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Entre chaleur caniculaire et sécheresse historique, l’Espagne au bord de la surchauffe

Entre hausse du mercure et sols craquelés, l’Espagne fait face à un épisode météorologique extrême. Le réchauffement climatique frappe de plein fouet l’Europe et Madrid est en première ligne. A quel point cet épisode de sécheresse et de chaleur est-il extrême ? Dans quels domaines est-ce dramatique ? 20 Minutes fait le point pour vous.

Que se passe-t-il ?

L’Espagne suffoque. Le pays souffre d’un épisode de sécheresse depuis trente-deux mois. Trois années de précipitations inférieures à la moyenne ont assoiffé les sols et portent la marque du changement climatique. La Catalogne est la région la plus affectée et vit « l’une des pires sécheresses des 50 dernières années », a insisté la semaine dernière le président régional Pere Aragonès, un indépendantiste modéré. Faute de précipitations, les réservoirs – qui stockent l’eau de pluie afin de pouvoir l’utiliser lors des mois plus secs – sont à seulement 26 % de leur capacité dans la région, selon les autorités locales.

Et l’arrivée d’une vague de chaleur exceptionnellement précoce dans le pays risque d’aggraver la situation. Selon l’agence météorologique, les températures pourraient frôler les 40 °C dans le sud du pays jeudi et vendredi. Au plus haut de cette vague de chaleur généralisée, la température moyenne sur le pays sera entre 6 et 10 °C au-dessus des normales de saison.

Mais dans certains endroits, elles dépasseront même de « 15 à 20 degrés » les valeurs normales de la fin avril, a précisé sur Twitter le porte-parole de l’agence, Ruben del Campo. « Ces températures élevées s’accompagneront également d’une absence quasi-totale de précipitations au cours de la semaine prochaine, rendant de plus en plus probable qu’avril 2023 soit le mois d’avril le plus sec de l’historique en Espagne », s’inquiète l’AEMET, l’institut météorologique espagnol.

En quoi le manque d’eau est-il dramatique en Espagne ?

Selon l’ONU, près de 75 % du territoire espagnol est aujourd’hui en voie de désertification en raison du réchauffement climatique. Cette situation met en péril le secteur agricole, pilier de l’économie espagnole, qui absorbe plus de 80 % des ressources hydriques du pays.

D’après le Coag, principal syndicat d’agriculteurs, 60 % des terres agricoles espagnoles sont actuellement « asphyxiées » par le manque de précipitations, qui a d’ores et déjà entraîné des « dommages irréversibles » pour 3,5 millions d’hectares de céréales. « La sécheresse provoque un véritable drame pour des milliers d’agriculteurs irriguant à travers l’Espagne », a déclaré mardi Juan Valero de Palma, de la Fédération nationale des organisations d’irrigation lors d’une conférence de presse à Madrid.

De plus, les autorités estiment que la saison des incendies, jusqu’alors limitée à l’été, court désormais du printemps à l’automne dans le pays. « Aujourd’hui et les trois prochains jours, le risque extrême d’incendies va se généraliser » en Espagne, prévient l’institut météorologique espagnol ce mercredi. D’après le Système européen d’information sur les feux de forêt (Effis), l’Espagne est déjà sur un record de surfaces brûlées depuis le début de l’année, avec 54.000 hectares touchés au 23 avril, contre 17.126 hectares à la même date en 2022, année pourtant record en matière d’incendies.

Quelle est la réaction du gouvernement espagnol ?

Le gouvernement espagnol a annoncé mardi une série de coups de pouce fiscaux pour ses agriculteurs, frappés par cette sécheresse historique qui menace une grande partie des récoltes. L’exécutif espagnol a notamment prévu une baisse de 25 % de l’impôt sur le revenu, devant profiter à 800.000 professionnels. En parallèle, Madrid a demandé à la Commission européenne d’activer la « réserve de crise » de la Politique agricole commune (PAC) pour aider ses agriculteurs.

« Nous faisons face à une situation exceptionnelle » qui implique une « réaction rapide de la Commission européenne », a justifié le ministre espagnol de l’Agriculture devant la presse à l’issue du Conseil des ministres. Luis Planas, qui a formalisé sa demande dans une lettre au commissaire européen à l’Agriculture Janusz Wojciechowski, n’a pas précisé le montant qu’il espérait voir débloquer en faveur des agriculteurs espagnols. La « réserve de crise » de l’UE, destinée à répondre à d’éventuelles perturbations des marchés agricoles, est dotée de 450 millions d’euros. Et elle pourrait se retrouver de plus en plus sollicitée.