International

Au Soudan, une guerre partie pour durer entre deux riches généraux

À pied ou en voiture, sur des routes jonchées de cadavres et de blindés calcinés, des milliers de Soudanais tentent de passer sous les tirs croisés des FSR du général Mohamed Hamdane Dagalo, dit “Hemedti”, et de l’armée que dirige le général Abdel Fattah al-Burhane, aux commandes du pays depuis leur putsch conjoint de 2021.

ce mercredi en soirée, les FSR du général Hemedti ont annoncé sur Twitter un cessez-le-feu de 24 heures pour permettre l’évacuation des civils et des blessés qui seraient déjà plus de 3 000 selon des chiffres onusiens. Mais le camp adverse du général al-Burhane n’avait pas réagi à cette annonce de trêve qui ne peut prendre corps que si les deux camps acceptent de faire taire les armes.

Un conflit long

La communauté internationale ne cesse d’appeler au dialogue depuis le début des hostilités. Mais les deux hommes restent sourds à ces appels. Le combat entre les deux généraux qui se sont partagé le pays depuis près de deux ans “ne pourra s’achever que sur la défaite totale de l’un d’eux”, explique un ancien ambassadeur européen en poste à Khartoum. “Ce combat est existentiel, le premier qui baissera la garde sera envoyé définitivement au tapis et il aura tout perdu sans espoir de retour”, poursuit-il, “très pessimiste” sur le futur à court et même à moyen terme. “Les deux hommes ont des moyens et des connexions multiples et variées qui vont leur permettre de tenir un certain temps”.

Ce pessimisme est de rigueur chez la plupart des “connaisseurs” de la région qui pointent les moyens financiers importants dont disposent ces deux généraux “qui ne devraient pas avoir de difficultés à maintenir et entretenir leurs stocks d’armes”. “La communauté a laissé pourrir la situation. La tension est montée progressivement entre les deux hommes. Cette division qui ne cessait de croître ne pouvait qu’aboutir à ce scénario actuel mais personne n’a réagi. Plusieurs diplomates dans la région ont plusieurs fois mis en garde contre ce scénario, mais ils n’ont pas été entendus”. Tous les interlocuteurs de la Libre soulignent le poids de la guerre en Ukraine mais aussi, dans la région, l’attention portée sur la Libye, au nord, et sur la République démocratique du Congo, au sud. Dans ce contexte international très instable, la détérioration progressive de la situation au Soudan “est passée sous les radars”, comme l’indique un des observateurs européens…

Face à face Wagner – Al Sissi

Désormais, à chaque mouvement de tensions en Afrique, est associée l’ombre des paramilitaires russes du groupe Wagner. Le conflit qui a éclaté au Soudan ne fait pas exception. Selon plusieurs sources, les mercenaires russes sont très proches des hommes du général Hemedti qui se sont retrouvés à jouer les “gros bras” sur le terrain des conflits au Yémen et en Libye. Sur ce dernier théâtre d’actions, ils ont pu nouer des liens avec leurs “homologues” russes de Wagner. Le général Hemedti était d’ailleurs considéré par les Occidentaux comme l’homme qui a ouvert les portes du Soudan à ces mercenaires russes. Le général al-Burhane, de son côté, sait qu’il peut compter sur le soutien stratégique du président égyptien Al-Sissi.

Un Belge blessé

Depuis ce mercredi, on a appris qu’un Belge (sur les 26 qui ont été recensés par le SPF affaires étrangères) se retrouvait parmi les nombreux blessés. L’information a d’abord été donnée par le New York Times. Ce blessé, Wim Fransen, dirige la mission humanitaire de l’Union européenne au Soudan. M. Fransen aurait disparu dans la nuit de dimanche à lundi, alors que les combats s’intensifiaient à Khartoum. Ses collègues de la mission de l’Union européenne à Khartoum sont partis à sa recherche et l’ont retrouvé mardi. Selon le New York Times, ses blessures sont graves mais ne mettent pas sa vie en danger.