France

« Une femme serait faite pour être mère ? Rien de plus faux », selon la romancière Sophie Jomain

Holly Goli, blogueuse et contributrice du groupe de lecture 20 Minutes Books, vous recommande Le dernier sommeil de l’ourse de Sophie Jomain, qu’elle a interviewée. Son roman est paru le 28 février 2023 aux Éditions Charleston.

Sa citation préférée :

– Savoir quoi ?

– Que je ne regrette pas d’avoir été celle que j’ai été, mais que je regrette que tu en aies souffert. »

Pourquoi ce livre ?

  • Parce que ce roman explore les relations mère fille. Abigail, l’héroïne, revient en Alaska auprès d’une mère avec laquelle elle ne s’est jamais entendue. On va la suivre évoluer dans la maison de son enfance avec une mère qui refuse d’aller vivre avec elle en France. On va voir ces deux femmes que tout oppose s’affronter avant de se rapprocher. C’est parfois dur mais tellement touchant et bouleversant.
  • Parce que les paysages sont à couper le souffle ! Sophie Jomain situe son histoire dans une petite ville totalement coupée du monde où les habitants s’entraident. On voyage en Alaska du début à la fin et on n’a qu’une envie : découvrir ces beaux paysages.
  • Parce que le roman parle de relation mère fille mais aussi de maternité. La plume de l’autrice est juste, belle et surtout, elle nous plonge dans un cocon qui donne envie de rester plus longtemps avec ses personnages.

Sophie Jomain, comment vous est venue l’idée de ce roman ?

Il y a quelques années, National Geographic a lancé une série documentaire en plusieurs saisons intitulée « Alaska : seuls au monde ». Ils suivaient la communauté de Port Protection. Une trentaine d’habitants vivant en totale autarcie en Alaska du Sud, à l’extrême nord de l’île du Prince de Galles. Ces gens se nourrissent exclusivement de la pêche et de la chasse et vivent au gré du climat et de la nature. J’ai été subjuguée par leur mode de vie. Lorsque les éditions J’ai lu m’ont demandé de participer à un recueil de nouvelles postconfinement « Vite de l’air, vite du vert ! », et qui devait mettre en avant le besoin de retrouver la liberté, j’ai choisi Port Protection comme cadre. Quant au sujet des relations mère fille, il m’interpellait depuis longtemps, alors il est venu naturellement. C’est dans ce contexte que j’ai créé Abby et Emma, une mère et sa fille qui allaient se retrouver après 17 ans de séparation volontaire.

Quel est votre processus d’écriture ? Faites-vous de longues recherches en amont ? Ou alors laissez-vous l’inspiration venir et écrire au fur et à mesure ?

J’ai écrit vingt-sept romans, et j’ai mûri depuis toutes ces années. Avant je pouvais écrire avec un travail de préparation minimum, tout était dans ma tête, parfaitement dessiné. Aujourd’hui, c’est très différent. J’écris un synopsis très précis, je prépare un découpage, je fais des fiches personnages, une liste de tout ce que j’aimerais voir dans cette histoire et je me lance. Les cinq premiers chapitres me viennent assez vite. Puis je m’arrête, je revois, change, peaufine mon synopsis autant de fois que nécessaire. C’est un moyen rassurant qui permet aussi de ne rien oublier. Et puis, il y a tout le travail de recherche. Il m’a fallu un an pour écrire « Le dernier sommeil de l’ourse », car l’histoire ne se déroulait pas chez moi, pas dans un pays que je connaissais. Je me suis plongée dans l’ambiance de l’Alaska du sud, de Port Protection. Non seulement je n’y ai jamais mis les pieds, mais pour vous en parler avec autant de précision, il a fallu que je sorte de ma zone de confort, pour moi qui n’écris jamais sur les endroits que je ne connais pas, et que je fasse des recherches titanesques. Il y a peut-être encore des petites erreurs par-ci, par-là, mais il était nécessaire que mes descriptions soient au plus proches de la vérité de ce lieu qui m’a tant inspirée.

« Le dernier sommeil de l’ourse » explore la relation mère fille. Est-ce une thématique importante pour vous ?

« Le dernier sommeil de l’ourse » vient du regard que j’ai posé sur notre société. J’ai fait le choix de devenir mère tard et quand ma fille est née, ce fut une révélation, mais au fil du temps, j’ai aussi pris conscience que la maternité, dans notre société, est souvent associée à l’obligation de procréer, comme un devoir, un héritage immuable et indiscutable : une femme serait faite pour être mère. Il n’y a rien de plus faux. Être mère n’est pas aussi instinctif qu’on le pense. Autour de moi, nombreuses connaissances n’étaient pas épanouies dans leur rôle de maman, ce qui peut provoquer des conflits familiaux déchirants. C’est ainsi que j’ai souhaité exploiter ces relations parfois tendues, dans « Le dernier sommeil de l’ourse », plus particulièrement entre une mère et sa fille. Pourquoi ? Parce que la relation entre une mère et sa fille, malgré l’amour, peut s’avérer compliquée, même si elle n’aboutit pas nécessairement à des excès. Quand on grandit, il arrive qu’on se heurte à nos mères, leurs idées, leurs certitudes. On possède un héritage familial qu’il est possible de ne pas vouloir reproduire. C’est là que la relation se complique. Une envie de faire autrement pour l’une, un désaveu pour l’autre. Un gouffre parfois. Mais le message aussi dans « Le dernier sommeil de l’ourse » c’est surtout que peu importe d’où l’on vient, nos racines sont plus profondes qu’on ne le croie. On a besoin d’elles pour comprendre qui nous sommes, pour nous épanouir et avancer. Pour savoir « pourquoi ? ».

Quels mots pour qualifier « Le dernier sommeil de l’ourse » et convaincre vos futurs lecteurs ?

« Racines », « dépaysement » et je dirai « pardon », car Abby et sa mère ont besoin de se pardonner.

L’essentiel en 2 minutes

L’intrigue. Abigail retourne en Alaska à la mort de son père. Son objectif est simple : ramener Emma, sa mère avec qui elle ne s’entend pas, en France. Mais Emma refuse de partir. Elles vont devoir cohabiter et apprendre à se connaître pour se pardonner…

Les personnages. Abigail, Emma mais aussi William le médecin et les habitants d’Eagle Bay.

Les lieux. Le roman se passe en Alaska, à Eagle Bay, sur l’île du Prince-de-Galles.

L’époque. Le roman se déroule à notre époque

L’auteur. Sophie Jomain a écrit plus d’une vingtaine de romans allant de la littérature fantastique à la comédie en passant par le roman contemporain. Elle est désormais une figure incontournable de la littérature en France.

Ce livre a été lu avec beaucoup d’émotions fortes. J’ai été bouleversée par la relation entre les deux personnages. C’est une histoire entre une mère et sa fille, une histoire basée sur des souffrances et des non-dits mais qui montre que l’on peut tout pardonner et profiter de chaque instant ensemble. A découvrir !

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