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La justice européenne réduit de moitié l’astreinte journalière de 1 million d’euros que la Pologne est condamnée à payer

Cette condamnation faisait suite au recours en manquement introduit devant la Cour en avril 2021 par la Commission européenne, qui estimait que plusieurs réformes législatives de l’appareil judiciaire polonais violent le droit de l’Union, dont l’indépendance et l’impartialité des tribunaux. Depuis son retour au pouvoir, en 2015, le parti ultra-conservateur et eurosceptique Droit et Justice (PiS) s’emploie en effet à accroître la mainmise de l’exécutif sur la justice. Le recours de la Commission visait lnotamment la création d’une chambre disciplinaire des juges de la Cour suprême polonaise.

Le 14 juillet 2021, la CJUE avait obligé, par ordonnance, la Pologne à suspendre l’application des dispositions nationales contestées. Loin de jouer l’apaisement, le gouvernement polonais avait opté pour la confrontation. Il avait saisi le Tribunal constitutionnel polonais (à sa botte) qui, le 7 octobre, avait contesté la primauté du droit européen — un des murs porteurs de l’intégration européenne.

Faute de volonté de Varsovie de se conformer à ce que demandait la Cour de Luxembourg, celle-ci avait condamné la Pologne le 27 octobre 2021 à payer une astreinte d’un million d’euros “pour garantir [qu’elle] donne effet aux mesures provisoires” énoncées dans l’ordonnance de juillet.

Facture salée pour la Pologne, pour non-respect du droit européen

Le 10 mars 2023, la Pologne a demandé à la Cour de modifier l’ordonnance lui imposant de payer cette astreinte, arguant qu’elle a procédé aux changements législatifs qu’on attend d’elle.

Varsovie doit encore beaucoup mieux faire

Le vice-président de la Cour, Lars Bay Larsen, constate que les mesures prises par la Pologne depuis qu’elle est condamnée à payer l’astreinte journalière sont “de nature à assurer de manière notable, l’exécution des mesures provisoires énoncées dans l’ordonnance” de juillet 2021. Et de citer l’abrogation de dispositions conférant à la chambre disciplinaire des compétences relatives au statut des juges et, bien sûr, la suppression de ladite chambre disciplinaire. Au vu de l’effet de ces mesures, il ramène le montant de l’astreinte à 500 000 euros.

Le juge estime cependant que les circonstances ne sont pas réunies pour lever l’astreinte. Il note que les décisions adoptées par la chambre disciplinaire autorisant l’ouverture d’une procédure pénale contre un juge ou son arrestation n’ont pas été suspendues de manière immédiate. La Pologne n’a par ailleurs pas démontré qu’elle avait entièrement suspendu “les dispositions interdisant aux juridictions nationales de vérifier le respect des exigences de l’Union relatives à un tribunal indépendant et impartial établi préalablement par la loi, ni celles permettant des poursuites disciplinaires contre un juge ayant procédé à cette vérification”.

C’est aussi parce que la Pologne ne s’est pas encore pleinement conformée aux injonctions de la justice européenne qu’elle ne peut pas avoir accès aux 36 milliards d’euros (23,9 milliards d’euros de subventions et 12,1 milliards de prêts) du plan de relance européen qui lui sont destinés.

La Cour de justice de l’UE rendra son arrêt sur le fond de l’affaire en juin 2023. Elle le fera sur base des conclusions rendues en décembre 2022 par l’avocat général Collins, selon lesquelles les réformes de l’organisation de la justice en Pologne violent le droit de l’Union.