France

Eurovision 2023 : « Dire  »Allez l’Allemagne », ce n’est pas notre truc », prévient Lord of the Lost

De notre envoyé spécial à Liverpool (Royaume-Uni)

« C’est génial de contribuer à la diversité musicale à l’Eurovision, qui a une image très pop, radio-friendly et grand public… » Samedi, en finale du concours, Lord of the Lost fera résonner son Blood and Glitter sur la scène de Liverpool, devant des millions de téléspectateurs. Un an après avoir assuré les premières parties d’Iron Maiden et quelques semaines avant de se produire au Hellfest, le groupe de metal, créé en 2007 à Hambourg, ajoutera une ligne à un CV déjà bien rempli. Et pourquoi pas en finissant dans le Top 10 ? 20 Minutes s’est entretenu avec ces artistes allemands qui n’estiment pas représenter leur pays.

Qu’est-ce que cela vous fait de représenter l’Allemagne à l’Eurovision ?

Chris Harms : C’est une question délicate parce que d’un côté cela représente énormément de choses de représenter la musique alternative, ainsi que nous-mêmes, à travers notre art, à l’Eurovision. Mais d’un autre, on ne se dit pas que l’on représente l’Allemagne parce que la fierté nationale nous est étrangère. Nous sommes reconnaissants de pouvoir vivre dans un pays comme l’Allemagne, mais nous y sommes nés par hasard, donc on n’en est ni fier ni honteux. Ce n’est pas un accomplissement d’être allemand.

Pi Stoffers : Moi, je suis venu à Liverpool en tant que musicien au milieu d’autres très bons musiciens.

Gared Dirge : On ne vient pas ici avec le drapeau allemand en disant « Allez l’Allemagne ! » Ce n’est pas notre truc. Le seul drapeau que l’on pourrait utiliser serait le pride flag [le drapeau arc-en-ciel de la communauté LGBT+].

Le rock est sous-représenté à l’Eurovision. Sans la victoire des Italiens de Maneskin il y a deux ans, auriez-vous voulu participer cette année ?

Chris : Bien sûr qu’on aurait essayé, mais on n’aurait pas forcément été sélectionnés. Je pense que la victoire de Maneskin a beaucoup aidé à ouvrir l’esprit des gens. Ils ont élargi la porte qui a été ouverte par Lordi [le groupe de monster rock finlandais, vainqueur en 2006].

Vous trouvez qu’aujourd’hui il y a moins de préjugés autour du metal ?

Chris : Il n’y a pas plus ou moins de préjugés qu’envers n’importe quelle autre sous-culture. Dès que vous faites quelque chose d’un peu différent de ce que font les personnes « normales » – si ce mot a un sens – il y a des idées reçues. Il y en aura toujours pour dire que les musiciens de metal sont ivres et défoncés toute la journée ou sont des satanistes.

Lord of the Lost existe depuis 2007. Votre dernier album est le premier de votre discographie avoir été numéro 1 des ventes en Allemagne. Vous avez l’impression qu’il y a eu un moment pivot dans votre carrière ?

Chris : Cela n’a fait que prendre de l’ampleur, je dirais. Il n’y a pas vraiment un de tournant. On a de plus en plus de fans et de plus en plus de haters. Notre succès ne s’est pas fait en un jour.

Gared : Cela a été graduel.

Chris : Le dernier album a été numéro 1, le précédent numéro 2, celui d’avant numéro 6. Il y a eu une progression constante au fil des ans.

Vous vous sentez soutenus par le public allemand ?

Niklas : Majoritairement, oui. Comme Chris l’a dit, il y a toujours des haters bien sûr. Internet leur facilite les choses pour repandre la haine. Mais on reçoit surtout beaucoup de soutien, notamment de nos fans.

Chris, vous avez récemment repris les chansons des autres candidats de cet Eurovision, dont « Evidemment », le titre avec lequel La Zarra représente la France à l’Eurovision cette année. Ce n’est pas vraiment votre registre…

Chris : Je dois dire que ce n’était pas difficile. J’ai appris le français pendant dix ans à l’école. Je le parlais très bien quand j’avais 18 ou 19 ans. Et j’ai une bonne oreille. C’était plus dur de chanter en finnois ou en italien.

Vous avez envisagé de chanter « Blood and Glitter » en allemand à l’Eurovision ?

Chris : On le fera peut-être pour le fun après l’Eurovision. Mais traduire nos textes en allemand n’est pas forcément une bonne idée C’est une langue qui ne se prête pas vraiment aux équivalents de « baby » ou « oh yeah ». Si vous ne trouvez pas le bon mot, cela peut être malaisant.

Niklas : Quand on s’est engagés dans l’aventure Eurovision, on a prévenu qu’on ne changerait pas ce que l’on est. Chanter en allemand serait un grand changement, donc on ne l’a pas fait.

Vous chanterez au prochain Hellfest…

Pi : Le Hellfest était sur ma liste des choses à faire dans ma vie depuis que je fais de la musique.

Ce ne sera pas votre premier concert en France…

Chris : L’an dernier, on a eu la chance de jouer avec Iron Maiden à la Defense Arena à Paris, qui est juste la plus grande enceinte couverte d’Europe. C’était impressionnant.

Bo Six : Quand on a fait notre première répétition sur la scène à Liverpool, cela m’a rappelé La Defense Arena parce que c’était énorme. Je me suis dit que c’était une bonne chose qu’on ait eu cette expérience, cela faisait une bonne préparation.

Vous voyez un lien logique entre Iron Maiden, l’Eurovision et le Hellfest ?

Chris : On a été en tournée avec Iron Maiden, notre popularité a augmenté, ce qui a mené à notre album numéro 1, ce qui nous a aidés à être choisi pour l’Eurovision. Il y a un lien de cause à effet.