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Au Conseil de l’Europe, l’exclusion des athlètes russes et biélorusses des J.O. de Paris fait débat

Comme l’a rappelé le Néerlandais Tiny Kox, président de l’assemblée, “il y a longtemps que le sport n’est plus une simple question de loisir”. Il touche aussi aux valeurs défendues par le Conseil de l’Europe que sont les droits humains, la démocratie et la gouvernance par le droit, autant de principes violemment bafoués lors de l’agression armée de l’Ukraine lancée par Moscou en février 2022.

Le CIO pourrait faire marche arrière

Moins d’un mois après le déclenchement de la guerre, la Russie a été exclue de l’organisation pan-européenne. Le Comité international olympique (CIO), a quant à lui annoncé, dès la fin février, une probable exclusion des athlètes russes et biélorusses des Jeux olympiques et paralympiques de Paris.

Tout semblait tranché mais, depuis, le CIO “est en train de changer de position et semble favoriser la participation des athlètes russes et biélorusses”, a rappelé Tiny Kox en ouverture de cette audition qui voulait mettre à plat les arguments des uns et des autres.

La problématique s’est complexifiée dès septembre 2022 avec le point de vue sur une potentielle exclusion exprimé par deux rapporteurs spéciaux du Conseil des Droits de l’homme des Nations unies. “Nous avons écrit au CIO pour lui exprimer notre préoccupation”, précise la rapporteure Alexandra Xanthaki. “L’interdiction de participation fondée sur la seule base de la nationalité nous semble aller à l’encontre des principes d’universalité et de non-discrimination. Elle entretient la confusion entre le comportement des États et celui des personnes.”

Intervient alors la notion de régime de “stricte neutralité” tel qu’il pourrait s’appliquer aux athlètes russes et biélorusses lors de JO de 2024.

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“Stricte neutralité” mais encore…

Comme alternative à l’exclusion pure et simple, on peut envisager une bannière neutre et non pas un drapeau, refuser les hymnes, ne donner aucune accréditation aux officiels russes ou biélorusses a souligné Amélie Oudea-Castera, ministre française des Sports et des jeux olympiques et paralympiques. Mais quid des sports d’équipe où les athlètes sont regroupés en paire (badminton, aviron…) ou en équipe ? Quid des athlètes financés directement ou indirectement par l’État russe ou biélorusse ? Comment opérer une sélection de sportifs rigoureusement indépendants du pouvoir alors que l’on sait combien ils lui sont intrinsèquement liés ? “Le CIO y travaille”, a déclaré Francesco Ricci Bitti, président de l’Association des fédérations internationales olympiques des sports d’été (ASOIF). “Il y a des divergences mais je suis convaincu que cela va fonctionner. ”

S’exprimant au nom du CIO, deux anciens champions olympiques ont plaidé en faveur d’une participation d’athlètes russes et biélorusses. L’Arménien Arsen Julfalakyan, champion de lutte gréco-romaine a signalé que son pays n’avait jamais demandé l’exclusion des sportifs azerbaïdjanais au nom des valeurs du sport. La Namibienne Gaby Ahrens, ancienne olympienne de tir sportif, a rappelé pour sa part que l’Afrique était “familiarisée avec les conflits entre pays et à l’intérieur des pays” mais sans que l’on n’en fasse “payer le prix” aux sportifs. Autre continent, autre perception…

Pour le ministre des sports ukrainien qui se réfère à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, “le droit à la non-discrimination n’est pas un droit absolu” puisqu’une “différence de traitement peut se justifier par un objectif légitime de paix ou d’ordre public”. Son gouvernement ne cédera pas.

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