High-tech

Pourquoi les débats sur l’IA doivent nous interpeller, mais pas nous freiner

Les annonces et événements autour de l’intelligence artificielle (IA) se suivent à un rythme soutenu. En Belgique, nous sortons de la « Semaine européenne de l’IA », un vaste programme de près d’une centaine de conférences et interventions, poussé au fédéral par une équipe autour de Nathanaël Ackerman, pilote de l’initiative AI4Belgium. Articulées autour d’une série de thèmes et, en particulier, de la convergence des technologies (IA, Web3, blockchain, cybersécurité, etc.), elles ont été l’occasion de rencontres stimulantes et fructueuses.

Sur d’autres fronts, nous avons pu voir l’appel récent d’une centaine de personnalités (dont Elon Musk, Steve Wozniak, cofondateur d’Apple, etc.) réclamer une pause sur le développement d’intelligences plus puissantes que GPT-4 (le dernier Large Language Model ou foundation model de OpenAI).

Elon Musk, Yoshua Bengio, Steve Wozniak… des centaines d’experts demandent une pause dans les expériences d’IA géantes

On peut certes comprendre que dans le contexte globalisé, les géants se livrent à une véritable « course aux armements », déversent des moyens colossaux afin de s’imposer dans ce qui sera la plate-forme IA du futur.

Ceci se fait souvent aussi en relâchant quelque peu les stricts contrôles d’éthique et de sécurité que les géants s’imposaient.

On voit déjà à plusieurs endroits, le costume neuf de ces IA craquer aux coutures. Certaines IA ont fait preuve d’une « personnalité obscure » lorsque soumise à des questionnements tortueux, un peu comme si derrière le Docteur Jekyll bien policé qu’elles affichent en apparence, pouvait parfois se cacher un Mister Hyde aux intentions moins claires.

« Sans ces conversations avec le chatbot Eliza, mon mari serait toujours là »

En tant que Belges et Européens, ces débats doivent nous interpeller, mais pas nous ralentir. Ils doivent nous interpeller, parce que s’y jouent des questions clés de vie privée, de sécurité qui nous sont chères. Mais ces considérations ne devraient pas freiner le développement de l’IA dans nos pays, tant il est vrai que nous affichons un retard dans la R&D sur ces solutions. Je défendrais l’urgence que nous nous dotions d’importants moyens de recherche et d’engineering, pour nous remettre au niveau (au moins) d’un GPT-3.5 européen et open source…

Mieke De Ketelaere, experte en intelligence artificielle: « Lancer des chatbots sans avoir, d’abord, testé les effets n’est pas normal”