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Le Groupama Stadium pourrait-il être renommé en l’honneur d’Aulas ?

A quel point le nom de Jean-Michel Aulas, après trente-six ans d’un règne salué partout depuis six jours (hormis par Hatem Ben Arfa), sera-t-il encore omniprésent dans les prochaines saisons du côté de l’Olympique Lyonnais ? C’est l’une des nombreuses questions que pose le départ brutal de ce bâtisseur hors pair, ayant transformé un club de Ligue 2 en septuple champion de France et demi-finaliste de la Ligue des champions à deux reprises. Alors qu’il devrait être absent pour le troisième match consécutif de son club de toujours, ce dimanche (13 heures) à Clermont, JMA pourrait-il obtenir la reconnaissance ultime, à savoir avoir son nom accolé au Parc OL ? Jamais dans l’histoire du football français un président n’avait bataillé comme lui pour voir un stade appartenant au club (et non à la ville) sortir de terre, donc la symbolique serait forte.

« Jean-Michel a vraiment construit une organisation remarquable, pour le secteur masculin comme féminin, a rapidement salué mardi le principal intéressé sur le sujet, à savoir le propriétaire John Textor. Et ce au-delà du football, il y a le divertissement, la technologie… C’est un énorme club, qu’on ressent au travers de sa communauté dans le monde entier. Il a une grande vision, du courage, et tout ce qu’il a créé ne peut être ignoré par personne. » De là à imaginer un hommage +++ initié par l’homme d’affaires américain qui a précipité son éviction avant même la fin de cette saison, on ne s’y hasardera nullement par ici.

Le 21 juin 2022, Jean-Michel Aulas avait organisé une conférence de presse avec l'homme d'affaires américain John Textor, qu'il présentait déjà comme le futur propriétaire de l'OL.
Le 21 juin 2022, Jean-Michel Aulas avait organisé une conférence de presse avec l’homme d’affaires américain John Textor, qu’il présentait déjà comme le futur propriétaire de l’OL. – Laurent Cipriani/AP/SIPA

« Un fantasme de supporteurs »

Certains supporteurs lyonnais poussent en tout cas dans ce sens, comme Souleymane Niang (19 ans), qui tient le compte GonesSpace sur Instagram. Sur celui-ci, on a vu apparaître mercredi un visuel très réussi du Groupama Stadium, rebaptisé Aulas Stadium. « L’homme mériterait cette reconnaissance après avoir construit un empire et fait de l’OL une référence mondiale, indique cet étudiant. Je fais une propagande sur les réseaux pour que son nom apparaisse sur le stade. C’est essentiel, d’autant que son départ s’est vraiment fait à l’arraché pour un tel monsieur, ce qui est moche. » Pour autant, le naming du formidable outil lancé avec Groupama Rhône-Alpes Auvergne en 2017, puis prolongé en décembre 2021 (jusqu’en juillet 2025), reste un enjeu fort, surtout pour un club n’ayant pas du tout programmé de se farcir quatre saisons consécutives sans participation à la Ligue des champions.

Je vois mal le propriétaire se priver des ressources de naming pour célébrer son prédécesseur par grandeur d’âme, indique l’économiste du sport Jean-Pascal Gayant. Le club compte sur ces rentrées d’argent cruciales, estimées à 5,5 millions d’euros par an. Renommer ce stade pour Jean-Michel Aulas me semble donc être de l’ordre du fantasme de supporteurs, avant 2025 et même après. »

Contactée par 20 Minutes, la direction de Groupama Rhône-Alpes Auvergne n’a pas souhaité donner suite à notre demande d’interview. « Il est prématuré de nous exprimer sur ce sujet, qui pour nous, entreprise privée et namer actuel, recèle des impacts réels dès lors que nous prenons la parole », nous indique simplement Groupama.

Une situation comparable au Bernard Tapie Vélodrome

« Ça serait un bel hommage qui ferait sens, note Maxime (41 ans), un fidèle supporteur de l’OL. Mais John Textor essaiera sans doute de trouver un gros namer américain pour augmenter les rentrées d’argent à partir de 2025. » Finalement, ne pourrait-on pas imaginer Groupama et Jean-Michel Aulas être associés dans l’intitulé du stade ? C’est en effet le cas à Lille, même si la configuration s’est faite dans le sens inverse, puisque le contrat de naming (jusqu’en 2027) avec la marque Decathlon n’a vu le jour que l’an passé. Les supporteurs du Losc se rendent donc cette saison à la Decathlon Arena-stade Pierre Mauroy. On défie quiconque de lâcher spontanément ce nom complet dans une conversation. Mais tiendrait-on à Lille une issue viable pour le Parc OL ? « Je doute que cette option soit envisagée par le service marketing de Groupama, d’autant que Jean-Michel Aulas reste un personnage clivant en France, estime Jean-Pascal Gayant.  »Le namer » ne prendra par exemple pas le risque de perdre une clientèle stéphanoise ou marseillaise en associant à ce point son nom à celui d’Aulas. »

Cela s’entend, et on ne risque donc pas d’avoir de sitôt le pendant français de la Johan Cruyff Arena d’Amsterdam. Le probable statu quo lyonnais fait penser à celui concernant le Vélodrome à Marseille. Juste après le décès en octobre 2021 de Bernard Tapie, icône de l’OM et ex-mentor de JMA, près de 6.000 supporteurs marseillais ont signé une pétition qui réclamait que le Vél’ devienne le stade Bernard Tapie. Un élan d’enthousiasme que la ville de Marseille, propriétaire de l’enceinte même si les décisions appartiennent depuis 2010 au consortium Arema, a vite douché. « La mairie de Marseille ne peut pas dire d’un coup que ça va s’appeler le Bernard Tapie Vélodrome, expliquait à l’époque à France Info Sébastien Jibrayel, adjoint aux sports de la ville. On ne peut pas casser un contrat, on n’a pas ce pouvoir. » Car à Marseille aussi, un naming a été lancé avec lar marque Orange en 2016 (et jusqu’en 2026, à hauteur de 2,5 millions d’euros versés par an), le stade étant alors devenu l’Orange Vélodrome.

« A Lyon, il faut lui faire un monument »

A défaut du nom du stade, l’ex-président Aulas pourrait-il hériter de celui d’une tribune présidentielle ? Depuis son inauguration il y a sept ans et demi, le Parc OL n’a ainsi pas encore eu les successeurs des tribunes latérales de Gerland baptisées Jean Bouin (est) et Jean-Jaurès (ouest). « On pourrait imaginer un nom officieux du stade consacré à JMA mais c’est sans doute prématuré, confie Richard, un habitué du virage sud. Ce sera peut-être plus concret le jour où il ne sera plus de ce monde. Par contre, ça serait la moindre des choses de lui donner le nom de la tribune présidentielle. »

Egalement contacté à ce propos, l’OL n’a pas répondu à 20 Minutes, au cours d’une semaine pour le moins mouvementée en coulisses. Et si la meilleure idée nous venait d’un ex-joueur international, jamais passé par le club lyonnais durant sa carrière, Claude Makélélé ? « Ce qu’est devenu l’OL, c’est grâce à Jean-Michel Aulas, a précisé dès lundi l’ancien milieu défensif du Real Madrid. Je pense qu’à Lyon, il faut lui faire un monument. » Du genre une statue sur le parvis de l’enceinte de Décines pour l’homme ayant conquis 52 trophées collectifs depuis 1987, en combinant son palmarès des équipes A masculine et féminine ?

Après avoir rendu hommage le mois dernier à Paul Bocuse, le virage nord du Parc OL prévoit de mettre le paquet pour « honorer comme il se doit » celui qui était leur emblématique président depuis 1987.
Après avoir rendu hommage le mois dernier à Paul Bocuse, le virage nord du Parc OL prévoit de mettre le paquet pour « honorer comme il se doit » celui qui était leur emblématique président depuis 1987. – ALLILI MOURAD/SIPA

« Au-dessus des départs de Juninho et de Lisandro »

« Quand on voit à quel point celles de Cristiano Ronaldo et de Johnny Hallyday ont été ratées, ça me semble risqué, sourit Maxime, notre supporteur. Je pencherai pour une fresque sur les murs du stade, comme Gérard Houllier et Paul Bocuse ont eu droit après leur décès. » Une chose est certaine, les regards seront tournés vers le siège de JMA pour les deux dernières réceptions de la saison, contre l’AS Monaco le 19 mai et face au Stade de Reims le 27 mai. Surtout ce dernier match en 2022-2023 à Décines, puisque les Bad Gones ont communiqué leur envie « d’honorer comme il se doit, à la hauteur du chemin parcouru », leur ancien président emblématique.

« Je n’ai connu que lui à cette fonction à l’OL, donc l’émotion contre Reims sera encore au-dessus de ce qu’on a pu vivre lors des départs de Juninho et de Lisandro », conclut Maxime. Au-dessus d’un Gerland en larmes, il y aura donc sans doute une communion totale des supporteurs avec leur boss au cœur du formidable outil. Son formidable outil, où il avait déclaré vivre « le plus beau jour de sa vie », aux côtés de la star américaine Will.i.am, lors de l’inauguration contre Troyes (4-1) le 9 janvier 2016.