France

Occitanie : Comment le moustique-tigre a (aussi) colonisé les montagnes

Vous êtes plutôt mer, ou montagne ? Pour le moustique-tigre, c’est les deux. Alors qu’il s’est, pendant longtemps, cantonné à la côte, voilà que ce satané Aedes albopictus se pointe dans les alpages. Les Pyrénées, les Cévennes, l’Aubrac, la Haute Vallée de l’Aude… En Occitanie, il n’y a plus aucune région montagneuse que le moustique-tigre n’a pas colonisée. Bien sûr, cet insecte particulièrement agressif, dont la période d’activité démarre ce lundi, n’est pas aussi présent dans ces territoires qu’à Palavas-les-Flots ou au Grau-du-Roi, où il pique à tout va. Mais, petit à petit, il s’incruste, dans les chalets.

« Les moustiques-tigres sont présents partout, ils sont actifs dans toute la région, confie Didier Jaffre, le directeur général de l’Agence régionale de santé (ARS) d’Occitanie, dont la lutte contre le moustique-tigre est une priorité. Ils sont même implantés dans des territoires qui, jusqu’alors, étaient épargnés, notamment les montagnes. » En 2015, le moustique-tigre, capable de transmettre les virus de la dengue, du chikungunya ou du zika, ne piquait qu’au bord de la mer, spécifiquement dans le Gard, l’Hérault et les Pyrénées-Orientales. Quatre ans plus tard, il avait volé jusqu’à l’ouest de la région.

Un cas de dengue autochtone dans les Hautes-Pyrénées, « c’était inattendu »

Aujourd’hui, plus aucun département n’est épargné par ses insupportables « bzzz ». Et notamment, les Hautes-Pyrénées. Au mois d’août dernier, un habitant d’Andrest, un village de 1.300 âmes, a contracté la dengue, une maladie qui peut être transmise lorsque l’on est piqué par un moustique-tigre, si l’insecte en est porteur. Une première : il y avait eu, jusqu’alors, dans ce département, quelques cas où la maladie avait été importée par des personnes qui avaient voyagé dans des pays à risques, notamment les pays tropicaux. Mais l’été dernier, pour la première fois, ce patient n’avait pas fréquenté de territoires où la dengue sévit. Heureusement, il n’y a pas eu de conséquences graves, pour cet habitant.

Une dizaine d’autres cas similaires ont été identifiés, lors de l’année 2022, dans les Pyrénées-Orientales, en Haute-Garonne et dans le Tarn-et-Garonne. « C’était inattendu, car ce sont des départements qui n’avaient, jusqu’alors, jamais été concernés par ce type de cas de dengue autochtone », explique Isabelle Estève-Moussion, ingénieure coordinatrice de la lutte anti-vectorielle à l’ARS, en Occitanie. « La présence du moustique-tigre était, jusqu’alors, assez limitée dans les Hautes-Pyrénées, et on pensait être épargné, en raison de la situation géographique et topographique du département », ajoute Manon Mordelet, la directrice départementale de l’ARS dans les Hautes-Pyrénées.

« On pensait que le moustique-tigre allait s’arrêter en dessous de 1.000 mètres d’altitude »

Et le changement climatique devrait booster, encore un peu plus, la présence de cette espèce dans les montagnes. « Avec des températures plus élevées, le moustique-tigre va monter dans les étages, en altitude, note Isabelle Estève-Mousson. Jusqu’à il y a trois ou quatre ans, on pensait qu’il allait s’arrêter en dessous de 1.000 mètres. Mais l’an dernier, on s’est aperçu qu’il pouvait tout à fait faire son cycle complet à plus de 1.500 mètres. »

Désormais, à la montagne, on va devoir communiquer, comme au bord de la mer, sur les gestes simples, pour lutter contre le moustique tigre : vider les eaux stagnantes, dont l’espèce raffole, couvrir, de façon hermétique, les récupérateurs d’eau, ou réparer les tuyaux cassés, où elle se réfugie. « Plus particulièrement chez nous, il faut que l’on sensibilise la population un peu plus qu’ailleurs, pour casser le mythe dans lequel on vivait tous, selon lequel le moustique-tigre ne circulait pas dans le département, poursuit Manon Mordelet. Mais je pense que l’épisode de l’année dernière a éveillé les consciences. »