France

Rennes : « Le marché est fou »… Comme les particuliers, les entreprises galèrent à se loger

L’équation est compliquée à résoudre. Comment accueillir dans un même territoire de plus en plus d’habitants et de plus en plus d’entreprises sans consommer de terres agricoles ou naturelles ? Présentée comme l’un des secteurs géographiques français les plus dynamiques, Rennes Métropole fait aujourd’hui face à un déficit immobilier. Confrontés à une raréfaction de l’offre, les habitants ont vu le prix du mètre carré grimper sans discontinuer ces dernières années. Ils ne sont pas les seuls. A entendre les professionnels de l’immobilier d’entreprises, la situation est au moins aussi préoccupante dans le milieu pro, obligeant les dirigeants à se réinventer et à privilégier le partage des immeubles. Un changement de mentalité sans doute nécessaire mais qui prendra du temps.

« Après le Covid, on avait annoncé la mort du bureau. On voit aujourd’hui qu’on en est loin. Le marché de l’emploi est très dynamique, les entreprises embauchent donc elles doivent trouver des locaux pour leurs salariés. Le problème, c’est qu’on n’en a pas », glisse Kévin Levaire. Le directeur adjoint de l’agence BNP Paribas Real Estate de Rennes est, comme tous ses confrères du secteur, pris dans la tenaille d’un marché immobilier déséquilibré. « En fin d’année, on n’avait plus rien à proposer à nos clients », assure celui qui est aussi coprésident de la FNAIM.

Dans son dernier panorama du secteur, la fédération des agences immobilières a pointé du doigt le manque criant de bureaux, de locaux d’activités et d’entrepôts dans la métropole. « On a des entreprises qui cherchent depuis six mois, voire un an, et qui ne trouvent pas. Soit elles doivent faire d’importantes concessions, soit elles doivent entreprendre de lourds travaux », témoigne l’agent immobilier. En deux ans, le stock de locaux d’activités a chuté de 40 % dans Rennes Métropole, atteignant son plus bas niveau historique. « Nous sommes un peu inquiets car la tendance risque de se poursuivre dans les années à venir ».

« Nous sommes face à une pénurie totale »

Un rapide coup d’œil à Rennes et aux alentours donne pourtant une vision dynamique de la construction immobilière, donnant l’impression que cela se construit partout. Un nombre de grues important mais visiblement insuffisant pour répondre au marché. Alors que la métropole se bat pour respecter le zéro artificialisation nette, il est vrai que les communes sont moins chaudes à l’idée de créer de nouvelles zones d’activité. Les entreprises de logistique, nombreuses à vouloir s’agrandir ou s’implanter à Rennes, sont dans l’impasse. « Nous sommes face à une pénurie totale. Mais avec l’essor de l’e-commerce, le secteur a explosé. On a même des entreprises qui cherchent des friches pour s’y installer. Avant, personne n’en voulait. Le marché est devenu fou », témoigne Stéphane Dauphin, coprésident de la FNAIM.

Les salariés veulent du métro et des restos

Si le marché est si dingue, c’est parce que toutes les entreprises sont attirées par la même chose. Écoutant les attentes de leurs salariés, elles demandent à s’installer à proximité du métro ou des transports en commun, dans des zones où des commerces et des restaurants sont implantés. Dans les zones d’activité récentes comme aux Champs Blancs, à Beaulieu ou à ViaSilva, les nouvelles installations sont légion. « Parce que l’emplacement de leurs bureaux les aide à attirer de nouveaux salariés. Certaines ont vraiment du mal à recruter, elles veulent aussi faire revenir leurs effectifs en présentiel », estime Eric Debarnot, du groupe Giboire.

Face à la raréfaction du foncier, les entreprises acceptent également de « partager » leur QG en accueillant d’autres sociétés dans leurs murs ou sur leurs terres. Un changement de vision nécessaire qu’il faudra même encourager pour ne pas consommer tout le foncier. « Les collectivités jouent plutôt le jeu mais elles doivent construire plus sur moins de surface. Il y aura des arbitrages à faire pour elles et pour les entreprises. Il va falloir accepter de faire des parcs d’activité sur plusieurs étages », estime Hervé Kermarrec, patron du groupe immobilier du même nom.