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Asie : Pourquoi les navires de guerre chinois rôdent-il autour de Taïwan ?

La poudre est bien là, à défaut que quelqu’un y mette le feu. Pour le deuxième jour consécutif, trois navires de guerre chinois ont sillonné les eaux autour de Taïwan. Une réaction de Pékin à la rencontre mercredi en Californie entre Tsai Ing-wen, la présidente de Taïwan, et Kevin McCarthy, le président de la Chambre américaine des représentants, au nom de la politique « d’une seule Chine ».

Que dit cette doctrine ? L’activité militaire chinoise peut-elle faire craindre une guerre ? Que disent Pékin, Taipei et Washington au milieu de cette crise ? 20 Minutes fait le point pour vous.

Qu’est-ce que la politique d’« une seule Chine » ?

Séparées depuis 1949 et la victoire communiste contre le gouvernement nationaliste, Taïwan et la Chine continentale revendiquent chacune la souveraineté sur le territoire de l’autre. La majorité des pays de l’Ouest ne reconnaissent d’abord que Taïwan, jusqu’à ce que Pékin ne prenne le siège chinois à l’ONU le 25 octobre 1971. Aujourd’hui, seuls 13 pays conservent des relations diplomatiques officielles avec Taïwan, même si le pays a en réalité de nombreux alliés… à condition de ne pas trop vexer la Chine.

Car pour Pékin, hors de question qu’un pays puisse reconnaître les deux gouvernements. Il faut choisir entre traiter avec Taipei et commercer avec Pékin : c’est le principe « d’une seule Chine ». « Taïwan est une partie inséparable de la Chine », a répété ce vendredi le gouvernement communiste. « L’avenir de Taïwan réside dans la réunification avec la mère patrie », a indiqué la porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Mao Ning, lors d’un point de presse.

La menace militaire chinoise est-elle crédible ?

La zone est particulièrement surveillée des deux côtés, l’île craignant toujours une invasion chinoise. Mercredi, peu avant la rencontre entre la présidente taïwanaise et le représentant américain, le porte-avions chinois Shandong avait traversé les eaux au sud-est de Taïwan en route vers le Pacifique occidental. Jeudi, trois navires de guerre et un hélicoptère anti-sous-marin chinois ont été détectés par Taïwan dans sa zone d’identification de défense aérienne, au large des eaux territoriales. Le bilan est le même ce vendredi, un avion de combat en plus.

Le scénario d’une invasion a plusieurs fois été évoqué depuis le début de la guerre en Ukraine, le plus fort des tensions culminant en août 2022, quand Nancy Pelosi s’était rendue sur l’île. En hommes et en équipements, la Chine est bien supérieure à Taïwan. Mais cette dernière bénéficie d’alliés solides dans la région, et des militaires américains se trouvent sur l’île pour y former l’armée taïwanaise. Kevin McCarthy a d’ailleurs appelé, lors de sa rencontre avec Tsai Ing-wen, à « continuer les ventes d’armes à Taïwan », « meilleur moyen » d’empêcher une invasion chinoise.

Quelles sont les déclarations de chaque côté ?

« La souveraineté et l’intégrité territoriale de la Chine ne seront jamais divisées », a encore dit Mao Ning à propos de la place de Taïwan dans la Chine. Vendredi, la Chine a imposé des sanctions à l’émissaire de Taipei aux Etats-Unis, Hsiao Bi-khim, lui interdisant d’entrer en Chine et l’accusant d’avoir « délibérément incité à la confrontation entre les deux rives du détroit ». Le ministère chinois des Affaires étrangères a également annoncé des sanctions à l’encontre de l’Institut Hudson, un groupe de réflexion conservateur basé à Washington, ainsi que de la bibliothèque présidentielle Ronald Reagan, où s’est tenu l’entretien Tsai-McCarthy, pour avoir « fourni une plateforme et facilité l’engagement de Tsai Ing-wen dans des activités de « séparatisme taïwanais » aux Etats-Unis ».

Taïwan a condamné ces sanctions, estimant que Pékin tentait de « restreindre encore plus la place internationale de notre pays ». « La coercition et la répression ne changeront rien aux faits objectifs, mais ne feront que renforcer la conviction de notre gouvernement à défendre la liberté et la démocratie », a déclaré le ministère taïwanais des Affaires étrangères dans un communiqué. Avant de quitter Los Angeles jeudi, Tsai Ing-wen a dit « espérer » que la Chine saurait « faire preuve de retenue et ne réagirait pas de manière excessive ». Pékin doit choisir la voie de la « diplomatie » et non celle des « pressions » sur Taïwan, a de son côté exhorté jeudi Vedant Patel, porte-parole du département d’Etat américain.