France

Marlène Schiappa dans « Playboy » : « Elle m’a fait rougir en parlant de sexe »… Les dessous de l’interview

« On a été un peu étonnés qu’elle accepte, comme tout le monde », dévoile Jean-Christophe Florentin, le rédacteur en chef de Playboy à 20 Minutes. S’il y a bien une rencontre que personne n’attendait, c’est celle qui réunira Marlène Schiappa et le lapin emblématique en couverture du magazine connu pour ses photos de mannequins dénudées ce jeudi 6 avril dans de nombreux kiosques.

Après une rencontre avec la secrétaire d’État chargée de l’Économie sociale et solidaire et de la Vie associative mi-mars, un long entretien de douze pages illustré par quatre photos inédites paraîtra dans le prochain numéro de la revue.

Nous sommes au début du mois de janvier lorsque l’idée de proposer une rencontre à la membre du gouvernement germe dans la tête du journaliste. Il envisage sa demande comme « une bouteille à la mer », lancée sans grand espoir qu’elle revienne un jour.  « Par chance, elle a été cueillie », se réjouit-il encore plus de trois mois après. S’il pensait avoir vu en Marlène Schiappa « la plus Playboy compatible des ministres et du personnel politique ». « Elle est courageuse, elle a une voix qui porte, elle a des convictions féministes et en plus elle est jolie ! » Il n’imaginait pas que cette idée vaudrait au magazine un coup de projecteur sans précédent.

« Certaines poses ont été refusées »

« J’ai téléphoné à son équipe de communication, puis j’ai envoyé un mail. J’ai reçu une réponse rapide qui me disait : « Pourquoi pas sur le principe, il faut affiner. » On a affiné et puis on est arrivés au résultat qui sortira jeudi », rembobine Jean-Christophe Florentin, veillant à garder un maximum de suspense pour que cet entretien booste les ventes de Playboy.

Fruit de « l’enthousiasme » de Marlène Schiappa et d’une étroite concertation entre ses équipes et celles d’un magazine, la rencontre s’est déroulée mi-mars, dans un studio de photographie parisien. Si la secrétaire d’Etat n’a pas demandé un droit de regard préalable sur les questions ou sur l’interview a posteriori, elle est plus intriguée par le volet photographique. Il faut dire que le magazine est connu pour ses photos dénudées publiées généralement jusque sur sa couverture.

« Elle voulait voir les tenues qu’elle porterait, détaille le rédacteur en chef. On a fait ce qu’on appelle un « moodboard » pour définir une ambiance et des poses. Certaines ont été refusées, d’autres acceptées. »

Un rencontre « reportée deux fois »

Les rencontres se succèdent et Jean-Christophe Florentin rencontre d’abord le conseiller en communication de celle qui fait partie du gouvernement depuis le premier mandat d’Emmanuel Macron, en 2017. « La séance photo a ensuite été reportée deux fois pour des raisons d’emploi du temps », indique-t-il. L’agenda de Marlène Schiappa lui permet finalement de concrétiser cette rencontre au milieu du mois de mars.

Plus qu’un entretien, le journaliste évoque une « discussion à bâtons rompus ». « Elle n’a mis son véto sur aucune thématique, n’a éludé aucune question. On parle de tout avec elle… De féminisme, de pouvoir, de séduction. Elle est même arrivée à me faire rougir en parlant de sexe », s’amuse-t-il. De son côté, la secrétaire d’État n’a jamais semblé éprouver la moindre gêne, si l’on en croit son interlocuteur.

Le rédacteur en chef précise que cette interview s’adresse aux lecteurs de Playboy, hommes comme femme tout en précisant que Playboy ne veut plus être un magazine 100 % masculin. « C’est devenu un mook un peu intello. C’est comme ça que certains nous qualifient, insiste-t-il. On a aussi des lectrices ! »

« Hasard de calendrier »

Dans le plus grand secret, les équipes du magazine peaufinent texte et photos avec pour horizon le début du mois d’avril. « J’attendais d’avoir quelque chose à dire et qui ai du sens par rapport à la date de sortie du magazine sans m’y prendre trop tôt pour dévoiler cette interview », raconte Jean-Christophe Florentin.

Sauf que Le Parisien détient déjà l’information. Lorsqu’il est contacté pour en parler le vendredi 31 mars, le journaliste préfère ne pas réagir. « On devait commencer à communiquer mardi, c’était trop tôt », rembobine-t-il. Cette fuite, vue par certains comme un canular du premier avril en avance, plonge Playboy dans un tourbillon médiatique dont « personne ne s’attendait ». « On se doutait que cela générerait des réactions, mais je ne pensais pas que ça prendrait une telle ampleur. On imaginait peut-être 10 % de ce qu’il se passe en ce moment », rit-il.

Tout le week-end, il assiste à « une petite affaire d’État ». Alors qui ne s’est pas encore exprimé publiquement au sujet de sa rencontre avec Marlène Schiappa, journalistes et politiques commentent l’initiative de la secrétaire d’État, dont la parution intervient juste après l’interview d’Emmanuel Macron dans Pif Gadget. « Je n’étais pas du tout au courant que l’interview tomberait juste après celle de Pif Gadget », martèle Jean-Christophe Florentin, se défendant de participer à un quelconque plan de communication gouvernemental. « On peut rester naïf et penser que c’est un hasard de calendrier. »

Élisabeth Borne, « meilleure attachée de presse de Playboy »

Un hasard qui n’a visiblement pas plu à la Première ministre Élisabeth Borne. Elle se serait entretenue avec Marlène Schiappa au lendemain de la révélation de cette interview, lui indiquant qu’elle n’était « pas du tout appropriée, à plus forte raison dans la période actuelle ». Au-delà du vif débat autour de la réforme de l’âge de départ à la retraite, l’ex ministre déléguée à la Citoyenneté est soupçonnée de « l’utilisation douteuse des subventions » et « l’absence de contrôle » du fonds contre le séparatisme, qu’elle a créé à la suite de l’assassinat de Samuel Paty, en 2020. Pour autant, le rédacteur en chef de Playboy estime qu’« Élisabeth Borne a été la meilleure attachée presse du magazine ».

Pour faire taire ses détracteurs, Marlène Schiappa s’est défendue sur Twitter, rappelant qu’« en France, les femmes sont libres. N’en déplaise aux rétrogrades et aux hypocrites ».

Face aux critiques, la rédaction de Playboy plaide la méconnaissance de son changement de ligne, trois ans plus tôt. « Je pense que les neuf dixièmes de ceux qui exercent des critiques sont restés scotchés à l’image que le magazine pouvait avoir. Ça a complètement changé on ne peut que les inviter d’aller voir de quoi ils parlent et là ils fermeraient leur tronche. Ça me fait de la peine car on vaut mieux que ça mais il faut le faire savoir. C’est long ! » Pour autant, les deux derniers numéros de 2022 affichaient toujours une jeune femme dénudée en couverture, « une question d’ADN », selon le rédacteur en chef.

En attendant la publication du nouveau numéro du magazine, le pilote de la rédaction cadenasse ce qui concerne le contenu, en bon promoteur de sa rédaction. Quant à l’invité sa prochaine interview… « Je ne sais pas encore… Peut-être Élisabeth Borne, rires. On n’a pas encore initié le contact mais qui va piano va sano ! »