Belgique

De Wever évoque l’avenir de la Belgique: « Je ne pense pas que le confédéralisme viendra par enthousiasme mais par l’impossibilité de continuer ainsi »

Vous vous exprimez très peu dans les médias francophones.

C’est vrai. Mais cela sert à quoi exactement ?

A mieux faire comprendre vos positions par une partie du pays…

J’ai constaté que cela ne sert pas à grand-chose. Et cela se retourne souvent contre moi. Pourquoi faire l’effort alors ? D’ailleurs, il n’y a pas beaucoup de responsables politiques francophones qui s’expriment dans des médias flamands.

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Mais si, il y a Paul Magnette, Thomas Dermine, Georges-Louis Bouchez…

Paul Magnette, c’est plutôt rare… Enfin, oui, il y en a quelques-uns, c’est vrai. L’idéologie de Georges-Louis Bouchez est proche de la mienne et il a des idées intéressantes. Créer de la valeur ajoutée pour engendrer la prospérité est une idée libérale que je défends car, à mon sens, c’est la meilleure. Sur le wokisme, le MR a également de bonnes idées. Ce parti a publié une bonne étude à ce sujet. Mais que représente le MR en Wallonie, 20 ou 25 % au maximum ? La grande majorité des Wallons votent à gauche.

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Pourquoi ne pas rechercher, avec le MR, la mise en place d’un gouvernement de centre-droit en 2024, comme l’était le gouvernement de Charles Michel (la coalition “suédoise” à laquelle la N-VA participait) ? Ne serait-ce pas plus intéressant pour l’économie flamande qu’un gouvernement de réformes institutionnelles avec le PS ?

En 2014, le but de la majorité suédoise était de susciter le désir institutionnel de la gauche wallonne en l’écartant du pouvoir fédéral. Cela a réussi. Moi, je me sens responsable de la prospérité de chaque citoyen dans ce pays. Je ne veux pas de révolution à la Tom Van Grieken (le président du Vlaams Belang, NdlR), c’est une idiotie. Il veut déchirer le pays d’une façon incontrôlée. Moi je refuse cela. Mais il faut quand même être totalement aveugle pour ne pas voir que dans ce pays, deux sociétés très distinctes se sont développées. L’une est de gauche, l’autre non. Si demain le PTB passe la barre des 20% en Wallonie, cela va devenir très très compliqué de former un gouvernement respectant au minimum les résultats des urnes tant au nord qu’au sud. Aujourd’hui, nous avons un gouvernement fédéral qui ne fait rien. Rien. Chaque réforme est mise au frigo. Et la situation budgétaire de la Vivaldi est le pire qui soit au niveau européen.

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Pour vous, la Belgique n’a plus d’avenir en tant qu’État fédéral ?

Le fédéralisme est un échec. Il faudra un jour ou l’autre évoluer vers un autre système. Le plus grand patriote belge ne parle même pas la langue de la majorité (Georges-Louis Bouchez, NdlR), c’est quand même unique dans le monde, non ? Bouchez est interrogé par des médias néerlandophones mais il ne parle pas le néerlandais… Bizarre. Le fait que l’on accepte cela en Flandre en dit long aussi sur la Flandre.

Vous dites cela parce que peu de gens en Flandre s’en sont offusqués ?

Mais oui ! On a l’habitude, Monsieur ! Ce pays a toujours existé grâce à la bonne volonté des Flamands et à leur bilinguisme. Cette volonté, malheureusement, diminue. Mes grands-parents pouvaient réfléchir en français. Mon père était bilingue. Moi, je me débrouille. Et mes enfants ? Apprendre le français, c’est comme un supplice chinois ! J’ai envoyé mon fils pour un stage de français, immersion totale, en France. Il a appris beaucoup… sauf le français ! (Rires) C’est terrible. Les élites unitaires bilingues ont été le dernier ferment d’union de ce pays. Oui, désormais, il y a de plus en plus de bilingues au sein des élites francophones mais c’est 60 ans trop tard. Les deux sociétés (francophone et néerlandophone, NdlR) sont divisées. Il faut en accepter les conséquences. C’est simple comme bonjour.

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En 2024, vous comptez laisser tomber les Wallons ?

Non, non, ce n’est pas mon intention. Je ne m’oppose pas aux transferts financiers à condition que cela se fasse en toute transparence et objectivité. La Wallonie s’en sortira à terme. Et la Flandre peut aider les francophones à se développer, oui, mais de façon structurelle. Il faut éviter de garder la Wallonie dans une situation de précarité et de faiblesse. Les allocations redistribuées par le fédéral font en sorte que beaucoup de Wallons restent trop longtemps dans l’inactivité. Chaque Région doit être responsable de ses propres comptes, c’est la seule façon de s’en sortir.

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La Wallonie s’en sortira à terme. Et la Flandre peut aider les francophones à se développer, oui, mais de façon structurelle. »

Pour réviser la Constitution et mener la réforme institutionnelle à laquelle vous aspirez, il faut une majorité de deux tiers des sièges au parlement… Vous savez que vous ne les aurez pas. Il n’y a pas de consensus entre les partis sur le “confédéralisme”.

Je ne pense pas que le confédéralisme viendra par enthousiasme mais par l’impossibilité de continuer ainsi.

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Vous vous attendez à une nouvelle crise politique après les élections ?

Je le crains. J’espère que la réforme de l’État interviendra dès 2024. Sinon, le pays ne pourra plus être gouverné. Cela peut traîner pendant des années. Alors, la situation sera encore pire. Parce que cette réforme sera peut-être menée par des forces politiques que je n’aime pas trop.

Les extrêmes ?

(Silence) Si vous ne m’aimez pas, regardez derrière qui viendra après moi…