France

Les capteurs de glycémie dédiés aux diabétiques détournés par des influenceuses pour mincir

Un patch rond, collé derrière le bras : c’est le nouvel accessoire des influenceuses « beauté » et « bien-être ». Le capteur de glycémie, un outil « révolutionnaire » qui peut sauver la vie des personnes diabétiques, est aussi très prisé pour contrôler sa prise de poids, une tendance critiquée par le monde médical.

Sur TikTok ou Instagram, sur la plage, au yoga ou en cuisine, elles sont de plus en plus nombreuses à en faire la promotion : le capteur de glucose leur permet de « voir leur glycémie en temps réel » et ainsi de « comprendre quels aliments éviter », assurent ces jeunes femmes.

Un appareil pas plus gros qu’une pièce de deux euros

Leur idole ? Jessie Inchauspé, alias@glucosegoddess (déesse du glucose) dont le livre best-seller « Glucose révolution » sorti l’été dernier prône la maîtrise des effets du sucre pour moins les subir… et mincir. Pour mieux comprendre son métabolisme, cette biochimiste de formation s’est équipée d’un capteur de glycémie.

Un appareil pas plus gros qu’une pièce de deux euros dont le résultat se lit simplement en passant un smartphone devant le capteur. Contrairement aux autres appareils de mesure, le capteur permet aussi d’anticiper une crise d’hypo ou d’hyperglycémie. En vente libre, le capteur le plus commercialisé en France, le Freestyle Libre 2 du laboratoire Abbott, n’est remboursé que pour les diabétiques qui ont plusieurs injections d’insuline par jour.

« Une tendance ridicule »

La diététicienne américaine Christine Byrne s’interroge sur l’utilité même des capteurs pour des personnes non-diabétiques : « Votre corps est capable de restreindre le sucre dans le sang à un niveau sain ». Elle préconise des « repas équilibrés » plutôt qu’une surveillance permanente de glycémie, qui dépend aussi « de votre stress, vos activités et votre sommeil ».

C’est aussi l’avis de Karine Clément, spécialiste de l’obésité à l’Inserm, qui craint, chez des personnes non accompagnées par un médecin, « un risque de sur-interprétation ou de sous-interprétation des résultats » menant à « des changements de comportement alimentaire par exemple, inadaptés ».

Sur Twitter, des internautes diabétiques dénoncent quant à eux une « tendance ridicule » : « S’il s’agissait de se piquer le bout du doigt six fois par jour, l’auraient-ils fait ? Arrêtez de vous créer des problèmes que vous n’avez pas ».

Détourné comme l’Ozempic

Les pharmaciens avaient déjà constaté un « mésusage » avec l’Ozempic, un antidiabétique injectable que tentent de se procurer des non-diabétiques pour mincir. De fausses ordonnances avec les deux produits ont d’ailleurs été saisies, a indiqué le Pr Jean-Luc Faillie, en charge de la pharmacovigilance d’Ozempic.

Contrairement à l’Ozempic, les capteurs de glycémie sont en vente libre, notamment sur Internet. Mais une fausse ordonnance permet de se faire rembourser indûment, et d’économiser ainsi une centaine d’euros par mois… Une « fraude à l’assurance maladie » qu’Abbott assure condamner « sans réserve », et dont l’ANSM (agence du médicament) s’est saisie, indiquant qu’elle menait « des investigations » à ce sujet.