France

« The Voice m’a fait grandir », confie Yoann Fréget, 10 ans après son sacre

Il y a dix ans, le 18 mai 2013, Yoann Fréget remportait « The Voice ». Devant près sept millions de téléspectateurs, ce Montpelliérain alors âgé de 26 ans, habité par ses chansons, était sacré meilleur talent de la deuxième saison de l’émission. Dix ans après sa victoire, Yoann Fréget est devenu Yoann FreeJay, et, il se fait rare, très rare, dans les médias. Mais les feux de la rampe, sous lesquels il a brûlé pendant de longs mois après sa consécration à « The Voice », ne lui manquent pas. Pas du tout, même. Car Yoann FreeJay, même s’il n’est pas dans « 50 minutes Inside », n’a jamais arrêté de chanter, en France, aux Etats-Unis, dans des églises, dans des petites, comme des grandes salles. Dix ans après, il répond aux questions de 20 Minutes.

Comment ça va, dix ans après « The Voice » ?

Très, très bien !

Votre victoire, en finale, c’est encore tout frais, dans votre mémoire ?

Ah, ça, c’est une bonne question… (Il réfléchit) J’ai tellement évolué depuis, que ça me semble très loin. Mais, en même temps, je me sens tellement proche de mon âme d’enfant, et donc de jeune homme, que ça me semble à la fois très près.

Vous vous souvenez encore des sensations, que vous avez ressenties, quand Nikos Aliagas a annoncé votre prénom ? Il y avait de l’adrénaline ?

Je m’en souviens très bien. Mais ce n’était pas de l’adrénaline ! Si on revoit ma réaction, on voit bien que je n’ai pas du tout sauté de joie. J’ai ressenti de la gratitude, bien sûr, mais aussi un poids. Une responsabilité. Une certaine gravité. Je suis quelqu’un de très intuitif, et j’ai dû, sans doute, ressentir tout ce que cette victoire allait impliquer. C’est pour ça, que je n’ai pas fait de sauts dans tous les sens ! Avec le recul, je comprends pourquoi.

Et le trophée, vous l’avez toujours ?

Il n’y a pas de trophée ! Ils ont dû en fabriquer un, ensuite. C’est vrai que ça manque, à ma bibliothèque ! Mais sur ma bibliothèque, en revanche, j’ai un autre trophée, qui compte beaucoup pour moi. Celui du concours The Sankofa Soul Contest, que j’ai remporté, et qui m’a permis de monter pour la première fois sur scène à Paris. C’est là que l’équipe de « The Voice » m’a repéré, et m’a proposé de passer le casting de l’émission. Ce n’est pas moi qui me suis inscrit, je n’ai jamais envoyé de candidature à « The Voice ». Je me suis dit « Pourquoi pas », c’était une bonne opportunité de partager des bonnes énergies en musique. Mais je savais, déjà, qu’avec ma personnalité, le show-business, ça risquait d’être un peu compliqué… Je me suis lancé. Et je n’ai jamais eu aucun regret.

Vous vous attendiez, à aller si loin, dans cette émission ?

J’ai une philosophie dans la vie, c’est que tout est possible. Surtout si on donne son cœur, à 100 %. Et comme c’est ce que j’ai fait, 98 % du temps que j’étais dans cette émission, je savais que c’était possible. Mais je ne me suis jamais dit « Je vais gagner ! », jamais.

Avant l’émission, vous étiez déjà chanteur, et vous aviez fait des tas de scènes, depuis des années…

Oui. « The Voice » a été un véritable amplificateur. Mais la musique était mon métier depuis mes 19 ans. J’avais notamment fait de nombreuses scènes aux côtés d’Emmanuel Djob [un musicien montpelliérain, lui aussi candidat de la saison 2] et Marianne Aya-Omac [une musicienne montpelliéraine, candidate de la saison 6]. Sans eux, Yoann FreeJay n’existerait pas. Ce que je suis aujourd’hui a été réveillé par ces deux artistes immenses. Ils ont eu une importance considérable dans le fait de me montrer que la musique, c’est pour se transcender, c’est quelque chose de profond. Au-delà des paillettes.

En 2013, après votre victoire, vous avez sorti un album, Quelques heures avec moi, avec le titre Sauras-tu m’aimer, la bande originale de La belle et la bête de Christophe Gans. Mais ça n’a pas marché autant que vous l’auriez souhaité… Ça vous a surpris ?

Non.

Non ?

Non. (Il se marre) C’est ma réponse ! Je suis très fier de cet album. Mais cet album, les gens ne savaient pas qu’il était sorti. Et encore aujourd’hui, on me dit « Ah bon, vous avez sorti un album ! ».

Yoann Fréget, à la Fête de la musique, à Paris, en 2016.
Yoann Fréget, à la Fête de la musique, à Paris, en 2016. – LIONEL URMAN/SIPA

Quelques années après votre victoire, vous aviez regretté de ne pas avoir été soutenu, au niveau de la promotion du disque… Notamment par TF1.

J’ai fait le choix, désormais, de démarrer un nouveau cycle. J’ai beaucoup de gratitude, pour tout ce que « The Voice » m’a apporté. Ça m’a fait grandir, plus que tout. J’ai dû puiser plus de force, en moi-même, pour surmonter les obstacles que j’ai rencontré. Grâce à cette force, j’ai pu, aussi, faire mon coming-out. C’est inestimable. Mais pour moi, dix ans après, une page se tourne. Aujourd’hui, je veux me consacrer à mon nouveau projet.

C’est quoi, ce projet ?

C’est un projet expérimental, basé sur la magie de l’improvisation, pour montrer que la musique, c’est quelque chose qui existe au-delà du contrôle, au-delà du schéma traditionnel « couplet, refrain, couplet, etc. ». Dix ans après « The Voice », je vais voyager partout dans le monde, pour développer ce projet, #TheImproGuy [L’homme impro]. Ceux qui me connaissent bien savent que ça me correspond parfaitement. Je n’ai jamais, jamais, interprété une chanson de la même manière. Ce sera, aussi, un projet très personnel, car cette capacité d’improvisation, que peu de gens ont, je l’ai grâce à mon bégaiement, car mon cerveau n’est pas constitué de la même manière. Et ma mémoire est très aléatoire. Ça m’a poussé à développer ce talent d’improvisation, depuis que je suis tout jeune. Souvent, je dis aux gens « Donnez moi trois mots, et je vous fais une chanson ». C’est ce que je ferai, notamment, pendant mes concerts.

C’est un projet déroutant !

Oui, je comprends que l’on puisse le dire. Ce que je déplore, aujourd’hui, dans les maisons de disques, c’est que ce sont des économistes, qui se basent sur des statistiques. C’est pour ça que les chansons se ressemblent toutes. On veut faire une musique qui a déjà fait des preuves. On change juste un petit chouïa, et on nous ressert la même chose. Il y a des exceptions, c’est vrai. Mais mon exception à moi doit faire peur, car je n’ai jamais été contacté pour faire quelque chose de nouveau. On m’a contacté pour faire plein de choses banales, que je n’ai pas fait…

Parfois, quand les artistes ne sont pas sous les feux des projecteurs, on a l’impression qu’ils galèrent. Pas vous. Vous avez toujours fait des tas de concerts…

Et des stages de chant. J’ai toujours été proche des gens. L’été, juste après ma victoire à « The Voice », j’ai fait un stage de chant avec une centaine de personnes. Je sais que cette accessibilité m’a coûté une certaine crédibilité dans le milieu, parce qu’on attend parfois que les artistes se comportent comme des stars.

Ça vous arrive encore de chanter dans la rue, ou dans le métro, pour le plaisir ?

En France, non. Quand je l’ai fait, les gens m’ont encore moins appelé qu’avant. Ils pensaient que j’avais tout perdu. Ça m’a un peu dégoûté… Encore une fois, une preuve qu’il faut toujours être dans une case. Quand j’ai chanté dans le métro, je chantais aussi à l’Olympia, je faisais des tas de concerts… Alors je ne le fais qu’à l’étranger, aujourd’hui. J’adore la France, mais ce que j’aime, à l’étranger, c’est qu’il y a une certaine fraîcheur. Quand les gens me voient, ils ne pensent pas « Ah, combien d’albums il a vendu ? », « Ah, on le voit plus »… Non. Ils me jugent un peu comme les Auditions à l’aveugle, en fait.

Vous êtes la preuve qu’on peut faire ce métier, sans exister dans les médias ?

Oui, tout à fait. Mais les médias, je les aime beaucoup ! Je ne suis pas en guerre. Ni avec TF1, ni avec Universal. Je suis sur mon chemin.

Yoann FreeJay a participé à deux morceaux du nouvel album de Marianne Aya-Omac, Just a human, disponible ici. Et pour suivre l’actualité du nouveau projet de Yoann FreeJay, ça se passe par ici, et par ici.