Belgique

La Wallonie va-t-elle mener la fronde contre le traité Mercosur comme elle l’a fait contre le Ceta ?

Les agriculteurs wallons craignent que la ratification de ce traité amène en Europe des tonnes de viande en provenance d’Amérique du Sud (bœufs et poulets). Le ministre wallon de l’Agriculture, Willy Borsus (MR) n’a d’ailleurs pas manqué de préciser, mardi, dans les colonnes de L’Avenir que le “volet agricole du Mercosur est une gifle pour le secteur”.

Le ministre libéral a-t-il viré sa cuti depuis l’époque du Ceta – traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada – dont la ratification en 2016 était menacée par une fronde de trois partis wallons ? Les libéraux s’étaient en tout cas montrés ulcérés par la volonté d’obstruction affichée alors par le PS, le CDH et les écologistes, sous l’impulsion de Paul Magnette, ministre-Président wallon

Magnette et le Ceta

À l’époque, les opposants au Ceta évoquaient déjà l’importation potentielle de la viande canadienne qui allait venir mettre une pression sur les éleveurs wallons. Une position que ne partageait alors pas le MR mais qu’il épouse cette fois, même si fondamentalement, le parti reste évidemment attaché au libre-échange, nous assure le cabinet Borsus. Dans le cas du Mercosur, ce sont 90 000 tonnes de viandes de bœuf avec des droits de douane réduits qui déferleraient sur l’Europe en provenance d’Amérique du Sud. Ce qui est nettement plus que dans le cadre du Ceta. De plus, les conditions de productions dans les pays du Mercosur ne sont pas alignées sur les normes strictes exigées en Europe.

Pour le Ceta en tout cas, les libéraux avaient vu juste. Selon les chiffres récents de l’Agence wallonne à l’exportation et aux investissements étrangers (Awex), le raz de marée viandeux depuis la Canada n’a pas eu lieu. “La progression tant redoutée d’importations de produits agroalimentaires d’origine animale en provenance du Canada vers notre région, en particulier de la viande bovine, ne s’est pas produite. Les importations agroalimentaires sont insignifiantes à ce jour (0, 6 % du total avec € 1, 28 millions) et même inférieures à la situation antérieure à l’entrée en vigueur du Ceta (9, 3 % du total en 2016 – € 3, 69 millions – et 4, 3 % en 2017 – € 1, 51 millions)”, peut-on lire dans un document de l’Awex.

”À portée de main”

Le traité entre l’UE et les pays du Mercosur suivra-t-il dès lors la même fronde wallonne que celle que l’on a connue contre le Ceta ? On peut se poser la question. D’autant que, cette fois, les partis politiques du sud du pays sont unanimes. La situation sera forcément différente, parce que les craintes liées à ce traité sont partagées à une plus large échelle au niveau européen. En France où les agriculteurs étaient dans les rues avant les Wallons, le président Macron s’est montré défavorable à ce volet du traité. La semaine dernière, à l’issue d’une rencontre entre ministres des Affaires étrangères européens, l’un des vice-présidents de la Commission européenne, le Letton Valdis Dombrovskis, a déclaré que la ratification de ce traité – dont les négociations ont démarré en 1999 – était “à portée de main avant la fin de ce mandat”. Cette annonce avait attisé la colère dans une France en proie à la fronde agricole. La Wallonie, Bruxelles et la France ne sont pas isolés dans leur fronde. D’autres pays européens sont opposés à la ratification du traité Mercosur tel qu’il a été négocié : les Pays-Bas, l’Allemagne, l’Irlande et l’Autriche.

À l’époque de la fronde wallonne contre le Ceta, la Wallonie, était parfois bien seule dans son combat.