France

Décès à l’Ehpad de Lherm : Quatre ans après la mort de cinq pensionnaires intoxiqués, le chef cuisinier mis en examen

Dans la nuit du 31 mars au 1er avril 2019, cinq pensionnaires de l’Ehpad la Chêneraie de Lherm, au sud de Toulouse, décédaient après avoir avalé leur repas du soir. Une intoxication alimentaire foudroyante qui avait conduit à l’hospitalisation de nombreux autres résidents de cette maison de retraite, rachetée deux mois plus tôt par le groupe Korian.

Quatre ans après l’ouverture d’une information judiciaire, le chef cuisinier de l’établissement au moment des faits a été mis en examen, vendredi, pour homicides et blessures involontaires et mise en danger de la vie d’autrui, indique le parquet de Toulouse. Et d’autres devraient suivre dans ce dossier, où l’enquête avait rapidement pointé des manquements aux règles d’hygiène, notamment sur la propreté d’un mixeur, mais aussi des dysfonctionnements dans la rupture de la chaîne du froid et du chaud.

Un meuble casier, appelé « échelle », dans lequel les plats auraient dû être conservés à une certaine chaleur avant d’être distribués dans les étages, ne fonctionnait pas, malgré les demandes faites par le personnel pour le changer et les audits qui avaient pointé les défaillances.

Une victime toujours pas incinérée

« On aurait aimé que l’on commence par les responsables du groupe Korian, par les donneurs d’ordre plutôt que par les fusibles. Ce n’est pas eux qui pouvaient changer le matériel, mettre du personnel en plus, ils faisaient avec les moyens du bord, peut-être pas bien non plus, mais on ne leur donnait pas les moyens pour des raisons d’économie et de profit », critique Nicolas Raynaud de Lage, avocat de l’une des familles de victime. Pour lui, « c’est un système » qui est à pointer du doigt dans ce dossier, et pas juste « des lampistes ». Ce qu’a dénoncé le livre-enquête de Victor Castanet, Les Fossoyeurs.

Un avis partagé par Alexandra Bernard, dont la grand-mère Geneviève est décédée ce jour-là. Depuis quatre ans, elle interpelle tous les élus qu’elle rencontre, jusqu’à s’adresser directement au garde des Sceaux en personne lors d’une de ses venues l’an dernier dans la région.

« Il y a une chape de plomb, rien ne bouge. Au bout de quatre ans, on voit à peine un début de quelque chose. Mon père qui a 74 ans dit qu’il ne verra jamais le procès », se désespère la quadragénaire, qui rendait régulièrement visite à sa « mamie ». Une question d’autant plus importante pour sa famille que cela fait quatre ans qu’ils attendent de pouvoir procéder à l’incinération du corps de leur proche.

« Si une autopsie devait être à nouveau demandée par la justice, cela ne pourrait pas se faire. En attendant, mamie est dans un dépositoire, un caveau provisoire, au cimetière », indique la Toulousaine, pour qui « il n’est pas possible de faire son deuil ».

Elle est restée en contact avec les autres familles de victimes et toutes trouvent désormais que le temps d’instruction est au-delà du raisonnable, d’autant plus que tous gardent en mémoire les engagements d’Agnès Buzyn, qui s’était engagée le jour du drame à ce que « toute la transparence soit faite ».