France

JO de Paris 2024 : Le Parlement adopte le projet de loi olympique et ses caméras avec algorithmes

Par un dernier vote au Sénat, le Parlement a définitivement adopté mercredi le texte préparé par le gouvernement en vue des JO 2024, dont l’important volet « protection » convainc la droite, au contraire de la gauche qui craint un cheval de Troie sécuritaire. « Place aux jeux », a lancé la rapporteure LR Agnès Canayer.

Le vote sur le compromis acté en commission mixte paritaire a été acquis par 252 voix « pour » et 27 « contre » (communistes et écologistes). Les socialistes se sont abstenus. L’Assemblée nationale avait largement approuvé le texte mardi. Mais des députés de gauche ont déjà prévenu qu’ils saisiraient le Conseil constitutionnel.

Inquiétudes sur les algorithmes

Ce texte « intègre toutes les mesures indispensables au bon déroulement des Jeux (…), le tout en assurant le plein respect des droits et libertés de nos concitoyens », a souligné la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra. Le Sénat « a multiplié les gardes-fous, les contrôles, les garanties », a relevé Canayer.

La vidéosurveillance algorithmique, mesure phare du texte, suscite néanmoins des inquiétudes. Le but : que des algorithmes se nourrissent d’images de caméras et de drones pour repérer plus rapidement des « événements » potentiellement dangereux, comme le début d’un mouvement de foule ou l’abandon d’un bagage, et les signaler aux équipes de sécurité qui scrutent les rassemblements derrière leurs écrans. Mais la liste des « événements » à détecter sera fixée ultérieurement, ce qui ne rassure pas les opposants au texte.

La crainte d’une généralisation

L’expérimentation, qui pourrait débuter dès la promulgation et concerner la prochaine Coupe du monde de rugby (8 septembre-28 octobre), doit se terminer théoriquement le 31 mars 2025. Les images, qui pourront être analysées au moyen d’algorithmes de sociétés privées, pourront être conservées pendant une durée maximale de 12 mois.

L’exécutif et le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, invoquent le besoin de sécuriser les millions de visiteurs, insiste sur les garde-fous, et l’absence de reconnaissance faciale. Mais des élus de gauche, des associations comme Amnesty et la Quadrature du net ou le Conseil national des barreaux sont contre.

Certains estiment que les Jeux olympiques (26 juillet-11 août) et paralympiques (28 août-8 septembre) ne serviront que de vitrine pour pérenniser ces « caméras augmentées », et généraliser leur utilisation à la surveillance de toute la population.

Pour le communiste Pierre Laurent, « l’état d’exception créé par les Jeux olympiques est utilisé, au total, pour faire passer des lois sécuritaires qui resteront par la suite et qui posent beaucoup de problèmes ». L’écologiste Guy Benarroche a regretté « une vision sécuritaire débridée et si éloignée des valeurs de l’Olympisme ».

Un an après le fiasco du Stade de France

D’autres mesures du projet de loi sont d’ores et déjà censées perdurer après les Jeux, comme l’extension du champ des « criblages », la conduite d’enquêtes administratives sur des personnes. Les participants et les personnes accréditées sur les sites de compétition et les fan-zones pourront être visés, mais pas les fans.

Le texte entrera en vigueur environ un an après le fiasco de la finale de Ligue des champions au Stade de France. Files d’attente interminables, spectateurs munis de billets bloqués pendant que d’autres sans tickets escaladaient les grilles, familles et supporteurs visés par des tirs de gaz… Le maintien de l’ordre à la française était sorti humilié de la séquence.

Mesures plus consensuelles

Le projet du gouvernement prévoit la création de deux délits : l’un réprimant l’entrée illicite, en situation de récidive, dans une enceinte sportive. L’autre réprimant le fait de pénétrer sur l’aire ou le terrain de compétition. Les écologistes craignent notamment que la mesure soit utilisée contre des militants pour le climat. Une peine d’interdiction de stade obligatoire en cas d’atteinte grave à la sécurité serait également créée.

Mesure plus consensuelle : le texte prévoit la création d’un centre de santé dans le village olympique à Saint-Denis, bien que l’opposition regrette que la structure ne survive pas aux JO, dans un département qui manque de soignants. Il viendra également renforcer l’arsenal antidopage des autorités, avec notamment des tests destinés à détecter des formes de dopage génétique.

Il prévoit enfin des dérogations aux règles du repos dominical, qui courront du 15 juin au 30 septembre, malgré l’opposition de la gauche parlementaire, et des dispositifs d’accompagnement pour le transport des spectateurs en situation de handicap.