France

Conductrice de travaux, elle oeuvre pour construire une autre image du BTP

Casque de chantier vissé sur la tête, sourire aux lèvres, Amélie Thomas est comme un poisson dans l’eau sur ce chantier de travaux public de Nordhouse, en Alsace. Entre la poussière soulevée par les camions toupies et la chaleur, elle est chez elle… entourée de collègues masculins. Etudiante en master Manager de projets BTP à l’ESCT près de Strasbourg, une école spécialisée dans la formation des métiers du BTP pour les bacs +2 à +5, la jeune femme aspire à devenir conducteur de travaux. Dans un secteur professionnel qui reste cependant, avec 88 % d’hommes selon les chiffres de l’Observatoire des métiers, largement masculin. « Si on fait un état des lieux, dans dix ou quinze ans, la situation sera bien différente, assure Amélie Thomas. La question [du genre] ne se pose plus maintenant. C’est un secteur qui évolue avec les nouvelles générations et il y a de moins en moins d’a priori sur ce métier, je suis confiante. »

« Pour moi, il n’y a pas de métier masculin ou féminin »

Confiante certes, et également très déterminée, la jeune femme de 21 ans trace sa route alors qu’elle ne peut que constater le peu de femmes sur les bancs de sa classe : trois sur 20 élèves. « Je n’ai jamais eu d’appréhension, je n’ai jamais considéré que ma place était là ou pas, assure la future conductrice de travaux. Je vais là où ça m’intéresse. Je ne me suis jamais trop posé la question de savoir si une femme a sa place ou non sur un chantier. Pour moi, il n’y a pas de métier masculin ou féminin ». « Ce qui nous intéresse, c’est son travail, sa motivation et c’est un très bon élément, elle apprend vite. Je la forme et elle devient meilleure que moi », abonde Ibrahim Seyfe, chef du chantier chez Pontiggia où Amélie fait son alternance.

Et Amélie de concéder toutefois que le métier de conducteur de travaux, « c’est généralement masculin ». « Mais il y a de plus en plus de femmes sur les chantiers. Le monde évolue, le métier aussi. Fut un temps où le BTP était beaucoup plus manuel. Maintenant, il y a pas mal de machines, cela rend peut-être le métier un plus accessible pour une personne qui est un peu moins physique », avance prudemment celle qui admet ne jamais avoir vu de femmes « travailler dans le gros œuvre ».

« En trente ans, il y a eu indéniablement un phénomène de féminisation du BTP », constate le directeur de l’ESCT de Strasbourg, Virgile Curtit avant de s’interroger : « est-ce que la vitesse est la bonne ? » Si les femmes représentent environ 20 % des effectifs sur les bancs de l’ESCT, « ce qui n’est pas rien », si les entreprises ne trouvent « que des points positifs » à les employer, notamment pour leurs « qualités et savoir faire en management des équipes », « est-ce que cela plaît pour autant aux femmes de venir travailler dans le BTP ? ».

« C’est un métier vivant, très polyvalent »

Dans le BTP, Amélie, elle, se plaît. Elle a déjà en poche un DUT en génie civil et une licence chargée d’affaires BTP et explique préférer le terrain et l’action à la vie de bureaux, qu’elle a déjà expérimentée en qualité de chargée d’affaires. Le génie civil, la construction, la réalisation d’un travail avec « son équipe », la programmation des travaux ou encore les relations avec les clients, les architectes et les fournisseurs la passionnent : « C’est un métier vivant, qui change tout le temps, très polyvalent. »

Amélie Thomas, étudiante en managment de projets BFTP, oeuvre sur un chantier dans le Bas-Rhin.
Amélie Thomas, étudiante en managment de projets BFTP, oeuvre sur un chantier dans le Bas-Rhin. – G. Varela / 20 Minutes

Ce que peu savent peut-être. Alors ne faudrait-il pas plus communiquer sur ces métiers du BTP ? « Au collège, on n’a pas encore choisi son orientation, alors on risque de toucher plus de gens, filles ou garçons, avance Amélie Thomas. C’est à cet âge aussi, peut-être, que l’on a le plus de préjugés sur les métiers et qu’il est éventuellement encore possible d’en changer la vision. Après c’est déjà plus compliqué car les jeunes ont déjà fait leurs choix au lycée, ils ont déjà plus ou moins fait leur orientation, même s’il reste encore la possibilité de les sensibiliser. » Il reste finalement tant à construire dans le bâtiment.