Belgique

Alexander De Croo à La Libre : « Dans le budget 2024, la FEB n’a pas obtenu tout ce qu’elle voulait mais la FGTB non plus »

Nous avons fait un travail équilibré. Cela veut dire que le résultat du conclave est au centre et qu’il ne correspond pas à 100% à ce que certains veulent. On est sorti plus fort du Covid et de la crise énergétique et, désormais, nous devons rétablir une situation budgétaire saine. Cela se fait étape par étape. On nous disait que nous n’arriverions jamais à prendre les décisions qui s’imposent en cette fin de législature. Mais si, nous l’avons fait. Si le gouvernement prochain fait en 2025 et en 2026 ce que nous avons réalisé, la Belgique respectera les critères de Maastricht.

Pendant ce temps, les coûts salariaux des entreprises explosent, leur compétitivité baisse… Cela aura un impact sur les rentrées fiscales de l’État. Le problème budgétaire resurgira plus tard, inévitablement.

Malgré les crises, notre économie a montré beaucoup de résilience. Contrairement à certains pays voisins, nous n’avons pas connu de récession. La Belgique reste très attractive en matière d’investissement. La FEB n’a pas obtenu tout ce qu’elle voulait, mais la FGTB non plus… Nous avons quand même étendu de manière considérable les flexi-jobs. Ce n’est pas une solution à tout, mais cela va aider à combler les 200 000 offres d’emploi actuelles. Moi, je pousse ce gouvernement au maximum.

Pieter Timmermans (FEB) tire la sonnette d’alarme: « Après les élections il faudra d’urgence une coalition de partis prêts à relever cinq défis »

Le PS, très satisfait, a présenté le budget 2024 comme une victoire de la gauche. Vous êtes d’accord avec cette lecture ?

L’Open VLD et le MR sont aussi hyper-contents : nous avons évité les taxes sur ceux qui travaillent, qui entreprennent et qui épargnent. Si tous les partis de la majorité estiment qu’ils ont obtenu une victoire, c’est que j’ai bien travaillé. C’est mon rôle de Premier ministre.

guillement

Si tous les partis de la majorité estiment qu’ils ont obtenu une victoire, c’est que j’ai bien travaillé. C’est mon rôle de Premier ministre.« 

En conclave, il a été décidé de taxer les banques. Auparavant, la Belgique avait émis un bon d’État qui a capté plus de 20 milliards d’euros d’épargne. Votre gouvernement est-il en guerre avec les banques ?

Non. Pas du tout. L’augmentation de la fiscalité ne concerne que les grandes banques. Le dynamisme sur le marché de l’épargne montre que les petites banques ont été plus créatives et réactives que les autres. Le niveau de bénéfice du secteur bancaire est tel que cette taxe de 150 millions pourra être facilement digérée. Johan Van Overtveldt (ancien ministre des Finances, N-VA) avait pris le même genre de taxe sous le gouvernement Michel. Nous ne sommes pas plus durs avec les banques.

Qui a fixé cette taxe à 150 millions ? Durant le conclave, certains proposaient une taxe de plus de 600 millions d’euros.

C’est mon rôle d’estimer ce qui est raisonnable. Durant une négociation, certaines propositions relèvent du bluff, comme au Poker. Un apport de 150 millions, c’est raisonnable.

Si les banques avaient augmenté d’elles-mêmes les taux d’intérêt sur l’épargne, elles auraient évité cette taxe ? Ont-elles suscité leur propre punition ?

Nous avions espéré plus de réactivité des grandes banques, c’est clair. Le Belge moyen recherche un rendement plus élevé. On l’a vu avec le succès du bon d’État.

Belfius, détenue à 100 % par l’État belge, va contribuer au budget fédéral via le versement de 220 millions de dividendes. Votre gouvernement est-il intervenu en coulisses pour recevoir cet apport important pour équilibrer ses comptes en 2024 ?

Non, non, non… Ce n’est pas du tout comme cela que ça se passe. C’est Belfius qui a pris cette décision. On n’a rien demandé.

L’État doit-il rester actionnaire de Belfius ? Est-ce la vocation d’un État moderne ?

À terme, il serait normal que les investisseurs “bons pères de famille” puissent devenir actionnaires de Belfius. Mais cela ne se fera plus sous cette législature.

Alexander De Croo mise sur Alexia Bertrand pour négocier le budget 2024: »Quand elle parle, même Frank Vandenbroucke se tait »

Alexander De Croo, homme d'État belge néerlandophone. Membre du parti libéral Open VLD, il est Premier ministre depuis le 1ᵉʳ octobre 2020
Alexander De Croo prend la pose au sommet de l’escalie qui mène à son bureau au 16, rue de la Loi. ©cameriere ennio

L’autre gros dossier de cette semaine, c’est l’annonce de la livraison de F-16 à l’Ukraine. La décision finale reste à prendre en 2025 et dépendra donc de la prochaine majorité fédérale. C’est fort ambigu

L’ambiguïté est surtout du côté des médias francophones… Du côté flamand, tout le monde a compris. La position antérieure était la suivante : la Défense estimait que nous avions besoin de tous nos F-16 et que ces derniers seraient inutilisables lorsqu’ils seront remplacés par les F-35. Nous en avons discuté en kern et nous avons tout de même demandé une étude réexaminant cette position. L’étude démontre qu’en 2025, des F-16 seront disponibles et pourront être livrés à l’Ukraine. Mais le feu vert final dépendra du gouvernement au pouvoir à ce moment-là. Le président Zelensky lui-même l’a parfaitement compris.

Mercredi matin, le PS, qui dispose du portefeuille de la Défense, a annoncé cette décision dans les médias. Les libéraux francophones pestaient : ils affirment être à l’origine de ce revirement dans l’attitude du gouvernement au sujet des F-16. Où est la vérité ?

Quand il y a des doutes, il faut toujours écouter le Premier ministre (sourire)… Le MR a insisté pour qu’on étudie la livraison de F-16, oui, mais il n’est pas le seul parti à l’avoir fait.

guillement

Le MR a insisté pour qu’on étudie la livraison de F-16, oui, mais il n’était pas le seul parti à le faire.« 

Il y a eu une guerre de communication dans ce dossier ?

Oui. Mais, franchement, on s’en fout… C’est le poto-poto politique belge. Je rappelle que la Belgique va aussi avoir un rôle central pour l’entretien des F-16 (dans le cadre de la “coalition F-16” en faveur de l’Ukraine, NdlR).

Au Proche-Orient, le Hamas a massacré des civils israéliens. Il existe une polémique sur la qualification de cette organisation qui domine Gaza. Terroriste ou pas ?

Le Hamas est un groupe terroriste, il n’y a pas d’autres mots à utiliser. Les actes commis relèvent d’une inimaginable barbarie. Il est normal qu’Israël réagisse désormais pour protéger sa population. D’un autre côté, j’espère que tout sera fait pour éviter des morts civils additionnels également du côté palestinien. Mais, soyons clairs, qui met en péril la population à Gaza ? C’est le Hamas. On scrute actuellement la nature de la riposte israélienne mais on pourrait examiner ce que font les terroristes du Hamas. Ils pourraient, par exemple, libérer les otages, reconnaître qu’ils sont allés trop loin… C’est trop facile de pointer du doigt la réaction israélienne.

guillement

Le Hamas est un groupe terroriste, il n’y a pas d’autre mots à utiliser. Les actes commis relèvent d’une inimaginable barbarie. Il est normal qu’Israël réagisse désormais pour protéger sa population. »