Belgique

Les écolos du sud du pays se préparent aux élections de 2024: « L’écologie est l’avenir de l’économie wallonne… »

Que mettez-vous dans ce plan de transition ?

Il a trois axes : on veut soutenir, protéger, mutualiser. Notre plan se déroule sur cinq ans. On raisonne sur une législature. Pour l’axe “soutien”, il faut travailler avec les instruments financiers publics qui existent : Wallonie Entreprendre, les invests régionaux, les intercommunales… Les marchés publics et les appels à projet doivent être orientés, de manière progressive, vers les entreprises qui vont vers la transition. Pour 2030, on ne doit plus avoir de soutien à une économie qui n’est pas en phase avec la transition.

Cela pourrait faire des dégâts parmi les entreprises à la traîne ou qui n’ont pas la possibilité de franchir ce pas écologique.

C’est la raison pour laquelle, en plus des instruments existants, il faut créer un fonds régional de transition écologique et le doter d’au moins 1 milliard d’euros. C’est la Wallonie qui mettrait cette somme sur la table. Il faut accompagner les entreprises qui sont en difficulté et qui n’iraient pas spontanément vers la transition. Pour les entreprises qui sont déjà à la pointe, il faut créer un statut d’”entreprise à mission”. Emmanuel Faber, l’ancien patron de Danone, avait réclamé cela. Il faut que l’entreprise se dote d’une raison d’être qui ne serait plus le seul profit des actionnaires. Une entreprise à mission a une finalité sociale et environnementale qu’elle inscrit dans ses statuts. Elle s’engage elle-même sur des objectifs ambitieux qu’elle met en équilibre avec la recherche de profits.

guillement

Pour les entreprises qui sont déjà à la pointe, il faut créer un statut d’”entreprise à mission”. Emmanuel Faber, l’ancien patron de Danone, avait réclamé cela.« 

Ce genre de statut semble généreux mais peut rester lettre morte. Qui exercera le contrôle de la mise en œuvre de cette finalité sociale et environnementale ?

Les entreprises qui auraient le statut d’entreprise à mission seraient contrôlées de l’extérieur par les pouvoirs publics car ce statut donnerait un accès privilégié aux financements. C’est exigeant.

Votre plan de transition écologique prend-il en compte la situation des travailleurs des entreprises qui se lanceraient dans la transition ? Changer de modèle de production peut être lourd.

C’est le deuxième axe : “protéger”. Pour les entreprises et pour les travailleurs qui réorientent fortement leur production pour 2030 (dans le sens de la transition écologique, NdlR), on garantit l’emploi. Ensuite : la formation. Je vise l’enseignement qualifiant, mais aussi la formation en cours de carrière. Ne pensez pas qu’en trois jours, on puisse faire un tel shift. Il faut permettre des formations longues et un accompagnement pour les 6 ou les 12 premiers mois. On ne peut laisser les entreprises fonctionner seules dans le nouveau modèle. On peut imaginer qu’une personne de l’extérieur vienne accompagner le changement.

”Faire le choix du MR, c’est faire le choix de la N-VA. Cela clarifie le jeu”

Que voulez-vous dire exactement par cette garantie d’emploi ?

Si une entreprise dépose un projet de transition écologique afin de respecter, dans les cinq ans, la trajectoire des accords de Paris (sur le changement climatique, NdlR), les objectifs de biodiversité, etc., on négocie afin que les travailleurs aient la certitude de garder leur emploi dans le nouveau modèle de production. Des aides publiques seraient prévues pour cela. Ainsi, le projet ne pourra pas être une rationalisation habillée en transition.

Tout cela va coûter cher aux caisses régionales…

On sait qu’il faudra mettre à contribution les finances publiques. Mais le coût de l’inaction est plus cher que le coût de la transition. Pour la Belgique, l’inaction écologique, c’est 10 milliards d’euros par an à l’échéance de 2050, selon les chiffres qui ont été présentés par Zakia Khattabi (NdlR, ministre fédérale Écolo du Climat et de l’Environnement). Par ailleurs, notre troisième axe prévoit la mutualisation. Dans la perspective d’une économie circulaire, ce principe est central : il faudra prévoir la mutualisation des infrastructures, des flux énergétiques, des ressources et de la recherche.

guillement

Pour la Belgique, l’inaction écologique, c’est 10 milliards d’euros par an à l’échéance de 2050.« 

Jean-Marc Nollet, né le 7 janvier 1970 à Mouscron, est un homme politique belge écologiste. Il a été ministre régional wallon et ministre au sein du gouvernement de la Communauté française. Il est coprésident du parti aux côtés de Rajae Maouane depuis le 15 septembre 2019.
Jean-Marc Nollet, au siège des partis Ecolo et Groen à Bruxelles. ©ennio cameriere

La ministre-présidence wallonne pour un Écolo ? “C’est un horizon vers lequel on doit aller, bien sûr”

Êtes-vous satisfait du travail du gouvernement wallon (PS-MR-Écolo) ?

Oui, mais je suis ambitieux. Il y a encore du travail. Ce gouvernement a donné des orientations à sa politique économique, environnementale et sociale que ces prédécesseurs – PS-CDH, puis MR-CDH – avaient été incapables de donner. Je lis que le gouvernement wallon fait moins l’actualité. Peut-être, mais ce n’est pas le bon paramètre d’évaluation. Le Plan Air-Climat-Énergie qui a été adopté va amener la Wallonie à -55 % de gaz à effet de serre. Ce n’est pas rien quand même !

En 2024, si les verts restent au pouvoir, vous réclamerez le poste de ministre-Président wallon ?

C’est un horizon vers lequel on doit aller, bien sûr. À l’échelle de la Région, ça peut être l’étape suivante, mais je ne vais pas aller revendiquer le poste, je ne vais pas commencer à dire que c’est cela mon objectif.