Belgique

Jan Jambon: « Il faut sortir du modèle fédéral »

L’événement est important, puisque c’est la troisième fois seulement depuis que le parti existe (en 2001, NdlR) que nous organisons un grand congrès où nos membres s’exprimeront sur 100 propositions qui formeront la base de notre programme pour les élections de 2024. Une mise à jour s’imposait depuis notre congrès sur le confédéralisme, même si ces textes restent évidemment toujours d’actualité.

Un texte final sera soumis au vote des membres. Sur quoi portera-t-il ?

De nombreux sujets ont été abordés, discutés, amendés depuis plusieurs mois. Le texte final devrait être voté dimanche. Il constituera le socle de ce que nous allons proposer aux électeurs. Il s’agit d’une mise à jour de notre programme à la lumière des défis à relever aujourd’hui et demain. Ce sera surtout une modernisation. Il n’y aura pas de changements radicaux par rapport à l’idéologie de la N-VA.

Mais que contient ce “Canon flamand” autant décrié qu’attendu ?

Vous gardez donc le confédéralisme à l’agenda. Le modèle fédéral est donc périmé ?

Il faut sortir du modèle fédéral. Il ne fonctionne plus. Je vais illustrer cela par trois exemples. Un : l’organisation des soins de santé. Le fédéral s’occupe de soins curatifs et les Communautés, de prévention. Mais la frontière entre les deux n’est pas toujours facile à établir. De plus, le système n’encourage pas les Communautés à investir dans la prévention. En effet, une prévention efficace a surtout des retombées positives pour le Fédéral puisqu’elle réduit les dépenses de soins curatifs. Deuxième exemple : le marché du travail. Les différences nord-sud sont immenses. Le taux d’emploi en Flandre frise les 80 %, en Wallonie il est de 65 %. En Flandre, le taux d’emploi dans le secteur public ne dépasse pas les 25 %, en Wallonie il est de 60 %. Comment voulez-vous mettre en œuvre une politique qui doit tenir compte de deux réalités si différentes ? Qu’est-ce qui nous empêche d’opter pour une politique de l’emploi gérée par les Régions elles-mêmes ? Trois : la loi de financement. Le débat sur une baisse de l’impôt sur les personnes physiques est à nouveau d’actualité. Nous y sommes favorables mais cela va avoir une implication sur les caisses des Régions… Est-ce logique ?

D’autres partis proposent de refédéraliser certaines compétences, qu’en pensez-vous ?

Nous ne pensons pas que le transfert de quelques compétences dans ce sens-là soit la solution idéale. Elles avaient justement été transférées du niveau fédéral au niveau régional parce que cela ne fonctionnait pas au niveau fédéral. Prenez encore les soins de santé. La Flandre, par exemple, est beaucoup plus axée sur les soins de santé de première ligne (soins primaires) que la Wallonie. Les différences sont trop grandes entre le nord et le sud du pays, elles exigent des politiques différenciées. C’est un constat, pas un jugement. Que faisons-nous aujourd’hui ? On impose un peu de politique de la Flandre à la Wallonie et un peu de la politique de la Wallonie à la Flandre. Pourquoi ne pas laisser le choix à chaque Région de gérer ses propres affaires comme elle l’entend ?

Après les élections de 2024, votre parti est-il prêt une fois de plus à négocier avec le PS en vue de mettre sur les rails un gouvernement fédéral ?

Le seul accord que nous pourrions négocier avec le PS est un accord qui vise à enclencher une réforme confédérale. Au niveau socio-économique, je ne pense pas que l’on puisse conclure beaucoup d’accords avec le PS. Mais attendons d’abord le résultat des élections. À quoi ressemblera le paysage politique après le scrutin dans un an ? Je pense qu’il va y avoir des changements, oui…

En Flandre, la participation des politiques à des émissions de téléréalité se banalise

Pensez-vous qu’il faille négocier avec le Vlaams Belang ? Ce parti monte dans les sondages, pourrait-il être un jour “fréquentable” ? À ce sujet, au sein de votre parti, les avis sont partagés…

Nous ne pourrions pas entamer des négociations avec le Vlaams Belang tel qu’il se présente aujourd’hui. Il y a au sein de ce parti des personnes avec lesquelles je refuse d’être identifié. Leur programme portant sur la politique migratoire n’est pas notre programme. La façon dont ils se comportent ne nous correspond pas. Mais j’ai des doutes quant à la volonté du Vlaams Belang de prendre les rênes du pouvoir.

Vous briguez un nouveau mandat de ministre-président flamand ?

Je ne sais pas. Ce que je sais, c’est que le nationalisme flamand fait partie de mon ADN. Quoi de plus beau que de pouvoir servir en tant que ministre-président la nation que l’on aime ? Mais je reste à la disposition de mon parti, sincèrement. J’ai envie de poursuivre. Mais si ce n’est pas le cas, alors on verra bien.

Vous n’excluez pas un retour au fédéral ?

Oh oui. Si le parti en décide ainsi, pourquoi pas ? J’ai aimé ce job, les défis étaient immenses. Mais en tant que ministre de l’Intérieur, l’idéal c’est de faire deux législatures, une seule me paraît trop court. J’ai conservé de bons contacts avec des collègues francophones (et germanophones) tels que Charles Michel, Didier Reynders, Elio Di Rupo, Pierre-Yves Jeholet, Olivier Paasch…