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Patrick Lefevere : “Remco au Tour ? On va d’abord le laisser récupérer”

Patrick, on est désolé pour ce qui survient à Remco et à votre équipe…

”Merci. Mais c’est comme ça. On n’avait pas le choix.”

Soudal Quick-Step CEO Patrick Lefevere pictured at the start of stage four of the 2023 Giro D'Italia cycling race, 175 km from Venosa to Lago Laceno, in Italy, Tuesday 09 May 2023. The 2023 Giro takes place from 06 to 28 May 2023. BELGA PHOTO JASPER JACOBS
Patrick Lefevere ne voulait pas prendre le moindre risque.

Pouvez-vous nous confirmer que le mot d’ordre chez Soudal Quick-Step, c’est que dès qu’un coureur est positif au Covid-19, on le retire de la course ?

”Oui. On ne veut pas faire des bêtises en prenant des risques totalement inutiles. Cela n’en vaut pas la peine. La santé du coureur est le plus important et on est d’autant plus vigilant depuis l’an dernier lorsque Tim Declercq avait eu des problèmes cardiaques après avoir contracté le virus.

guillement

« Dimanche, à l’arrivée de son chrono, on aurait dit qu’il avait 40 ans. »

Aviez-vous perçu des signes chez Remco montrant qu’il n’était pas bien ?

”Après, c’est facile de dire que ses difficultés de samedi dans la montée finale ou que son chrono un peu en dessous de ses standards habituels sont dus à ça. Mais devant ma télé, j’avais l’impression qu’il ne dégageait pas la même fraîcheur qu’à Liège-Bastogne-Liège ou qu’à la Vuelta de l’an dernier. Dimanche, à l’arrivée de son chrono, on aurait dit qu’il avait 40 ans (sic). Il a été très loin dans ses limites lors de cet effort-là.”

Comment a-t-il réagi quand le médecin lui a annoncé qu’il ne pouvait pas continuer le Giro ?

”Il était abattu mais il a compris la décision. Il ne l’a jamais remise en cause. Je sais que sur les réseaux sociaux, certains disent qu’avec deux ou trois jours passés calmement au sein du peloton, il aurait pu se refaire une santé, mais on ne plaisante pas avec ça. Il en va de la carrière du coureur, quand même. Même s’il avait pu s’épargner durant deux étapes, il aurait toujours passé une journée complète sur le vélo. Ce sont des efforts, malgré tout.”

Pour l’équipe aussi, c’est un gros coup dur…

”Évidemment. On avait tout misé sur Remco. On avait des énormes attentes justifiées à son égard. Notre première préoccupation aujourd’hui est que Remco récupère de ce virus. On va bien prendre le temps qu’il faut. Et après, on se mettra ensemble à table pour discuter de la suite de son programme.”

guillement

« C’est le moindre de nos soucis pour l’instant. »

Beaucoup évoquent déjà sa participation au Tour de France en juillet prochain.

”C’est prématuré d’en parler. Je sais que les journalistes fantasment déjà beaucoup à ce sujet-là mais c’est le moindre de nos soucis pour l’instant.”

La Vuelta ne constitue-t-elle pas une meilleure option dans le contexte actuel ?

”Écoutez, on va avancer calmement, sans brûler les étapes. Remco va d’abord prendre un peu de congés. Il l’a bien mérité après tous les efforts et les sacrifices consentis ces derniers mois pour arriver en pleine forme au Giro. Et quand il sera remis et qu’il en manifestera le désir, nous parlerons de son futur.”

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Ses équipiers toujours en lice au Giro auront-ils désormais carte blanche pour viser une victoire d’étape ?

”Absolument mais j’espère surtout que personne d’autre ne contractera le virus. Avec toutes les sollicitations liées à son statut, Remco a quand même croisé beaucoup de monde ces dix derniers jours. Peut-être aurions-nous dû être plus prudents vu qu’il y avait déjà eu pas mal de cas de Covid-19 avant et pendant ce Tour d’Italie. Il a dû satisfaire aux obligations protocolaires, puis il y a le contact avec les journalistes, le public, sans oublier tous les autres coureurs. Franchement, c’est impossible de savoir où il l’a attrapé.”

Depuis trois ans, le Covid-19 est un adversaire supplémentaire dans la vie d’un cycliste.

”C’est exactement ça et on ne peut que l’accepter. Il est toujours présent dans le monde mais une personne lambda se sentira un peu fatiguée, aura quelques courbatures et prendra un antidouleur. Le sportif de haut niveau sera, lui, beaucoup plus impacté. Et comme le cyclisme est le sport où les contrôles sont les plus fréquents, la menace du Covid-19 demeure omniprésente, oui. Il n’est plus possible de faire une saison sans penser à ce virus.”

Pour enchaîner sur une note positive, Remco avait gagné deux étapes et était en rose au moment de quitter le Giro.

”Vous savez, Remco ne passe pas souvent à côté d’un objectif qu’il s’est fixé. Dois-je vous rappeler qu’il a gagné La Doyenne à deux reprises, il a été champion du monde, a remporté le Tour d’Espagne et dominait le Giro ? Si l’on fait abstraction de son abandon à cause du Covid-19, c’est exceptionnel.”

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En outre, il a énormément appris durant les neuf jours passés au Giro. Il a expliqué avoir commis l’erreur de vouloir sauter dans la roue de Roglic, samedi, et d’être parti trop vite dimanche…

”Oui, il a appris. Mais pour parler du chrono de Cesena, qui dit qu’il n’aurait pas pu continuer sur son rythme de départ s’il était en bonne santé ? Et samedi, je n’ai pas l’impression qu’il fait une faute. J’ai eu le sentiment qu’il manquait déjà de fraîcheur. Klaas (NdlR : Lodewyck, le directeur sportif) m’a dit qu’il le trouvait un peu plus fatigué depuis quelques jours. C’est pour ça aussi qu’on a fait un test à tout le monde dimanche soir.”

Était-ce le premier test que vous faisiez depuis le début du Giro ?

”On en a fait un avant le départ de Belgique, un autre à l’arrivée en Italie et celui-ci. L’UCI ne l’impose plus aux équipes. Donc, elles gèrent ça comme elles le veulent. Et le mot d’ordre chez nous est de ne pas prendre de risque. Si quelqu’un se sent malade, on le teste évidemment tout de suite mais Remco ne nous avait pas fait de demande dans ce sens.”