France

Classé comme « substance cancérigène suspectée », l’usage du S-métolachlore limité en France

Le sort de cet herbicide avait suscité l’émotion dans le monde agricole. C’est désormais acté. Les principaux usages du S-métolachlore sont désormais interdits en France, selon des décisions publiées jeudi par l’Agence française de sécurité sanitaire (Anses). Après le retrait d’une dizaine d’autorisations de mise sur le marché (AMM), la vente et la distribution de produits phytopharmaceutiques à base de S-métolachlore resteront autorisées jusqu’au 20 octobre 2023 et les stocks de ces produits, largement employés sur le maïs, le tournesol et le soja, pourront être utilisés jusqu’au 20 octobre 2024.

Le syndicat majoritaire du monde agricole, la FNSEA, réclame son maintien « faute d’alternatives ». Fin mars, le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau avait alors demandé à l’Anses « une réévaluation de sa décision », qui priverait les agriculteurs français de ce désherbant avant que l’interdiction ne soit généralisée dans l’ensemble de l’Union européenne.

Des dérivés chimiques détectés dans des eaux souterraines

L’Anses avait annoncé le 15 février vouloir interdire les principaux usages du S-métolachlore, « une des substances actives herbicides les plus utilisées en France » : après usage dans les champs, cette substance se dégrade en des dérivés chimiques, des « métabolites », qui se retrouvent dans les sols, les eaux de surface et eaux souterraines – et donc potentiellement dans l’eau potable.

Lors de récents « contrôles des eaux destinées à la consommation humaine, trois métabolites du S-métolachlore ont été fréquemment détectés à des concentrations dépassant les normes de qualité » fixées par la législation européenne, a indiqué l’agence en février. L’Anses avait expliqué qu’elle engageait en conséquence une « procédure de retrait des principaux usages des produits phytopharmaceutiques à base de S-métolachlore », essentiellement commercialisés par Syngenta, le poids lourd allemand du secteur.

Désaccord du ministre

« Je ne serai pas le ministre qui abandonnera des décisions stratégiques pour notre souveraineté alimentaire à la seule appréciation d’une agence », avait réagi Marc Fesneau devant les agriculteurs et représentants de la FNSEA réunis en congrès à Angers (Maine-et-Loire). « Il faut se baser sur la science pour évaluer avant de décider (…) mais l’Anses n’a pas vocation à décider de tout, tout le temps, en dehors du champ européen et sans jamais penser les conséquences pour nos filières », avait-il ajouté.

La charge a fait réagir de nombreuses ONG environnementales, mais aussi des élus, qui y voient une atteinte à l’indépendance de l’Anses et rappellent que le S-métolachlore est classé comme « substance cancérigène suspectée » par l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) depuis juin dernier.