Belgique

Malgré les mises en garde, 21 ministres et 11 présidents de parti ont conservé un compte TikTok

Le conseil national de sécurité (CNS) avait décidé le 10 mars d’interdire aux ministres, membres des cabinets et fonctionnaires fédéraux l’usage de TikTok sur leurs appareils professionnels. Selon les services de sécurité, l’application présente en effet des failles rendant possible la récolte de données et d’informations sensibles par les autorités chinoises.

Les personnes visées devaient supprimer l’application pour le 31 mars au plus tard.

Une semaine plus tard, le 17 mars, le gouvernement fédéral confirmait la mesure. Les personnes concernées ne pouvaient plus installer ni utiliser l’application sur les appareils de service et, le cas échéant, devaient la supprimer pour le 31 mars au plus tard. Les gouvernements des Régions et Communautés s’étaient aussi inscrits dans ce mouvement, voire l’avaient anticipé.

L’application TikTok désormais interdite au niveau fédéral

Ce dimanche 2 avril, en début d’après-midi, deux jours après la date limite du 31 mars, huit ministres fédéraux (ou secrétaires d’État) avaient conservé leur compte TikTok : Georges Gilkinet (Écolo – Mobilité), Ludivine Dedonder (PS – Défense), Petra De Sutter (Groen – Fonction publique), Karine Lalieux (PS – Pensions), Annelies Verlinden (CD&V – Intérieur), Thomas Dermine (PS – Relance), Sarah Schlitz (Écolo – Égalité des genres) et Alexia Bertrand (Open VLD – Budget) (**).

Quelques comptes inactifs

Au sein du gouvernement wallon, il s’agissait du ministre-Président Elio Di Rupo (PS) et des ministres Christie Morreale (PS), Valérie De Bue (MR) et Céline Tellier (Écolo). Pour l’exécutif de la Fédération Wallonie-Bruxelles : le ministre-Président Pierre-Yves Jeholet (MR) et les ministres Frédéric Daerden (PS), Bénédicte Linard (Écolo) et Caroline Désir (PS).

Les quatre ministres du gouvernement germanophone sont les bons élèves de la classe. Aucun d’eux n’a de compte TikTok.

Au gouvernement flamand, les ministres Benjamin Dalle (CD&V) et Matthias Diependaele sont restés sur le réseau. Ce dernier, cependant, n’a jamais rien publié.

À Bruxelles, le ministre-Président Rudi Vervoort (PS) et le secrétaire d’État Pascal Smet (Vooruit) ont également un compte inactif. “Comme vous voyez, je ne l’ai jamais utilisé pour poster quelque chose, commente Pascal Smet. J’allais de temps en temps dessus pour regarder ce qui se passait. Mais, maintenant, je ne le fais plus car j’ai supprimé l’application.”

Position comparable pour Rudi Vervoort. “Il s’agit d’un compte pour voir ceux des autres. [Le ministre-Président] n’est pas un tiktokeur actif, explique son porte-parole. Et bien sûr l’application n’est plus sur son téléphone professionnel.”

L’argument privé vs professionnel

Cette distinction entre privé et professionnel avait été épinglée par le Conseil national de sécurité. Ce dernier avait recommandé de ne pas installer l’application sur les appareils privés ayant accès aux réseaux et systèmes internes des autorités fédérales, et de la supprimer si elle y était déjà installée. On peut effectivement se demander jusqu’à quel point la séparation entre les sphères privée et professionnelle des ministres qui utilisent TikTok est hermétique et sûre.

Interrogée le 2 mars à la Chambre, la ministre de la Défense, Ludivine Dedonder, avait garanti avoir pris toutes les précautions nécessaires. “L’application [TikTok] n’est de toute évidence pas installée sur mon téléphone professionnel ni privé, mais bien sur un téléphone uniquement dédié à cet effet”, avait-elle dit.

Dans le gouvernement bruxellois, la secrétaire d’État Nawal Ben Hamou est, elle, une utilisatrice active de TikTok. Par contre, les quatre ministres du gouvernement germanophone sont les bons élèves de la classe puisqu’aucun d’eux n’a de compte sur le réseau social.

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Nollet et De Wever, les exceptions

Enfin, pas moins de onze présidents de parti sont sur TikTok : Paul Magnette (PS), Georges-Louis Bouchez (MR), Rajae Maouane (Écolo), François De Smet (Défi), Raoul Hedebouw (PTB), Sammy Mahdi (CD&V), Egbert Lachaert (Open VLD), Conner Rousseau (Vooruit), Nadia Naji et Jeremie Vaneeckhout (Groen), et Tom Van Grieken (Vlaams Belang).

S’il est vrai que ceux-ci ne sont pas directement concernés par les interdictions ou recommandations prononcées aux différents niveaux de pouvoir, il n’en reste pas moins que, en raison de leurs fonctions, ils reçoivent régulièrement des informations sensibles.

Parmi les présidents des douze partis représentés à la Chambre, seuls Jean-Marc Nollet (Écolo) et Bart De Wever (N-VA) ne sont pas sur TikTok.

(**) Note : Suite à la publication de cet article, dimanche soir, le cabinet d’Alexia Bertrand nous a fait savoir que la secrétaire d’État n’utilise plus son compte TikTok depuis novembre ni le téléphone portable sur lequel était installée l’application. Le cabinet précise qu’il serait sans doute opportun de supprimer le compte.