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37 chefs d’accusation pèsent sur Donald Trump – Actualités Tunisie Focus

L’ex-président américain est visé par 37 chefs d’accusation, notamment la rétention délibérée d’informations ayant trait à la défense nationale.

C’est la deuxième fois que Trump est mis en accusation en trois mois, et c’est du sérieux. La justice se penche sur les centaines de documents classifiés entreposés chez lui après son départ de la Maison-Blanche. Si le cas de New York, dans la longue série des problèmes judiciaires de Donald Trump, a été décrit comme faible – il s’agissait de paiements à une actrice de porno dissimulés dans des comptes, vus comme un stratagème pour influencer l’élection de 2016 –, celui-là a toujours été considéré comme solide.

Avec cette affaire, Donald Trump devient le premier président à être inculpé au niveau fédéral. Une fois encore, c’est lui-même qui l’a annoncé sur son réseau, Truth Social. Il doit se présenter, mardi 13 juin à 15 heures, devant le tribunal fédéral de Miami, où l’acte d’accusation a été déposé. Il est accusé avec un assistant, Waltine Nauta, qui a continué à travailler pour Trump après son départ de la Maison-Blanche.

C’est lui qui aurait déplacé les cartons, depuis une pièce de rangement, vers la résidence de Mar-a-Lago pour que Trump en vérifie le contenu. Nauta a ensuite affirmé aux enquêteurs qu’il n’était pas au courant que ces cartons avaient été bougés.

L’acte d’inculpation, approuvé par un grand jury de 23 personnes, déroule, sur 49 pages, 37 chefs d’accusation. Parmi eux, 31 portent sur la rétention délibérée d’information ayant trait à la défense nationale, en violation de la loi sur l’espionnage qui interdit de garder des secrets d’État dans des lieux non autorisés et non sécurisés. Chacun est passible de dix ans de prison maximum.

Il est aussi accusé de dissimulation de documents liés à une enquête fédérale – Trump et Nauta auraient caché les cartons de documents aux enquêteurs et au grand jury –, de conspiration en vue d’entrave à la justice – entre Trump et Nauta pour conserver les documents – et de faux témoignage – Trump a répété qu’il les avait rendus aux forces de l’ordre et a tenté de cacher le fait qu’il les avait gardés.

La conspiration est passible de vingt ans de prison. Les images jointes à la plainte sont surprenantes. On y voit des monceaux de cartons sur une scène de salle de bal, entre les dorures de Mar-a-Lago, sur le sol en marbre d’une salle de bain – éclairée par un lustre – ou renversés dans un débarras – accessible depuis la piscine, selon l’acte d’accusation.

« Confidentiel » ou « top secret »

La loi oblige les présidents à restituer tous leurs documents – y compris leurs courriers et e-mails – aux Archives nationales quand ils quittent leurs fonctions. Donald Trump, à son départ de la Maison-Blanche en janvier 2021, avait pourtant emporté des cartons. En janvier 2022, après de nombreuses demandes, il en a rendu quinze. La police, pensant qu’il n’avait pas tout restitué, avait cependant émis une assignation à rendre les éléments manquants. Ses avocats en avaient rendu d’autres.

C’est parce que la police pensait que le compte n’y était toujours pas que le FBI a perquisitionné le club de Mar-a-Lago, le 8 août 2022, et a mis la main sur une trentaine de cartons supplémentaires, comptant quelque 11 000 documents. Ces derniers « comprenaient des informations sur les capacités de défense des États-Unis et de pays étrangers », sur les « programmes nucléaires » américains et sur les « vulnérabilités potentielles en cas d’attaque contre les États-Unis et leurs alliés », d’après l’acte d’inculpation.

Les cartons restitués aux Archives contenaient 184 documents classifiés, ceux rendus après l’assignation 38, et ceux trouvés lors de la perquisition 102, soit un total de 324 documents classifiés. Certains étaient marqués « confidentiel », d’autres « secret », d’autres encore « top secret ».

Un document sur « les capacités nucléaires d’un pays étranger »

La plainte note que Mar-a-Lago était un « club actif » entre la fin de la présidence de Donald Trump, en janvier 2021, et la perquisition d’août 2022. Pourtant, Trump y a stocké ses cartons, « y compris dans une salle de réception, des toilettes avec douche, un bureau, sa chambre et une salle de stockage ». Elle rassemble de nombreux témoignages de ses avocats et conseillers et décrit plusieurs scènes où Donald Trump s’est vanté de détenir ces documents devant des visiteurs et l’accuse de les leur avoir montrés.

En particulier, en 2021, à Bedminster, la résidence de Trump dans le New Jersey, il aurait montré un « plan d’attaque » du Pentagone sur l’Iran, incluant une carte d’opération militaire, à un visiteur qui n’aurait pas dû avoir accès à ces informations. Donald Trump possédait aussi un document sur « les capacités nucléaires d’un pays étranger ».

L’acte d’accusation énumère les informations sensibles contenues dans les documents et note que « les communiquer sans autorisation pourrait mettre en péril la sécurité nationale des États-Unis, les relations étrangères, la sécurité de l’armée des États-Unis, et les sources humaines et la viabilité des méthodes de recueil d’informations sensibles ».

Refus de rendre les dossiers

Par ailleurs, l’acte d’inculpation démonte les arguments mis en avant par Trump depuis l’été dernier. Il a toujours affirmé qu’il aurait suffi de lui demander de rendre les documents et qu’il l’aurait fait. Mais des conversations retranscrites montrent que non seulement il était au courant de la requête du département de la Justice mais qu’en plus il a demandé à ses collaborateurs de cacher ces dossiers et a exprimé son refus de les rendre.

« Je ne veux pas que quiconque regarde dans mes cartons », a-t-il dit à un de ses avocats. Il a également demandé si ce ne serait pas mieux « si on leur disait juste qu’on n’a rien ici ». Trump a aussi toujours prétendu qu’il pouvait déclassifier les documents, en tant qu’ancien président, rien qu’en y pensant. Un enregistrement de 2021 montre qu’il savait que c’était faux. « En tant que président, j’aurais pu déclassifier, mais maintenant je ne peux pas », dit-il.

Jack Smith, le conseiller spécial du département de la Justice chargé de l’enquête, et qui a rédigé la plainte, a déclaré en conférence de presse : « Nos lois qui protègent les informations qui protègent la défense nationale sont cruciales pour la sûreté et la sécurité des États-Unis et elles doivent être appliquées. Les violations de ces lois mettent notre pays en danger. »

Empreintes digitales et photos

Trump a comparé cette mise en accusation avec la « plus grande chasse aux sorcières de tous les temps » sur son réseau, Truth Social. « Je n’aurais jamais cru possible qu’une telle chose arrive à un ancien président des États-Unis, qui a récolté bien plus de voix que tout autre président dans l’histoire de notre pays et qui est actuellement, de loin, devant tous les candidats, à la fois démocrates et républicains, dans les sondages de l’élection présidentielle de 2024. Je suis un homme innocent ! »

Des documents classifiés ont aussi été trouvés chez Joe Biden et chez Mike Pence. datant de l’époque où ils étaient vice-présidents, le premier de Barack Obama, le second de Donald Trump. Biden entend se représenter en 2024 et Pence brigue l’investiture républicaine.

Mardi, à Miami, les empreintes digitales de Trump et des photos devraient être prises, avant la lecture de l’acte d’accusation, à l’issue de laquelle il sera relâché. Plusieurs audiences devraient suivre, où le ministère public devra communiquer ses preuves, décider de ce qu’il peut citer directement sans compromettre des informations sensibles sur la sécurité des États-Unis et d’autres pays, etc.

Un procès aurait lieu des mois plus tard et, si Donald Trump était jugé coupable, le verdict n’interviendrait pas avant un éventuel appel. S’il choisit de plaider coupable, il n’y aura pas de procès. Ses avocats chercheront probablement à faire traîner pour que le procès n’ait pas lieu avant l’élection de novembre 2024.

Le rôle de la juge sera crucial, elle décidera notamment des preuves à admettre ou non. Or il s’agit d’Aileen Cannon, juge nommée par Donald Trump en 2020. L’été dernier, elle avait été réceptive aux arguments de Trump et lui avait accordé la nomination d’un conseiller spécial pour superviser l’enquête sur les documents.

Avec agences