France

Grenoble : En quoi la Convention citoyenne pour le climat sera différente de celle engagée par le gouvernement

Elles n’ont pas encore été soumises au vote mais sont en quelque sorte « déjà adoptées ». Ce vendredi, les 219 propositions formulées par une centaine d’habitants tirés au sort pour la Convention citoyenne pour le climat seront examinées par les élus du conseil métropolitain de Grenoble. Une première d’un point de vue local. « On s’est engagé à faire passer l’ensemble du projet », affirme Pascal Clouaire, vice-président de la métropole. Une méthode, « complètement à l’opposé » de celle de l’Etat, pique-t-il.

En 2021, seules 10 % des 149 résolutions émises pour cette « expérience démocratique inédite en France », ont été reprises en 2021 par le gouvernement, comme l’analysait Reporterre. Deux ans plus tôt, Emmanuel Macron affirmait pourtant que, « ce qui sortirait de cette Convention serait soumis sans filtre soit au vote du Parlement, soit à référendum, soit à application réglementaire directe ». Comment s’assurer que ce scénario ne se reproduira pas dans la capitale des Alpes ? 20 Minutes fait le point.

Des garanties des élus

En 2021, quand la métropole grenobloise a lancé l’idée d’une convention sur le sujet du climat, l’une des premières conditions était qu’elle ne l’organiserait pas elle-même. Pour ça, un « comité opérationnel », un organe indépendant de dix personnes, s’est créé pour diriger les travaux des participants. Pendant dix mois, à raison de trois heures par semaine, le groupe s’est réuni bénévolement pour s’assurer du bon déroulement du projet.

« Notre crainte principale était d’être rangé dans un tiroir une fois que les recommandations étaient faites, explique Sabine Lavorel, coprésidente de ce comité. Il nous fallait des garanties au-delà des promesses. Les élus se sont alors engagés. Si jamais ils n’arrivent pas à s’entendre sur des propositions lors du conseil, une votation citoyenne se mettra en place. »

Un panel « vraiment » représentatif de la société

Le projet grenoblois se distingue également sur son panel. Les cent participants étaient « représentatifs de l’ensemble des habitants des 49 communes de la métropole », précise Sabine Lavorel. « Au-delà des critères de sexe, des catégories socioprofessionnelles, de diplômes ou d’âge, on a imposé une condition de sensibilité à la protection de l’environnement, développe-t-elle. On a suivi l’étude qui montre que le changement climatique est l’une des trois priorités pour environ 20 % des Français. Ce qui signifie que 80 % des personnes sélectionnées ne se sentaient pas concernées par ces questions au début au lancement. On voulait à tout prix éviter qu’on discrédite le travail entrepris en sous-entendant qu’on était tous des bobos écolos de gauche. »

Une fois tirée au sort, la centaine de citoyens devait répondre à deux questions : Quelles recommandations feriez-vous à la métropole pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 ? Et pour atteindre la neutralité d’ici 2050 dans un contexte d’urgence climatique ? « Là aussi, on fait la différence, insiste l’enseignante-chercheuse. La question à laquelle les 150 citoyens de la Convention nationale devaient répondre était difficilement compréhensible. »

L’accent a été mis sur les changements qui paraissaient « acceptables et prioritaires pour toutes et tous pour lutter contre le changement climatique », précise la coprésidente du groupe. La mobilité était d’après elle, « la préoccupation centrale », car dans beaucoup de communes, les transports ne pallient pas le besoin d’un (ou plusieurs) véhicule personnel. D’où l’importance de ne pas avoir « des convaincus », insiste-t-elle.

Un projet qui repose sur « l’implication des citoyens »

Pour Pascal Clouaire, ce sont exactement ces paramètres qui permettent « la réussite » d’un tel projet. « On ne peut pas faire de transition écologique sans intelligence collective. Et pour y arriver, il faut l’implication des citoyens. Notre volonté était de faire travailler les gens ensemble et de leur montrer qu’ils pouvaient nous faire confiance », s’exclame le vice-président de la métropole.

Il ajoute : « 60 % des recommandations sont des mesures qui sont déjà mises en place par la métropole mais qui doivent être intensifié pour rentrer dans les délais. Les choix à faire se traduiront avec un budget. Pour aller plus loin, notre prochain défi est de faire travailler ensemble les 49 communes, dans une logique de solidarité. Mais ça, c’est l’histoire de Grenoble. »

Grenoble, pionnière sur le climat et la participation citoyenne

Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si cette expérimentation s’est faite sur le territoire, selon l’élu. « Les questions qui touchent le climat, de la même manière que la participation citoyenne et donc la convention climat font partie de notre culture. Et le changement climatique s’opère deux fois plus vite ici qu’ailleurs », constate l’élu.

Dans ce sens, la métropole s’inscrit comme « pionnière » dans le domaine. « On a pris le pas depuis longtemps, observe Pascal Clouaire. Mais on ne réfléchit pas les choses pour être les premiers. On le fait parce qu’il est nécessaire de le faire. Montrer l’exemple, ce n’est pas simplement afficher des ambitions, c’est démontrer que la réalité suit nos engagements concrètement. »

« Les responsabilités politiques locales sont plus faciles à tenir qu’à un niveau national », pointe l’enseignante-chercheuse qui espère que cette convention aura un impact sur le futur.