Suisse

La dette des pays en développement flambe, la Suisse est-elle au rendez-vous?

Les bureaux de Fitch Ratings à New York, États-Unis. La société émet des notes de crédit sur la dette des entreprises publiques et privées, ainsi que sur celle de pays. Keystone / Justin Lane

L’ONU tire la sonnette d’alarme sur la situation critique de la dette des pays en développement. La Suisse a débloqué 39 millions de francs et est active dans les instances internationales pour aider au refinancement et à la restructuration de la dette. Est-ce suffisant?

Ce contenu a été publié le 07 mars 2023


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augmentation de 39 millions de francsLien externe de sa contribution annuelle d’ici 2028 pour aider les pays en développement à gérer cette crise, qui pourrait compromettre le développement économique d’une partie des continents africain et sud-américain. Cette somme, en hausse constante depuis 2017, vient s’ajouter aux plus de 3 milliards de francs alloués chaque année par la Suisse à l’aide publique au développement (APD). En 2021, le montant de l’APD a dépassé les 3,2 milliards de francs.

Le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) indique que l’une des priorités de la Suisse en matière de politique étrangère pour 2021-2024 est de «promouvoir une croissance économique durable dans les pays en développement à travers une bonne gouvernance et des institutions publiques fortes».

Eviter le trop peu trop tardLien externe», le PNUD alerte sur les conséquences catastrophiques du surendettement chronique des pays les plus pauvres.

«De nombreux pays souffrent d’un surendettement qui les empêche de financer de nouveaux investissements favorables à la croissance et d’augmenter les dépenses de développement indispensables», prévient-il dans le document.

Si la problématique de la dette des pays en développement et de son allègement n’est pas nouvelle, le PNUD ainsi que les ONG s’alarment de l’ampleur du phénomène, aggravé par la pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine, qui ont plombé les finances publiques. La dette globale des pays en développement a atteint 205% du produit intérieur brut (PIB) en 2020, contre 174% en 2018.

Credit Suisse au MozambiqueLien externe, celui d’UBS en Papouasie-Nouvelle GuinéeLien externe ou encore les liens troubles de GlencoreLien externe, géant commercial international basé à Genève, avec le Tchad.

Il est aussi reproché à la Suisse sa faible participation financière. «Compte tenu du rôle de la Suisse en tant que pays de résidence d’importants créanciers privés, il ne suffit pas, dans son cas, de participer avec de modestes contributions aux programmes d’allègement de la dette du FMI ou de la Banque mondiale», estime Dominik Gross d’Alliance Sud.

Tout comme le PNUD, il attendrait davantage de participation des entreprises privées, notamment des banques. Ces dernières bénéficient des intérêts des crédits qu’elles allouent aux pays en développement, sans pour autant d’obligation de participer à l’aide au développement.

Pour mieux intégrer ces capitaux privés, une solution discutée depuis de nombreuses années serait de mettre autour de la table les banques suisses, la société civile et les agences publiques d’aide au développement. «Cela permettrait de négocier des solutions spécifiques à la Suisse pour alléger la dette de ces pays», selon Dominik Gross. Au cours de l’été 2020 déjà, Alliance Sud et d’autres ONG helvétiquesLien externe, dont Swissaid, Action de Carême, Pain pour le prochain, Helvetas ou encore Terre des Hommes Suisse, avaient reproché au Conseil fédéral de ne pas avoir répondu à leur appel, malgré plusieurs interventions de parlementaires.

Alliance Sud estime aussi que la Suisse pourrait transférer tous ses DTS (plus de 11 milliards de dollars en 2021Lien externe) aux pays surendettés afin qu’ils disposent de liquidités. «Elle n’a pas besoin de ces avoirs», d’après Dominik Gross. Cela supposerait toutefois une modification de la loi sur l’aide monétaire que seul le Parlement peut initier, ce qui n’est pas prévu à l’heure actuelle.

Solution globale attendue

«Nous attendons une réponse globale pour aider à débloquer le financement du développement et pour encourager le financement du développement à long terme par des capitaux privés dans les pays en développement», explique Angela Lusigi, représentante du PNUD au Ghana.

Elle propose notamment une réforme complète du système de notation et un soutien pour réorienter les économies des pays en développement vers les exportations, ce qui leur permettrait d’accumuler des devises étrangères pour rembourser la dette.

«La Suisse soutient les restructurations de dette pour les pays dont la dette n’est plus durablement supportable», assure pour sa part Lorenz Jacob, chargé d’information dans le secteur Coopération économique au développement du SECO.

Bon à savoir

Initiative pour la suspension du service de la dette (DSSI)

L’objectif de la DSSI, une initiative lancée en 2020 par le FMI et la Banque mondiale, était de fournir des ressources financières pour aider les pays éligibles à lutter contre la pandémie de Covid-19. Pour participer à l’initiative, le pays bénéficiaire devait s’engager à utiliser ces ressources pour couvrir les dépenses sociales, sanitaires ou économiques en réponse à la crise.

Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE)

Cette initiative a été lancée en 1996 par le FMI et la Banque mondiale. Elle a été conçue pour que les pays les plus pauvres du monde ne soient pas submergés par le fardeau de leur dette.

Cadre commun

Le Cadre commun envisage le traitement de la dette, au cas par cas, en fonction des demandes des pays débiteurs éligibles. En réponse à une demande de traitement de la dette, un comité des créanciers est convoqué. Les négociations sont soutenues par le FMI et la Banque mondiale, notamment par le biais d’une analyse de la viabilité de la dette.

Analyse de viabilité de la dette

La Banque mondiale et le FMI travaillent avec les pays à faible revenu pour régulièrement analyser la viabilité de leur dette. Les deux institutions utilisent ce cadre pour guider les décisions d’emprunt des pays à faible revenu, de manière à équilibrer leurs besoins de financement et leur capacité de remboursement présente et future.

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 Texte relu et corrigé par Virginie Mangin et Pauline Turuban

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