peut être liée au sexe/genre des personnes impliquées ou à l’âge de consentement au mariage », précise d’ailleurs le texte.

Une « grave déformation » du texte de la CIJ

Jusque-là, rien ne peut laisser place au doute. C’est la suite du texte que les internautes ont mal interprété. « En outre, les relations sexuelles impliquant des personnes n’ayant pas atteint l’âge minimum du consentement tel que défini par la loi d’un pays, peuvent être consenties dans les faits, sinon en droit. Dans ce contexte, l’application du droit pénal devrait refléter les droits et la capacité des personnes de moins de 18 ans de prendre des décisions concernant leur participation à des relations sexuelles consenties et leur droit d’être entendues sur des questions les concernant », est-il inscrit.

A la suite de l’explosion du scandale sur les réseaux sociaux, la Commission internationale de juristes (CIJ) s’est exprimée, avançant que « le contenu des Principes du 8 mars a été gravement déformé sur un certain nombre de réseaux sociaux et de sites Internet ». Avant de préciser : « Les Principes du 8 mars n’appellent pas à la dépénalisation des relations sexuelles avec des enfants, ni à l’abolition de l’âge minimum du consentement aux relations sexuelles prescrit par les Etats. La CIJ précise que les Etats ont une obligation claire en vertu du droit international de protéger les enfants de toute forme d’abus. »

Pour rappel, en France, l’âge légal du consentement sexuel est établi à 15 ans, et à 18 ans en cas d’inceste. Toutefois, à partir de 13 ans, les mineurs peuvent consentir si l’écart d’âge avec leur partenaire est inférieur à cinq ans.