France

Réforme des retraites : Pourquoi Les Républicains ne veulent pas entendre parler d’un accord avec Macron ?

Après la désunion, quelle partition pour la droite ? Divisés lors des débats sur la réforme des retraites, Les Républicains entendent, eux aussi, vite passer à autre chose. En attendant la journée de séminaire prévue début mai pour recoller les morceaux en interne, comme l’indiquait mercredi Le Parisien, quelques membres du parti, comme Rachida Dati, ont proposé une piste de sortie : un contrat de gouvernement avec Emmanuel Macron.

Mais ce plan a de nouveau été balayé par Eric Ciotti, le président LR, et une large majorité d’élus. « Aucune hypothèse de ce type n’est viable », glisse l’un d’eux. Alors qu’Elisabeth Borne doit rencontrer les responsables de l’opposition la semaine prochaine, dans le but « d’élargir » sa majorité, la droite continue de faire la sourde oreille. Mais pourquoi donc LR ne veut surtout pas d’un accord avec le chef de l’Etat ?

Parce que ça ne résoudrait pas la crise

Pendant des semaines, Eric Ciotti et le chef des députés LR, Olivier Marleix, ont négocié avec Elisabeth Borne pour trouver un compromis sur la réforme des retraites. Mais à quelques minutes du vote fatidique sur le texte, les deux hommes ont été obligés de reconnaître qu’ils n’étaient pas parvenus à entraîner l’ensemble de leurs troupes. Cet échec, sur une réforme que la droite a longtemps portée, fragilise d’autant plus un hypothétique accord avec la Macronie.

« On a failli exploser sur les retraites, alors imaginez sur des sujets plus existentiels… », ironise Julien Aubert, l’un des nombreux vice-présidents LR. « Un accord n’aurait d’intérêt pour personne. Vu nos divisions, ça ne résoudrait pas le problème de majorité à l’Assemblée. Et les députés LR n’ont pas été élus sur un contrat de gouvernement : moralement, ça nous décrédibiliserait, et politiquement, ça serait l’impasse », ajoute-t-il. Et vu de l’autre côté, une éventuelle alliance avec la droite risquerait de fracturer la majorité présidentielle.

Parce qu’il existe (quand même) des différences

Si les macronistes et une partie des élus LR se retrouvent sur la question des retraites, il est plus difficile d’imaginer un accord sur d’autres thématiques. « On estime que la politique d’Emmanuel Macron a abîmé le pays, sur l’autorité de l’Etat et les finances publiques », tranche Eric Pauget, député LR. « Nous avons des divergences de fond sur la gestion des comptes publics alors que la dette explose, la fiscalité, le régalien avec la justice et l’immigration, mais aussi la santé, l’éducation… », énumère l’élu des Alpes-Maritimes, sachant que l’électorat LR est de plus en plus opposé à la politique menée par le chef de l’Etat.

Le projet de loi sur l’immigration, qui devait être débattu au Sénat cette semaine, a d’ailleurs été reporté par l’exécutif, bien conscient qu’il ne pourrait pas obtenir l’appui de la majorité et, dans le même temps, celui des parlementaires de droite. « Même au Sénat, je vois bien que la droite se radicalise contre le gouvernement. Les élus favorables à un accord politique pour faire avancer les choses sont minoritaires », soupire François Patriat, patron des sénateurs Renaissance.

Parce qu’ils pensent déjà à l’après-Macron

On peut également voir dans ce refus de la droite une volonté plus stratégique. Plusieurs élus reconnaissent que la fin du quinquennat est déjà dans toutes les têtes. « Macron est en train de s’écrouler, il est rejeté par le pays. S’associer à un cadavre, quel serait notre intérêt ? », grince Julien Aubert.

« Une plateforme de gouvernement, cela voudrait dire cautionner son bilan. Et intégrer que la droite républicaine est morte », ajoute Eric Pauget. « Je crois au contraire que nous avons un avenir, poursuit-il. L’après-Macron se fera sans Macron. La colère dans le pays dépasse d’ailleurs le cadre des retraites. Gérald Darmanin, Bruno Le Maire ou Edouard Philippe, ceux qui rêvent de reprendre le flambeau en 2027, auront bien du mal à défendre le bilan des deux quinquennats ». Même divisée et en pleine crise, la droite n’en finit pas de rêver.