David Clarinval (MR) : « Au sein du gouvernement De Croo, ce sont les écolos qui sont les plus influencés par les lobbies »

Il faut dire les choses : dans le dossier nucléaire, il y a eu un rapport de force depuis le début. Quand j’ai obtenu, lors des négociations de l’accord de gouvernement, que l’on prenne en compte la possibilité d’une prolongation de réacteurs, on m’a pris pour un rigolo. On a accepté ce plan B. Mais personne n’y croyait. Je me sentais très seul. Et puis les choses ont évolué. En raison des évènements en Ukraine, il a été établi que la sortie du nucléaire et la construction de centrales au gaz allaient nous rendre dépendants de la puissance russe et d’autres puissances exportatrices. Il a fallu, à nouveau, batailler avec les écologistes pour passer à la mise en œuvre du plan B.

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Ne faut-il pas distinguer Groen d’Écolo ?

En effet. Groen et sa ministre de l’Énergie, Tinne Van der Straeten, ont été plus pragmatiques. Les verts flamands ont accepté plus rapidement le changement et ont mis en œuvre loyalement l’accord. Écolo a ferraillé jusqu’au bout pour empêcher les choses…

Alexander De Croo a évoqué son souhait d’une prolongation de 20 ans des réacteurs, et pas seulement de 10 ans. Le MR est d’accord ?

On doit aller beaucoup plus loin. Vingt ans de prolongation, c’est un premier pas. Et il faudra prolonger d’autres réacteurs en plus. Et il faut permettre le développement de nouveaux réacteurs, et surtout des SMR (Small Modular Reactor, de petits réacteurs de très haute technologie). Dans l’accord que nous venons d’obtenir, nous avons semé les graines qui permettront à ces projets d’éclore.

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Pour réaliser vos ambitions en matière d’énergie nucléaire, il faudra écarter les écolos du futur gouvernement ?

Avec l’accord obtenu cette semaine, le prochain gouvernement aura la possibilité d’aller plus loin. Cela se fera avec les personnes qui seront d’accord pour avancer. Ce point est fondamental pour le MR. L’avenir du pays en matière énergétique est un point critique et sera central dans nos exigences pour participer à une future coalition.

En plus des SMR, faut-il construire de nouveaux réacteurs “classiques” ?

Pourquoi pas. Il est peut-être préférable de construire un ou deux nouveaux EPR (réacteur pressurisé européen, des réacteurs de la 3e génération selon la classification internationale, NdlR) plutôt que de prolonger les vieux réacteurs. Il faudra évaluer cela. Mais il faudra prendre ces décisions dans des délais qui le permettent. Les Français n’ont aucun état d’âme, eux : ils vont construire 6 à 12 nouveaux EPR. Un EPR, c’est l’équivalent d’un tiers de la consommation électrique belge. Il faut que cela soit possible en Belgique également.

Notre pays a beaucoup hésité dans ce dossier et cela a coûté beaucoup d’argent. Le MR lui-même a changé d’avis…

L’incertitude est la pire des choses pour les entreprises car elles veulent pouvoir investir sur le long terme. En Belgique, il n’a pas été possible de leur donner ces certitudes et je le déplore. Mais pourquoi veut-on du nucléaire ? Car c’est l’énergie la moins chère, qui ne produit pas de CO2, qui est massive et qui ne dépend pas du vent ou du soleil. Même quand il fait noir et qu’il n’y a pas de vent, on a de l’électricité. Il faut coupler le nucléaire avec de l’énergie verte. Voilà le duo sur lequel on doit travailler dans le futur. Mais il faut une stratégie qui aille au-delà que la durée d’un seul gouvernement.

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Vous défendez depuis longtemps l’énergie nucléaire. C’est une satisfaction d’avoir eu raison avant les autres ?

Je ne vous cache pas que c’est une satisfaction personnelle. Je n’ai pas bougé d‘un iota mais je n’étais pas seul. Benoît Friart (bourgmestre de Le Roeulx, ancien député fédéral) ou Denis Ducarme étaient sur la même ligne. Ce n’était pas le cas de Jean-Luc Crucke (alors au MR) qui était un antinucléaire primaire. C’était compliqué entre nous… Je ne sais pas comment il se retrouve dans la ligne des Engagés qui défendent le nucléaire, justement. Si le MR était divisé sur la question à l’époque, ce n’est plus le cas désormais : on est unanime. Se passer du nucléaire, ce serait comme se couper un bras.

Le MR est sous influence des lobbies du nucléaire, entend-on chez les écologistes.

Quand vous n’êtes pas d’accord avec les écolos, ils disent que vous n’avez pas bien compris le dossier, que vous êtes d’extrême droite ou que vous êtes payé par un lobby… Classique. Les écolos m’ont accusé d’être payé par le lobby des pesticides, par le lobby du nucléaire, par le lobby pétrolier. Demain, ils m’accuseront d’être payé par le lobby du tabac, de l’alcool ou des fabricants de pralines. Pourtant, au sein du gouvernement, ce sont les écolos qui sont les plus influencés par les lobbies. Greenpeace, les ONG, Inter-Environnement Wallonie… Ce sont des lobbies verts qui sont très influents.

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