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Manifestation contre la réforme des retraites en France: les syndicats saluent une « mobilisation historique »

Pour cette sixième journée d’action contre la réforme des retraites, les syndicats avaient annoncé vouloir mettre la France « à l’arrêt ».

La mobilisation dans les rues a été très forte, le secrétaire général de la CFDT la qualifiant « d’historique au regard des 40 ou 50 dernières années ».

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La CGT a annoncé 3,5 millions de manifestants dans toute la France, soit 1 million de plus que les 2,5 millions qu’elle avait décompté le 31 janvier, le précédent record dans cette mobilisation contre la réforme des retraites.

Le ministère de l’Intérieur de son côté a chiffré à 1,28 million le nombre de manifestants, soit légèrement plus que son décompte du 31 janvier (1,27 millions).

Comme lors des précédentes mobilisations, les cortèges ont été globalement calmes en dépit de quelques heurts entre certains manifestants cagoulés et les forces de l’ordre à Paris, Nantes, ou encore à Lyon et Rennes où des canons à eau ont été utilisés. A Paris, 22 personnes ont été interpellées.

Dans la capitale, les chiffrages font le grand écart entre 700.000 selon la CGT et 81.000 pour la préfecture.

La réforme poursuit son chemin au Sénat avec en début de soirée à son menu l’article qui cristallise l’opposition des syndicats et de la gauche: le report de l’âge légal de la retraite à 64 ans.

Le gouvernement « ne peut pas rester sourd » à cette mobilisation, a insisté le leader de la CFDT, tandis que le leader de la CGT, Philippe Martinez, mettait en garde l’exécutif contre « un passage en force (qui) ne ferait que mettre le feu aux poudres ».

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A Lyon, Audrey Sivadon, une ingénieure de 27 ans, et Gabrielle Laloy Borgna, une doctorante de 26 ans, qui ont participé à quasi toutes les manifestations précédentes, exprimaient leur espoir de pouvoir encore changer les choses, malgré l’inflexibilité de l’exécutif.

« La réforme va passer, après est-ce qu’elle va être mise en application ? », demandait Gabrielle Laloy Borgna. « On a quand même une once d’espoir, sinon on ne serait pas là », a renchéri Audrey Sivadon.

Les taux de grévistes restaient un peu en deçà des meilleurs scores enregistrés depuis le début du mouvement, chez les cheminots (39% contre 46,3% le 19 janvier) comme chez les enseignants et à EDF (47,65% des salariés en grève selon la direction, contre 50% le 19 janvier).

Dans la fonction publique d’Etat dans son ensemble, près d’un agent sur quatre était en grève, contre 28% lors de la première journée d’action le 19 janvier, et 19,4% le 31 janvier.

Une nouvelle réunion de l’intersyndicale est prévue dans la soirée pour décider des suites du mouvement. Une nouvelle journée d’action samedi 11 mars est évoquée.

Cortèges très fournis

Partout en France, les cortèges étaient très fournis mardi, à un niveau comparable à la mobilisation record du 31 janvier. Ils étaient notamment entre 6.000 (préfecture) et 30.000 (CGT) à Nice, entre 13.000 et 23.000 à Bayonne, entre 20.500 et 55.000 à Grenoble.

A Marseille, la CGT a fait état de 245.000 manifestants (contre 205.000 le 31 janvier), 30.000 selon la préfecture (40.000 le 31 janvier).

Sondage après sondage, les Français restent très majoritairement opposés à la mesure emblématique de la réforme, le report de l’âge légal de départ, même s’ils pensent qu’elle sera mise en oeuvre in fine.

Dans l’éducation, des blocages ont eu lieu dans des universités et lycées, et le ministère a fait état de 32,71% d’enseignants grévistes. Le Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire, a recensé 60% des enseignants de collèges et lycées grévistes.

Le secrétaire général de la CGT Energie, Sébastien Ménesplier, a prévu une « semaine noire » dans le secteur, avec des baisses de production principalement dans le nucléaire.

Coupures sauvages

Des coupures d’électricité « sauvages » ont touché dans la matinée jusqu’à 4.000 habitants à Boulogne-sur-Mer et ses environs, selon Enedis.

Plus de 2.000 foyers ont également été privés d’électricité à Annonay (Ardèche), le fief du ministre du Travail Olivier Dussopt, selon la même source.

Deux transformateurs électriques ont fait l’objet de « dégradations volontaires par incendie » à Saint-Martin-de-Londres, près de Montpellier. Les coupures de courant ont concerné 8.000 foyers.

Les expéditions de carburants étaient bloquées mardi matin à la sortie de « toutes les raffineries » de France (TotalEnergies, Esso-ExxonMobil et Petroineos), selon le syndicat CGT-Chimie.

Et dans le gaz, trois des quatre terminaux méthaniers que compte la France ont été mis à l’arrêt pour « sept jours » lundi par les syndicats.

La semaine sera émaillée d’autres mobilisations, en parallèle des débats au Sénat où le gouvernement compte sur l’adoption de la réforme d’ici dimanche. Il envisage « un vote le 16 mars » dans les deux chambres.

« Si la réforme est adoptée, il est peu probable que la mobilisation se maintienne à ce niveau », anticipe une source gouvernementale, qui escompte un désengagement des syndicats réformistes.

« La loi est extrêmement importante, mais la démocratie réelle aussi », a prévenu de son côté Laurent Berger, mettant en garde contre un passage en force à coup de 49.3 qui serait « une forme de blocage inacceptable ».

Face « à la situation de blocage », Emmanuel Macron doit « trouver une sortie par le haut », « ou bien une dissolution » de l’Assemblée nationale, « ou bien un référendum », a plaidé Jean-Luc Mélenchon (LFI) à Marseille.

La SNCF prévoit une offre de transport légèrement améliorée pour mercredi, avec un tiers des trains en circulation pour les TGV et TER, contre un cinquième mardi.

Jeudi, le trafic sera à nouveau « perturbé », selon l’entreprise, dont tous les syndicats ont lancé une grève reconductible.