France

« Les gens ne peuvent plus se loger »… Des députés veulent mieux encadrer les locations de courte durée, type Airbnb

« Il y a un tsunami de disparition de logements », s’alarme Julien Bayou, député écologiste de Paris. Ce mardi matin, café Concorde à Paris, trois parlementaires ont présenté leurs propositions pour mieux encadrer la location de meublés touristiques de courte durée, qu’ils accusent de siphonner l’offre de logements en France.

A commencer par Paris, où il est devenu très difficile de se loger. « Dans le 3e arrondissement, j’ai vérifié ce matin, il y a 2.600 offres de locations saisonnières et 30 en bail classique », explique Julien Bayou qui a monté avec trois autres parlementaires de différents bords politiques, Inaki Echaniz, député des Pyrénées-Atlantiques (PS), Christophe Plassard, député de Charente-Maritime (Horizons) et un troisième absent ce matin, Max Brisson, sénateur des Pyrénées-Atlantiques (LR), un site Internet qui regroupe l’intégralité de leurs propositions.

« Les gens ne peuvent plus se loger sur place »

Parmi les mesures avancées, la suppression de la niche fiscale dont bénéficient les loueurs de courte durée, l’interdiction de la location de passoires thermiques via les plateformes touristiques, la réduction à 90 du nombre de nuitées autorisées pour la location de sa résidence principale, en étendant cette interdiction aux résidences secondaires, ou encore la possibilité pour les collectivités de mieux réguler à leur échelle.

Car les situations sont très différentes selon les territoires. Inaki Echaniz explique que dans la communauté d’agglomération du Pays basque, il y a eu entre 2016 et 2020 une augmentation de 130 % des locations de tourisme. « Je suis sur un groupe Facebook de ma commune, il y a au moins un post par jour de quelqu’un qui cherche un logement et n’en trouve pas. Le personnel soignant est obligé de dormir dans une voiture l’été, il y a des communes avec plus de 50 % de résidences secondaires. Et les gens qui habitent à Bayonne ne peuvent plus se loger sur place, cela crée des problèmes de transport, on se retrouve avec des bouchons au milieu des vallées », s’insurge le député.

Les parlementaires préparent une proposition de loi qui devrait être examinée en juin, mais appellent le gouvernement à intégrer ces mesures dans un projet de loi. « Tout ne peut pas rentrer dans une proposition de loi, les projets de loi sont plus complets », justifie Julien Bayou.

« Il y a un trou dans la raquette »

Le député de Paris met particulièrement l’accent sur l’interdiction de la location des passoires thermiques sur de la courte durée, alors qu’en Ile-de-France, sans travaux de rénovation énergétique, près d’un logement sur deux sera bientôt interdit à la location classique, et qu’à Paris, plus d’un cinquième des logements sont d’ores et déjà classés F ou G. « Il y a des petits malins qui achètent des passoires thermiques qu’ils vont louer en meublés touristiques » dénonce le député, qui estime que la loi est contournée. « Il y a un trou dans la raquette » abonde Inaki Echaniz.

Les parlementaires estiment aussi que la réduction de 120 à 90 jours devrait permettre aux personnes qui ont hérité d’une résidence secondaire qui coûte cher à entretenir de la louer suffisamment de temps pour couvrir les charges à l’année. « Il faut que ces gens-là puissent continuer à garder leur bien, mais 90 jours cela permet normalement de garder son bien », avance Christophe Plassard, qui met en avant la situation londonienne, où la limite est de 90 jours.

Des personnes mises à la porte au début de l’été

Les élus ont insisté sur la nécessité d’accroître les contrôles. « Les baux mobilités illégaux, les congés pour vente abusifs, les fausses déclarations sur les typologies des résidences et sur l’activité des locations touristiques participent à la crise du logement » énonce leur manifeste. Dans les Pyrénées-Atlantiques, Inaki Echaniz affirme avoir constaté que de nombreuses personnes sont « mises à la porte » au début de l’été, les propriétaires ayant fait signer des baux mobilité d’une durée maximale de 10 mois pour pouvoir louer plus cher durant la période estivale. « Le droit de propriété a pris le pas sur le droit au logement », dénonce l’élu. « Quand j’ai cherché ma permanence je n’ai trouvé que des logements louables de septembre à juin », abonde Christophe Plassard.

La situation apparaît si importante qu’elle a permis à une initiative transpartisane de voir le jour. « Cela fait plaisir de voir qu’il y a des sujets sur lesquels on peut travailler ensemble », se réjouit Christophe Plassard, de la majorité, qui veut que « cela avance », et « peu importe que ce soit fait par Pierre ou Paul ». « Le ministre a fait preuve d’une discrétion tout à son honneur, mais maintenant il faut que ça avance » répond comme en écho Julien Bayou, avec un petit tacle à l’encontre de son collègue de la majorité. Des rires fusent, Christophe Plassard remercie le député écologiste d’avoir savamment tourné sa phrase. « Cela ne me dérange pas de faire du politiquement correct si les choses bougent ! »