Belgique

Un baby-sitter qui se présente comme “l’ami des enfants” a violé une dizaine de mineurs d’âge: « Je ne me rendais pas compte que je faisais du mal »

Entouré de deux policiers et accompagné de deux avocats, le jeune homme à la silhouette frêle semble déconnecté, absent, comme si l’audience en cours ne le concernait pas vraiment. Il est pourtant accusé d’avoir abusé sexuellement d’une dizaine d’enfants. Les préventions sont lourdes : attouchements, viol, détention et publication d’images à caractère pornographique.

Selon les témoignages entendus, Luc aurait notamment massé les parties intimes d’un enfant, il se serait masturbé devant plusieurs autres, il aurait demandé une fellation, il aurait consommé du cannabis avec un des ados avant d’avoir des rapports. Il aurait également inséré un objet dans l’anus d’un des enfants avant de lui demander de le mettre en bouche, et photographié un autre enfant, lui demandant de poser nu et à quatre pattes.

Les victimes étaient âgées de 7 à 15 ans aux moments des faits. Tout s’est arrêté lorsque la maman d’un des petits a suspecté une attitude et un comportement suspects de la part du baby-sitter.

Des “fantasmes”

La défense de Luc tente, non pas de justifier les faits – “injustifiables” – mais de recontextualiser les choses. D’expliquer pourquoi Luc aurait agi ainsi. D’abord en rappelant que le baby-sitter aurait lui-même été victime d’abus sexuels lorsqu’il était enfant. Ensuite en racontant que ce qui lui est reproché ne serait pas véritablement de sa faute. Le jeune homme explique en effet avoir “profité d’une situation favorisée par les enfants eux-mêmes”. Ce qui ne va pas aider Luc, lui qui a quelques “fantasmes” lorsqu’il pense à des enfants. Enfin en s’interrogeant sur le rôle des parents, leur reprochant, même involontairement, d’avoir influencé les dires des enfants en posant des questions “trop orientées” sur ce qui s’est passé. Ce qui aurait pu influencer le discernement des enfants, supposent donc les conseils de Luc.

Des explications qui font bondir les avocats des parents. “Osons dire le mot : il s’agit ici de pédophilie, entame l’un des conseils. Que Monsieur ose dire qu’il a profité d’une situation favorisée par les enfants est inadmissible. Ce sont des enfants, lui est l’adulte responsable. Et il a abusé de sa position d’autorité.”

Et une autre avocate de poursuivre : “Nous avons entendu le prévenu utiliser l’argument selon lequel il a subi des abus lorsqu’il était enfant. Il en parle comme d’une circonstance atténuante, mais c’est l’inverse. Il sait ce que c’est de subir ces choses et il les a malgré tout fait subir à d’autres enfants. Le prévenu a invité des enfants à avoir des relations sexuelles avec lui, il a reconnu avoir utilisé une application de rencontre avec un de ces jeunes, des échanges plus qu’explicites ont été retrouvés avec, notamment, des photos de son sexe. Le prévenu a offert un jouet sexuel en forme de Pikachu à un enfant. Quand un enfant était dans son bain, il a mis ses mains dans l’eau pour lui toucher les parties intimes”, énumère l’avocate. “Bref, on est face à un individu qui sexualise toute situation.”

L’avocate des parents conclura sa plaidoirie, d’un ton colérique, en expliquant être face à un individu qui n’a que très peu d’égard pour les victimes. “Monsieur ne parle que de lui, lui, et encore lui. Il se définit comme l’ami des enfants. C’est un pédocriminel.”

”Comme si j’étais au-dessus des lois”

Avant de prendre l’affaire en délibéré, le président demande au prévenu s’il souhaite s’exprimer une dernière fois. Luc se lève. “J’aimerai bien vous convaincre que j’ai compris, et que plus jamais je ne vais recommencer, entame-t-il. Je me sentais dans une certaine impunité vis-à-vis de la justice, comme si j’étais au-dessus des lois. Avec le recul, je me rends compte que je n’étais pas heureux avec les enfants. Je souffrais et je les ai fait souffrir. Je ne me rendais pas compte que je faisais du mal. » Il s’arrête un instant. Puis se tourne vers les parents pour présenter ses excuses. Le président lui somme de ne pas regarder les parties civiles, qui ne peuvent retenir leurs larmes.

Les avocats de Luc ont plaidé un sursis probatoire. Le ministère public a requis une peine de 12 ans, et 10 ans de mise à disposition du Tribunal d’application des peines.

Jugement le 16 mai.